«Je pense qu'à court terme, d'ici un an ou deux, le monde entier sera plongé dans ces annonces réciproques d'augmentation de taxes douanières et de durcissement des politiques commerciales», estime Galina Kouznetsova, enseignante à l'Institut d'affaires et d'administration d'affaires de l'Académie russe de l'économie nationale et du service public auprès du Président russe.
Les nouvelles réalités
Progressivement les économies nationales s'adapteront aux nouvelles conditions, est convaincue Galina Kouznetsova. «Les USA engloutiront les marchandises qu'ils achèteront en Chine plus cher, et la Chine de son côté — les marchandises américaines. Simplement les prix augmenteront, les indices macroéconomiques augmenteront», a-t-elle expliqué.
Mais ensuite la libéralisation du commerce se poursuivra. «C'est une tendance mondiale, parce que c'est impossible autrement dans le monde contemporain, notamment dans les conditions où le libre commerce domine dans les intérêts des multinationales. Elles veilleront à libéraliser l'économie», a précisé Galina Kouznetsova.
«Il est impossible de revenir en arrière. Les actions entreprises aujourd'hui par les USA sont une tentative de recréer la classe moyenne, la politique économique du Président Trump est soutenue par plus de la moitié de la population américaine. C'est pourquoi le prochain Président américain sera contraint de suivre la même ligne — protéger les marchés américains contre les importations bon marché, recréer l'industrie», a-t-il souligné.
Les éclats de la mondialisation
A présent la démondialisation a commencé et des «clubs commerciaux» fermés aux étrangers se formeront sur le marché commun, estime Alexeï Zoubets.
«Il n'y aura pas d'espace commercial commun dans le monde. Le triangle Russie-UE-Chine pourrait devenir l'une des configurations de l'économie mondiale, c'est-à-dire la création d'un espace eurasiatique commun de Lisbonne à Shanghai. Il pourrait être l'un des éclats de l'espace commercial global qui s'effondre. Et nous ferons partie des acteurs qui déterminent la politique sur ce marché et un fournisseur des hydrocarbures pour la Chine, l'Europe et d'autres pays. Pourquoi pas?», déclare l'expert.
D'après Tatiana Flegontova, directrice du Centre russe d'études de l'APEC (Coopération économique pour l'Asie-Pacifique) à l'Académie russe de l'économie nationale et du service public, on assiste au retour de la tendance de formation de blocs économiques commerciaux bilatéraux au lieu de grands projets mégarégionaux. «Mais il est à noter que ce sont précisément des grands blocs entre les grandes puissances», note-t-elle.
Tatiana Flegontova a également supposé que le projet national d'exportation qui se forme actuellement en Russie serait dépourvu d'un accent sur un bloc d'intégration et sur la libéralisation du commerce. «Et les principaux outils doivent viser avant tout le soutien de nos producteurs, le développement de notre propre compétitivité», ajoute-t-elle.
Le début des guerres commerciales
En mars, les USA ont décrété des taxes de 25% sur les importations d'acier et de 10% sur les importations d'aluminium. Ils l'ont expliqué par la sécurité nationale. Ces mesures sont entrées en vigueur contre l'UE et certains autres pays à partir de juin. Pratiquement tous les pays dont les producteurs ont été confrontés aux nouvelles taxes ont annoncé la préparation de contremesures symétriques.
Moscou a décrété également des taxes supplémentaires sur plusieurs produits américains dont des analogues sont fabriqués en Russie.
En juillet sont entrées en vigueurs les taxes supplémentaires réciproques entre les USA et la Chine: Washington a instauré des taxes de 25% sur les importations de 818 produits chinois pour 34 milliards de dollars par an. A titre de contremesures, le jour même la Chine a décrété une taxe de 25% sur le même montant d'importations de marchandises américaines.
Ce 20 juillet, Donald Trump s'est dit prêt, si besoin, à adopter des taxes sur toutes les importations chinoises. Selon le Bureau de recensement des USA, en 2017, le montant des importations de produits chinois aux Etats-Unis s'élevait à 505,5 milliards de dollars.