On dira que l'on pouvait s'en douter. Mais, la tentative de chiffrage de ces gains et de ces pertes a provoqué un beau débat, que ce soit à Bruxelles, ou la Commission européenne s'en est ému, ou que ce soit en France.
L'étude du CEP
Cette étude, co-signée par Alessandro Gasparotti et Matthias Kullas prétend montrer en effet que l'introduction de l'Euro aurait coûté depuis 1999 et jusqu'en 2017, en sommes cumulées, 3591 milliards d'Euros à la France, 4325 milliards pour l'Italie et 424 milliards à l'Espagne, alors que l'Allemagne aurait gagnée 1893 milliards d'euros et les Pays-Bas 346 milliards. Divers journaux ont cité cette étude comme le Figaro ou Sud-Ouest (2) ou encore Les Echos (3).
Cette méthode dite de contrôle synthétique est considérée par les auteurs comme étant de loin supérieure aux autres méthodes qui utilisent uniquement un seul pays de la zone euro à des fins de comparaison. En effet, ils mettent en avant la probabilité d'obtenir une tendance similaire pour la période précédant l'introduction de l'euro et donc d'un scénario contrefactuel qui serait réaliste pour la période envisagée.
Des résultats confirmés par les travaux du FMI
De fait, d'autres études avaient montré que l'euro favorisait l'Allemagne, car il aboutissait à déprécier la monnaie de ce pays, et défavorisait des pays comme la France, l'Italie ou la Belgique. Il convient ici de citer les travaux publiés par le Fond Monétaire International. La publication de l'édition 2017 du External Sector Report du FMI soulignait le problème posé par l'Euro pour des pays comme la France, l'Italie et l'Espagne. On pouvait voir que le problème s'était même aggravé par rapport à l'édition 2016 (5).
L'ampleur des écarts entre la France et l'Allemagne, soit une surévaluation du Franc de 26% à 43%; rend très probables des résultats de l'ordre de ceux obtenus par le CEP.
Une petite comparaison
De fait, ce qui a été réalisé par le CEP l'a aussi été dans d'autres centres de recherches. Signalons ainsi les résultats d'un travail qui fut réalisé en novembre 2018 au CEMI. On peut d'ailleurs comparer la différence des taux de croissance de la France avec trois pays, le Canada, la Suède et le Royaume-Uni. On constate que, par rapport aux dix années qui ont précédé l'introduction de l'Euro, la France à subi une perte de croissance par comparaison à ces trois pays d'environ 0,9% du PIB.
Si l'on transpose cet écart à partir de 1999, en supposant que cet écart s'est progressivement ouvert, on obtient alors le graphique suivant:
En total cumulé, aux prix de 2018, l'écart de croissance, autrement dit ce que l'euro a coûté à la France, s'élève à 3347,2 milliards d'euros, soit, par personne, un somme de plus de 50 000 euros. On le voit, les 3347 milliards obtenus par cette méthode de calcul ne sont pas loin des 3591 milliards obtenus par l'étude du CEP. Cela confirme que l'ordre de grandeur, plus de 3000 milliards en 20 ans, est bien robuste.
Un étude significative?
(1) https://www.cep.eu/fileadmin/user_upload/cep.eu/Studien/20_Jahre_Euro_-_Gewinner_und_Verlierer/cepStudy_20_years_Euro_-_Winners_and_Losers.pdf
(2) http://www.lefigaro.fr/conjoncture/2019/02/27/20002-20190227ARTFIG00101-selon-une-etude-allemande-l-euro-aurait-particulierement-nui-aux-francais.php et https://www.sudouest.fr/2019/02/28/le-passage-a-l-euro-aurait-fait-perdre-beaucoup-d-argent-a-chaque-francais-5859011-705.php
(3) https://www.lesechos.fr/monde/europe/0600788581391-dans-la-zone-euro-labsence-de-reformes-coute-cher-2247912.php
(4) https://www.liberation.fr/checknews/2019/03/01/l-euro-a-t-il-vraiment-fait-perdre-56-000-euros-a-chaque-francais_1712170
(5) Voir http://www.imf.org/en/Publications/Policy-Papers/Issues/2017/07/27/2017-external-sector-report et http://www.imf.org/en/Publications/Policy-Papers/Issues/2016/12/31/2016-External-Sector-Report-PP5057
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