«Une accélération de dragster!»: si l'expression est utilisée par les passionnés d'automobile pour décrire les performances d'une voiture, la réalité qui se cache derrière l'est beaucoup moins.
En effet, à l'inverse de sports mécaniques qui bénéficient d'une couverture médiatique très importante, comme la Formule 1, la WRC (rallye) ou encore la WEC (course d'endurance), le dragster reste méconnu en France. Discipline atypique, ce sport mécanique d'accélération réunit plusieurs centaines de pilotes autour d'une passion… Le 400 mètres ou ¼ de mile (402,33 mètres), départ arrêté.
Si la vitesse est omniprésente, le pilote peut prendre d'ailleurs jusqu'à 3 g au démarrage [plus de 4 g pour la catégorie ultime «Top Fuel», ndlr], le dragster se révèle être beaucoup plus technique que le simple fait de rouler le plus vite possible sur une distance donnée, comme nous l'explique Eric Angeloni, président de l'Association Trophée Dragster (ATD).
«On roule au "bracket", c'est-à-dire que vous donnez un temps de référence sur 400 m, vous devez vous en rapprocher sans passer en dessous. Cela permet d'éliminer tous les écarts de puissance mécanique qui peuvent exister entre plusieurs véhicules. Ce n'est pas le plus rapide, le plus puissant, le plus cher qui gagne. C'est la personne qui sera le plus près de son index, le plus régulier en somme.»
En France, il existe quatre catégories phares: le Junior Dragster qui permet à des enfants âgés de 8 ans jusqu'à 18 ans de rouler sur une distance de 200 m. Les temps de référence (index), fixés par âge, vont de 12,90 secondes à 7,90 secondes pour les plus âgés. Il y a également les Street Run où s'affrontent des voitures de série (sans préparation moteur) et sans arceau de sécurité sur une distance de 400 m. Enfin, les catégories professionnelles avec la PRO ET avec des index de 11,99 secondes à 9 secondes et la Super Pro ET (8,99 secondes à 6 secondes), toujours sur 400 m. Avec des temps de références si rapides, faut-il être une tête brûlée pour se lancer dans le dragster? Eric Angeloni décrit exactement l'inverse:
«Il y a un effet de vitesse, ça, c'est sûr, mais il faut rester très calme, très humble et vraiment connaître sa machine sur le bout des doigts pour être régulier dans ses temps. […] Il faut beaucoup de concentration à l'arbre de Noël [panneau d'affichage composé de feux qui donne le départ, ndlr], car c'est là où va se jouer la course. Si vous mettez trop de temps à démarrer, vous ratez la course. Si vous allez trop vite, vous perdez aussi la course.»
D'ordinaire, se lancer dans la compétition automobile est très onéreux, mais le dragster semble déroger à la règle. En effet, les prix des inscriptions pour les courses oscillent entre 180 et 250 euros et les participants peuvent utiliser la voiture de «monsieur tout le monde.»
«Dans le dragster, on peut avoir un budget minime. On a des pilotes qui viennent avec des voitures de série, des sportives types BMW 5.30 ou 5.25 i qu'ils n'achètent vraiment pas cher. Rien qu'avec ces modèles, ils peuvent déjà faire des courses et s'amuser. Pour les catégories Super Pro ET, il faut compter entre 20.000 euros et 50 à 60.000 euros pour les véhicules les plus chers.»
Des sensations fortes, une discipline relativement peu onéreuse, comment expliquer le manque de notoriété du dragster en France? Eric Angeloni nous donne les raisons de ce déficit de popularité.
«C'est un milieu assez restreint, au niveau des pilotes entre motos et voitures, on roule souvent avec le Championnat de France moto, on a entre 200 et 250 pilotes au total. Il y a très peu de financements, il n'y a pas de partenaires donc c'est pour cela aussi que cela n'attire pas beaucoup les médias.»
Et d'ajouter,
«On n'a pas beaucoup d'organisateurs, car il y a un risque financier énorme: s'il pleut, la course est annulée, des organisations professionnelles ne veulent pas prendre un risque aussi important. C'est pourquoi, il n'y a que des associations qui organisent, des passionnés, en définitive.»
C'est dans ce contexte qu'a été créée l'ATD en 2003. «On a créé cette association à la base pour mettre en relation la fédération, les organisateurs et les pilotes. Il s'est avéré que les organisateurs, il n'y en avait pas, donc l'ATD a commencé à organiser des courses à partir de 2004.»
«Pour pouvoir faire notre sport, on était obligés d'aller s'expatrier à l'étranger, en Italie, en Allemagne ou en Angleterre, parce qu'en France il n'y avait pas de compétitions, si ce n'est un ou deux shows de temps en temps», détaille Eric Angeloni.
Une anomalie en partie résolue. En effet, les 28 et 29 juillet se tiendra l'avant-dernière épreuve du Trophée Dragster 2018 sur le dragway de Clastres, dans l'Aisne, à 1 h 30 de Paris, 1 h 00 de Lille, de Reims ou d'Amiens. Rendez-vous sur la ligne de départ!