En Algérie, «l’armée ne destitue Bouteflika que pour remettre le pouvoir au peuple»

© AFP 2023 RYAD KRAMDIManifestation à Alger (archives)
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Pour Akram Kharief, analyste algérien spécialiste des questions de sécurité, l’allusion du chef de l’armée algérienne à la disposition constitutionnelle affirmant que le «peuple est la source de tout pouvoir» est une réponse à ceux qui l’accusaient de vouloir destituer le Président pour prendre le pouvoir.

Le chef d'état-major de l'armée algérienne, Ahmed Gaïd-Salah, a déclaré samedi 30 mars, que la solution à la crise qui secoue l'Algérie ne peut être envisagée en dehors des articles 7 et 8 de la constitution, qui font notamment du «peuple, la source de tout pouvoir».

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Ces dispositions devront être mises en œuvre conjointement avec l'article 102 de la constitution qui permet de déclarer l'état d'empêchement du chef de l'État, notamment «pour cause de maladie grave et durable.»

L'article 7 de la constitution algérienne dispose que «le peuple est la source de tout pouvoir. La souveraineté nationale appartient exclusivement au peuple». L'article 8, de son côté, énonce que le «pouvoir constituant appartient au peuple». Celui-ci pouvant exercer «sa souveraineté par l'intermédiaire des institutions qu'il se donne.»

«C'est une réponse à ceux qui l'accusaient d'avoir utilisé l'article 102 de la constitution pour faire un coup d'État. C'est une façon de dire qu'il ne destitue Abdelaziz Bouteflika que pour remettre le pouvoir au peuple», analyse pour Sputnik Akram Kharief, analyste politique algérien et expert des questions de sécurité.

Le 25 mars, le chef d'état-major de l'armée, qui occupe en même temps le poste de vice-ministre de la Défense, s'était prononcé pour l'application de l'article 102 de la constitution, en déclarant inapte le Président algérien, 82 ans, et gravement diminué depuis le printemps 2013.
Le Président de la République, qui cumule les fonctions de ministre de la Défense, n'a pas réagi, jusqu'à samedi soir, à cet appel lancé par son subordonné hiérarchique.

Par ailleurs, le Conseil constitutionnel n'a pas encore donné suite à l'appel du chef d'état-major, en manquant de se prononcer, sur l'état d'empêchement du Président de la République.

«L'article 7, qui dispose que le peuple est la source de tout pouvoir et que la souveraineté nationale appartient exclusivement au peuple, pourrait ainsi avoir été cité par le chef d'état-major afin d'inciter le Conseil constitutionnel à enclencher la procédure visant à reconnaître l'état d'empêchement du Président», estime, pour sa part, Massensen Cherbi, ATER en droit public à Sciences Po Toulouse.

Les Algériens ont manifesté en grand nombre, vendredi 29 mars, pour la sixième semaine consécutive, pour dire leur refus de la perpétuation du «système» et d'une transition conduite par les figures de l'actuel régime, telle que prévue par la constitution.
Beaucoup ont invoqué l'article 7, pour exprimer leur préférence de la «table rase», en dénonçant des «demi-mesures», voire des «manœuvres» de la part du pouvoir.

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D'autres ont accueilli favorablement l'appel du chef d'état-major de l'armée, à condition qu'elle soit assortie d'un certain nombre de garanties allant dans le sens de leurs revendications de changement.

Le général de corps d'armée Gaïd-Salah a affirmé de son côté, que «la majorité du peuple algérien, à travers les marches pacifiques, a accueilli favorablement la proposition de l'ANP [Armée nationale populaire, ndlr] ».

«Toutefois, certaines parties malintentionnées s'affairent à préparer un plan visant à porter atteinte à la crédibilité de l'ANP et à contourner les revendications légitimes du peuple», a dénoncé le général Gaïd-Salah, sans préciser, s'il s'agissait, ou non, de partisans de l'actuel Président de la République.

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L'Algérie connaît, depuis le 22 février, une vague de contestation inédite, née de l'annonce par M.Abdelaziz Bouteflika, au pouvoir depuis 1999, de sa candidature à un cinquième mandat consécutif.

L'ampleur des manifestations, et le ralliement de larges pans de la société algérienne à la contestation populaire, ont contraint le pouvoir à multiplier les concessions.

Après l'annonce d'un cinquième mandat «écourté» et l'organisation d'une conférence nationale souveraine chargée d'élaborer une nouvelle constitution, la présidence a proposé un report de la présidentielle, jusqu'à l'adoption d'une nouvelle loi fondamentale.
Ces différentes propositions, annoncées par des lettres présidentielles, n'ont pas convaincu un grand nombre d'Algériens qui ont continué à manifester massivement pour exiger le départ inconditionnel du «régime».

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