Comment la tribune d'Emmanuel Macron «Pour un renouveau européen», publiée le 4 mars dernier dans les 28 pays membres de l'UE, a-t-elle été reçue par les responsables des partis «européistes»? Les «progressistes sont-ils derrière le Président de la République ou sont-ils divisés?
Alors que la Bulgarie assure la présidence tournante de l'Union depuis le 1er janvier, Sputnik a posé ces questions à Georgi Pirinski, député européen bulgare et membre du groupe Socialistes et Démocrates à Strasbourg.
«Je pense que, bien sûr, il y a une envie de mettre en valeur le projet européen en opposition au populisme et aux nationalistes, mais que la substance du message n'apporte pas de réponse aux véritables défis de l'Union européenne.»
«Ce que le Président Macron propose, ce sont trois points: liberté, protection et progrès. Ça peut paraître séduisant, mais ça s'inscrit dans un ordre libéral; et je ne pense pas que cet ordre libéral puisse répondre aux défis de l'Europe, mais que les trois piliers dont on a besoin sont: solidarité, cohésion, convergence.»
Georgi Pirinski laisse en outre entendre qu'Emmanuel Macron n'a pas mesuré l'importance des clivages apparus non seulement entre partenaires européens, mais aussi au sein de chaque société.
Selon lui, ce sont des équilibres précaires que l'intervention du chef de l'État français participe à miner, sans pour autant avoir de garantie de l'emporter face aux eurosceptiques:
«Je ne pense vraiment pas que cette direction, ce que contient le message [d'Emmanuel Macron] ne réponde aux défis de l'Europe, dont précisément le clivage qui se creuse entre États membres et sociétés.»
Prenant comme exemple la proposition de créer un salaire minimum européen, modulé ensuite en fonction des caractéristiques de chaque pays, Georgi Pirinski estime que cela «amènerait, de manière silencieuse, à une Europe à différentes vitesses» et ajoute:
«Il y a des disparités [entre les pays membres], c'est évident; mais il est également évident que notre objectif devrait être de converger, d'atteindre un stade où il y aurait un marché du travail unique partout en Europe, au lieu d'une fragmentation de ce dernier.»
Lorsqu'on lui demande si Emmanuel Macron est légitime pour lancer un appel politiquement très marqué à l'ensemble des citoyens européens, Georgi Pirinski botte en touche tout en prenant ses distances.
«C'est une question de confiance en soi, de savoir comment le Président Macron se voit. […] Il estime probablement que le fait d'être à la tête d'un des membres fondateurs comme la France lui donne la légitimité d'adresser un message aux Européens. Mais, dans le contexte actuel, avec les différentes sensibilités et la direction que prend l'Europe, peut-être devrait-il être plus délicat.»
«Pedro Sanchez et d'autres leaders aussi pro-Europe que lui ont une vision très différente de l'Europe de demain. Je ne pense pas que la question soit de s'allier à Macron ou non. Les 22 et 23 février, un congrès des partis socialistes a eu lieu à Madrid et un manifeste très différent a été adopté. Je ne pense pas que ce que dit Emmanuel Macron puisse le rapprocher ou l'éloigner de personnes comme Pedro Sanchez, qui proposent simplement une autre alternative.»