Comment l'Iran est devenu une république islamique il y a 40 ans

© AP Photo / Vahid SalemiTeheran, Iran
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Le 1er avril 1979, sur les cendres de la révolution qui venait d'enflammer le pays, l'Iran a été officiellement proclamé république islamique. Ce nouveau modèle étatique, remplaçant le régime monarchique de Reza Chah Pahlavi, a été approuvé par le référendum des 30-31 mars.

Le bulletin de vote au référendum iranien sur le nouveau model d'Etat il y a 40 ans comportait une question: «Êtes-vous d'accord avec l'établissement de la république islamique en Iran?» Les votants pouvaient répondre par oui ou par non, écrit le site d'information Gazeta.ru.

De nombreux opposants à cette formulation, et concrètement au leader de la révolution, l'ayatollah Rouhollah Khomeini, ont boycotté ce référendum. Au final, moins de 20,5 millions d'Iraniens ont décidé d'exprimer leur avis sur cette question étatique cruciale. L'immense majorité, 99,3%, s'est prononcée pour un changement.

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Après l'établissement du régime théocratique du clergé musulman en Iran, le rôle de l'islam a significativement augmenté dans toutes les sphères de la vie.

Trois semaines plus tard, le 22 avril, le Corps des gardiens de la révolution islamique, une unité militaro-politique d'élite composée de gardes du chah loyaux à l'ayatollah et ayant fait leurs preuves lors des affrontements, était créé sur ordre de Khomeini. L'issue du référendum offrait la possibilité de créer en Iran un puissant appareil militaire et d'instaurer des lois islamiques.

L'islamisation de la politique, de l'économie et de la culture a commencé. Les femmes avaient l'interdiction formelle de porter des vêtements occidentaux. Les autorités ont instauré un système judiciaire basé sur le Coran et la charia. Des mesures punitives ont été engagées contre l'opposition de gauche et les minorités ethniques. En parallèle a été lancée la répression des généraux, des officiers et des hauts fonctionnaires de l'époque du chah. Nombre d'entre eux ont été sommairement exécutés, pendus sur des arbres loin des regards indiscrets.

La nouvelle ligne de la politique étrangère iranienne était symbolisée par le slogan «Ni l'Ouest ni l'Est». L'Iran renonçait démonstrativement aussi bien aux valeurs occidentales qu'aux idées marxistes, en optant pour la «troisième voie», la théocratie, qui était révolue depuis longtemps pratiquement dans toute l'Europe.

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Les Américains, qui avaient d'abord salué la révolution islamique, sont devenus les principaux ennemis de l'Iran.

Les changements profonds au sein de la société iranienne ont été évoqués par Evgueni Kalinine, traducteur de l'expédition de recherche soviétique qui a quitté Téhéran le 17 mars 1979 et y est revenu pour travailler 12 ans plus tard, dans son livre Notes d'un témoin. Selon ses souvenirs, pour éviter la pénétration dans le pays d'«éléments indésirables», on comparait le nom de tous les arrivants à ceux figurant sur une liste, ce qui n'était pas le cas auparavant. Les contrôleuses voilées assises derrière des tables dans la zone de contrôle avaient également fait forte impression sur l'auteur.

«A première vue, Téhéran n'a pas changé. Tout semble être à sa place. Mais en regardant de plus près on découvre que de nombreux bâtiments sont délabrés et n'ont pas été réparés depuis longtemps. Il n'y a plus de la propreté et de la brillance d'antan dans les rues centrales. La curiosité principale de la ville: les chevalements des tunnels de métro en construction. Partout sont accrochées des affiches avec des citations de Khomeini. Certaines idées du guide sont présentées sous la forme de poèmes, dont une bonne moitié sont antiaméricains. Ils affirment notamment que tous les malheurs du peuple iranien sont engendrés par les impérialistes américains», écrivait Evgueni Kalinine.

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Et de poursuivre: «J'essaie de trouver quelque chose d'antisoviétique. Mais je n'ai rien vu de tel».

«Ce qui surprend surtout, c'est le grand nombre de changements de noms de rues et de places. Il est difficile d'évaluer le niveau d'islamisation du pays. A en juger par les apparences, ce sont surtout les hommes portant la barbe qui sautent aux yeux. Beaucoup ont une barbichette comme celle des mollahs. A heures fixes, ils font la prière dans des endroits divers et variés, pas du tout adaptés pour cela. Dans les aéroports, dans les gares et dans tous les lieux de grande affluence sont désormais désignées des entrées séparées avec les inscriptions "Pour les frères" et "Pour les sœurs", autrement dit, des entrées séparées pour les hommes et les femmes.»

Actuellement, l'Afghanistan, le Pakistan et la Mauritanie sont également considérés comme des républiques islamiques.

La Constitution de 1906 a été reconnue caduque après le référendum, et la rédaction d'une nouvelle Constitution a commencé. Cette dernière a été adoptée par référendum des 2-3 décembre 1979 à 99,5% des suffrages, malgré l'opposition des nationalistes laïques, des minorités sunnites au Kurdistan et d'autres opposants au régime de l'Ayatollah Khomeini. Selon les différentes estimations, jusqu'à 17% de la population s'opposait à la nouvelle Constitution. C'est ce groupe qui a boycotté le référendum.

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La Constitution instaurait en Iran une république théocratique combinant les éléments du pouvoir religieux et républicain. La Constitution fixait la suprématie non seulement des principes islamiques dans l'organisation des pouvoirs législatif, exécutif et judiciaire, mais également la suprématie du clergé islamique au sein des structures du pouvoir public.

La monopolisation du pouvoir politique par le clergé se traduisait par les pouvoirs attribués au guide de la révolution — ou rahbar —, un faqîh reconnu, juriste musulman qui contrôle l'activité de toutes les branches du pouvoir.

Après la révolution islamique, le poste de rahbar a été attribué à vie à l'ayatollah Khomeini.

Ce dernier a reçu le droit de déterminer les axes principaux de la politique nationale et étrangère, de nommer le chef du pouvoir judiciaire, le chef des armées et des forces intérieures, le chef du Corps des gardiens de la révolution islamique, de signer le décret de nomination du Président élu au suffrage universel direct et secret, et de nommer six faqîhs au Conseil d'administration. Le rahbar se voyait attribuer le droit de déclarer la guerre et de signer la paix, et de lever ou d'atténuer une sentence sur proposition du chef du pouvoir judiciaire.

Les opinions exprimées dans ce contenu n'engagent que la responsabilité de l'auteur de l'article repris d'un média russe et traduit dans son intégralité en français.

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