«Nous suffoquions»: témoignage depuis sa prison d’un Gilet jaune qui a «vu les mutilés»

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Il est qualifié de casseur et soupçonné d'avoir incendié deux voitures dont un véhicule Vigipirate lors de l'acte 13 des Gilets jaunes à Paris, le 9 février. Placé en garde à vue puis incarcéré, Thomas P. a publié une lettre depuis sa cellule.

Lors des affrontements qui ont éclaté durant l'acte 13 des Gilets jaunes, le 9 février, les forces de l'ordre ont eu recours aux matraques, au gaz poivre et aux grenades. Un manifestant a eu une main arrachée. Ce jour-là, des policiers en civil dissimulés dans le cortège ont suivi et filmé en secret un individu qui, selon eux, était «particulièrement hostile à la présence de fonctionnaires de police». C'est Thomas P., 25 ans, qui sera interpellé, placé en garde à vue puis incarcéré, relate Mediapart.

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Le site rappelle le rapport fait par les forces de l'ordre sur «le parcours présumé du jeune émeutier en gilet jaune: de nombreuses devantures de banques et de compagnies d'assurances vandalisées, jets de cailloux ou de trottinettes électriques sur la police» ou encore incendie d'un véhicule Vigipirate.

Aujourd'hui, Thomas P. s'explique sur ses actes et sur le parcours qu'il a choisi en rejoignant les Gilets jaunes. Sa lettre, écrite depuis sa cellule et authentifiée par ses avocats, a été publiée par son comité de soutien.

Après avoir indiqué qu'il est «incarcéré à Fleury-Mérogis sous mandat de dépôt criminel» depuis près de trois mois, le jeune homme admet avoir «commis une partie des actes» et précise qu'il les «assume».

«J'ai bien conscience qu'écrire cela risque de me faire rester un peu plus de temps en prison», ajoute-t-il, rappelant qu'en le décrivant, les médias l'avaient «réduit à un mot bien pratique: "casseur"».

Thomas P. explique clairement les raisons pour lesquelles il a décidé de se battre aux côtés des Gilets jaunes.

«J'ai vu la haine ou le vide dans leurs yeux [des policiers, ndlr], j'ai entendu leurs sommations glaçantes […]. J'ai vu les charges, les grenades et les tabassages en règle […]. J'ai vu les gens tomber, en sang, j'ai vu les mutilés […]. Et puis je n'ai plus rien vu, à cause des gaz. Tous, nous suffoquions. C'est à ce moment-là que j'ai décidé ne plus être une victime et de me battre. J'en suis fier. Fier d'avoir relevé la tête, fier de ne pas avoir cédé à la peur.»

Thomas P. rappelle qu'il a d'abord manifesté pacifiquement, essayant de régler les problèmes par la parole, mais se dit certain que «dans certaines situations, le conflit est nécessaire».

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Il souligne que, malgré les affirmations des médias, «aucun manifestant ne cherche à "tuer des flics"».

Par contre, «depuis le 17 novembre, ceux qui ont menacé de sortir leur armes, ceux qui brutalisent, mutilent et asphyxient des manifestants désarmés et sans défense, ce ne sont pas les soi-disant "casseurs", ce sont les forces de l'ordre», constate le jeune homme.

Thomas P. prend le soin également de revenir sur sa vie pour expliquer comment il a rejoint les Gilets jaunes «depuis maintenant quatre mois».

«C'est le mouvement le plus beau et le plus fort que j'ai jamais vu. Je m'y suis jeté corps et âme, sans hésitation», note-t-il, rappelant que «plusieurs fois des gens sont venus vers moi pour me saluer, me remercier ou me dire de faire attention à moi».

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«De toute évidence, ni la matraque ni la prison ne semblent arrêter ce mouvement. Je suis de tout cœur avec celles et ceux qui continuent», indique-t-il pour conclure.

Les affrontements lors des manifestations des Gilets jaunes ont été particulièrement violents le 9 février lorsqu'un manifestant a eu une main arrachée. Le nombre de personnes ayant participé à l'acte 13 des Gilets jaunes dans toute la France était estimé entre 51.400, selon le ministère de l'Intérieur, et 240.000, d'après le syndicat France Police-Policiers en colère.

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