La Crimée est russe, les propos attribués à Trump ont provoqué, sans surprise, une hystérie dans l'espace médiatique américain et sur les réseaux sociaux. Cette dernière a redoublé d'intensité quand la porte-parole de la Maison blanche Sarah Huckabee Sanders a refusé de commenter ces communiqués en disant qu'elle ne pouvait pas donner un avis sur des «pourparlers privés» auxquels elle n'avait pas participé.
Évidemment, ceux parmi les experts et les journalistes qui voyaient depuis le départ Donald Trump comme une sorte d'«agent de Poutine» sont encore plus convaincus d'avoir raison, mais les fuites dans la presse ne peuvent pas être «jointes au dossier».
Indépendamment de savoir si la déclaration du Président américain était le reflet de sa position sincère ou simplement une nouvelle pique, en soi une telle fuite devrait être considérée comme très positive. La raison est simple: Trump, même sans le vouloir, a constaté un fait incontestable solidairement tu par les médias et les politiciens occidentaux.
En regardant la Crimée à travers la CNN et Fox News, un Américain moyen pourrait penser que la péninsule est peuplée de «vrais Ukrainiens» annexés par la force militaire et qui subissent actuellement des souffrances insupportables sous le talon du «régime poutinien». Après la «fuite scandaleuse de Trump», une grande partie du public américain a appris avec stupéfaction que des russophones vivaient en Crimée, ce qui plonge les Occidentaux dans un choc mental. Quelle que soit l'issue de cette histoire, elle laissera un «arrière-goût amer».
Il ne faut pas oublier qu'un véritable fossé idéologique sépare Donald Trump et les administrations américaines précédentes. Ces dernières étaient remplies d'idéalistes amoraux (et même antimoraux) qui prenaient le monde pour une arène de lutte idéologique, et il était important pour eux d'anéantir l'idée même selon laquelle l'histoire ne s'était pas terminée selon le scénario de Fukuyama.
Ils trouvaient inadmissible l'existence d'autres systèmes de valeurs et idéologiques, différents de la «démocratie libérale approuvée par le département d'État et Soros». C'est pourquoi l'establishment américain était si allergique à tout opposant et concurrent géopolitique préconisant d'autres systèmes de valeurs: du socialiste Hugo Chavez au conservateur de droite Viktor Orban. Du point de vue des prédécesseurs de Trump, la Russie et la Chine étaient dangereuses parce qu'elles proposaient un regard alternatif sur le monde, la société, l'homme et même à la famille traditionnelle. C'est pourquoi, aux yeux de l'administration de Barack Obama, la Russie «lançait un défi à fondements de l'ordre mondial occidental» et était dans le top des ennemis — quelque part entre le terrorisme et l'épidémie du virus Ebola.
D'ailleurs, c'est contre Pékin que l'administration Trump a décrété des taxes rédhibitoires. En deuxième place: l'UE avec 146 milliards de dollars de balance positive, dont 64 milliards rien que pour l'Allemagne. Dans cette «liste des ennemis de Trump» la Russie se trouve seulement à la 18e place avec seulement 8,7 milliards de balance commerciale négative pour les USA. Même la politique de sanctions de Washington est purement économique: les sanctions contre la compagnie russe Rusal étaient nécessaires pour l'évincer du marché américain, et les éventuelles sanctions contre le gazoduc Nord Stream 2 le seraient pour libérer la voie au gaz naturel liquéfié (GNL) américain sur le marché européen. Aucune idéologie — seulement du business. Il ne faut pas exclure dans ce paradigme qu'il est difficile, pour le Président américain habitué à traiter avec un certain mépris toutes les «normes tacites» et à respecter seulement la force brutale et la dure réalité, de comprendre pourquoi la Crimée ne peut pas être considérée comme un territoire russe et pourquoi l'Occident collectif a eu besoin de pousser Moscou dans les bras de Pékin à cause d'un litige concernant un territoire où vivent des russophones.
Très certainement, il lui est encore plus difficile de comprendre pourquoi l'Occident collectif soutient l'Ukraine qui n'apporte aucun bénéfice économique tout en étant un investissement sans perspective à cause de sa corruption totale — qui a été également mentionnée par le dirigeant américain pendant le G7.
Pour résumer tout cela, on pourrait supposer que quand (et si) des conditions politiques favorables étaient réunies aux USA, Trump essaierait de «vendre» la reconnaissance de la Crimée tout en chargeant la Russie d'entretenir l'Ukraine. Il s'agirait d'une proposition à rejeter poliment. La Crimée est déjà russe et aucune reconnaissance américaine ne vaut les concessions du côté russe. Et que Washington et Bruxelles s'occupent eux-mêmes de la corruption ukrainienne.
Les opinions exprimées dans ce contenu n'engagent que la responsabilité de l'auteur.