Trump a dressé aux Américains le portrait d'une Russie «impuissante» qui «souhaitait recevoir une aide économique des États-Unis». Ce n'est pas d'ailleurs la première fois — ni la dernière — que Donald Trump fait des déclarations qui contribuent à entretenir une perception positive du dirigeant par son noyau électoral mais qui n'auraient rien à voir avec la réalité. D'autant que les élections de mi-mandat l'attendent à la Chambre des représentants et au Sénat, et que les Républicains doivent à tout prix les remporter. Cela engendre les discours sur les prétendues demandes russes d'aide économique, mais également sur une victoire proche sur la Chine dans la guerre commerciale, la conquête de Mars et la production de gaz sur Jupiter.
Pendant un rassemblement de campagne dans l'Illinois, Donald Trump a déclaré: «Et n'oubliez pas que la Russie souhaite notre aide sur le plan économique. Nous avons atteint une telle richesse, et j'ai effectivement fait du bon travail: 11.700 milliards de dollars. La Russie souhaite notre aide, tout le monde souhaite notre aide.»
Quelques précisions. La Russie (contrairement à de nombreux pays et aux USA) n'a pas accumulé une forte dette extérieure, et n'a donc pas besoin d'un refinancement de prêts du FMI, c'est-à-dire d'un outil par lequel Washington pourrait effectivement l'aider. Les échanges entre la Russie et les USA ne sont pas si élevés pour que l'on puisse supposer que Moscou veuille faire lever les taxes américaines. Enfin, il ne peut être question d'une aide alimentaire car, comme le reconnaissent les médias américains, les exportations de blé russe évincent actuellement les fournisseurs américains de leurs marchés traditionnels.
Il est possible d'essayer de trouver dans cette phrase de Donald Trump une insinuation que le gouvernement russe voudrait faire lever les sanctions. Ce qui contredit la position russe qui a été exprimée à de nombreuses reprises et se résume à: «Vous les avez décrétées, c'est à vous de les annuler, nous ne négocions pas à ce sujet.»
Premièrement: Donald Trump cherche à persuader le public que tout va si bien avec l'économie américaine et qu'elle croît si vite que tout le monde, Vladimir Poutine y compris (avec qui il a dit avoir eu une «merveilleuse rencontre»), veut obtenir une aide économique des États-Unis.
Deuxièmement: Donald Trump ment sur ses succès économiques. Les médias américains l'ont d'ailleurs déjà pris plusieurs fois en flagrant délit de mensonge sur l'incroyable croissance économique et l'augmentation fulgurante de la richesse des USA.
Le Président lui-même (avant son élection) disait que l'économie américaine était «fausse» — or rien n'a vraiment changé depuis.
Le PIB est reconnu comme un moyen universel permettant de mesurer la croissance économique. Mais ce n'est certainement pas ce dont parle Donald Trump, parce qu'en 2017 le PIB américain était de 19.390 milliards de dollars. Il était physiquement incapable de l'accroître de 50%, et cela est évident à partir de toutes les statistiques disponibles.
De plus, en dépit de la réforme fiscale et de la création de barrières douanières pour les importateurs, les investissements étrangers directs aux USA sont devenus négatifs au deuxième trimestre 2018. Autrement dit, les investisseurs retirent leur argent de l'économie américaine.
Surtout, les déclarations du locataire de la Maison-Blanche selon lesquelles la croissance du marché boursier national «efface en quelque sorte» la dette publique sont une aberration, et les médias et les experts économiques américains en ont déjà beaucoup parlé.
Ce n'est pas en Russie, mais aux USA que les experts financiers et les journalistes du Wall Street Journal paniquent quand il s'avère que les investisseurs étrangers ne veulent pas acheter autant d'obligations américaines qu'avant.
Il suffit aussi de voir les avis des responsables américains concernant la situation de la dette. Par exemple, Dan Coats, directeur du renseignement national américain, a déclaré: «La dette publique représente une grave menace pour notre sécurité économique et nationale.» Ce dernier estime que la situation actuelle de la dette «ne peut plus durer».
Mais le Président US n'a pas le droit de dire tout cela en pleine campagne électorale. Il ne lui reste plus qu'à se vanter de succès inexistants et de dire que le monde entier rêve de recevoir une aide de Washington et de toucher la nouvelle grandeur américaine. Si Washington n'est pas prêt à reconnaître la présence de problèmes, il ne sera certainement pas à même de les régler. Le reste du monde n'en serait que gagnant.
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