«Justice pour Vanesa», c'est un des slogans que l'on entendait retentir ce samedi 22 septembre, sur la place de la République, à Paris. Cette marche organisée en hommage à Vanesa Campos, prostituée transsexuelle tuée le 16 août 2018 au bois de Boulogne, était également l'occasion de dénoncer la loi du 13 avril 2016 qui vise à «renforcer la lutte contre le système prostitutionnel et à accompagner les personnes prostituées». Un texte de loi qui change la philosophie de la prostitution. Exit le délit de racolage, la loi responsabilise désormais «les clients qui par leur action permettent la pérennité du système prostitutionnel». En clair, les prostituées ont le droit de proposer leurs services mais si le client accepte, il est susceptible de se voir infliger une amende (1.500 euros, jusqu'à 3.750 euros en cas de récidive).
Un peu plus de deux ans après la promulgation du texte, de nombreux témoignages se font l'écho d'une dégradation des conditions des travailleurs du sexe. Pour Samanta, prostituée, la mort de Vanesa Campos résulte de la mise en place de cette loi.
«Par cette loi injuste et totalement intolérable, nous avons été obligés de nous écarter des endroits éclairés pour pouvoir pratiquer notre profession […]. Avant celle-ci, on travaillait le cœur relax (sic) maintenant on y va la peur au ventre, on ne sait pas si on va rentrer vivant le lendemain matin.»
«Il n'y a que les mauvais clients, il n'y a pas le temps de négocier avec le client, il faut vite se sauver parce qu'il y a la police. Donc négocier c'est savoir clairement ce que l'on fait: les pratiques, les tarifs et le port du préservatif. Et tout cela est mis à mal par la répression des clients.»
La présidente du Bus des femmes regrette également que «cette loi a été pensée, votée par des abolitionnistes totalement dogmatiques qui estiment que la prostituée est une victime, ce qui n'est pas vrai. Il y a des victimes mais elles ne le sont pas toutes».
«Des gens qui ne comprennent rien à la population s'appuient sur le Mouvement du nid, pour le nommer, qui a fait une campagne anti-prostitution […] et que cette loi soit votée à partir de ce groupe de féministes radicales, abolitionnistes, c'est insupportable», Nathalie, présidente du Bus des femmes.
Néanmoins, si les clients se font plus rares n'est-ce pas là un signe que la loi a réussi un de ses objectifs? À savoir, essayer de mettre un coup aux portefeuilles des réseaux de prostitution?
En outre, si le volet répressif de la loi a bien été appliqué. Entre avril 2016 et mars 2018, 2.354 clients ont été verbalisés, selon des chiffres transmis à l'AFP, le volet social semble, quant à lui, loin d'avoir démontré toute son efficacité. Et pour cause, à ce jour, malgré la mise en place de «parcours de sortie de la prostitution» par l'État (qui prévoit notamment une aide à l'insertion professionnelle, une aide financière de 330 euros mensuels, et une autorisation provisoire de séjour minimal de six mois), seules 40 personnes ont arrêté la prostitution comme l'indique l'enquête réalisée auprès de plus 600 prostituées par des associations et des ONG dont Médecins du monde en avril dernier.