L'auteur de cet article est le principal "expert en affaires européennes" de la rédaction du Wall Street Journal, l'historien et ex-banquier britannique Simon Nixon. Ce dernier voit dans le proche avenir européen la répétition du scénario de 1989 mais cette fois, c'est les Etats-Unis et non pas l'URSS qui joueront le rôle de l'"empire en déclin" ayant perdu en une nuit toute son influence en Europe. Si l'on mène ces réflexions jusqu'à leur conclusion logique, l'expert britannique prédit aux politiciens pro-américains de l'UE le sort des derniers dirigeants socialistes de l'Europe de l'Est dont certains ont été fusillés avec leur famille, de nombreux autres ont été placés en détention et pratiquement tous ont été, dans telle ou telle mesure, interdits de droits pendant la lustration des "éléments pro-soviétiques". Simon Nixon considère aussi que l'on peut remédier à cette situation, mais reconnaît que les diplomates et politiciens européens ne partagent plus un avis tout aussi optimiste sur l'avenir de l'UE et des Etats-Unis.
Il faut prendre en compte que dans sa situation actuelle, Donald Trump est tout simplement obligé de mentir et de faire semblant que l'économie américaine va bien et qu'elle ira encore mieux à l'avenir. Toutefois, pendant la campagne présidentielle, il était beaucoup plus sincère et disait ouvertement que l'économie américaine n'était qu'"une grosse bulle". C'est justement l'état de l'économie américaine qui constitue le problème et le mal de tête majeur pour le président des Etats-Unis, et c'est justement les tentatives de remédier à cette situation critique au détriment d'autrui (ce qui correspond entièrement à l'esprit et aux traditions de la politique américaine) qui déterminent toute la stratégie diplomatique de Washington. Il suffit de se rappeler ce que Donald Trump lui-même disait sur les perspectives de l'économie américaine en 2015 dans une interview au magazine The Hill: "De toute façon, nous sommes dans une bulle. […] La raison pour laquelle elle (l'administration Obama — ndlr) maintient les taux à un bas niveau est qu'Obama ne veut pas connaître de récession ou de dépression tant qu'il exerce ses fonctions […] Savez-vous qui sera le plus touché? Ce seront les gens qui agissent en conformité avec le rêve américain et qui font ce qui doit être bon. Ces gens ont vécu une quarantaine d'années en mettant de côté deux cent dollars par semaine sur leurs comptes bancaires. Ils ont travaillé toute leur vie pour épargner et maintenant on les pousse vers un marché boursier surestimé, si bien que leurs économies seront complètement détruites à un certain moment".
On peut facilement tirer plusieurs parallèles historiques avec cette situation. Comme le disent les Américains, "l'histoire ne se répète jamais mais elle rime souvent", et on peut se rappeler les problèmes analogues en matière de redistribution du "gâteau" du commerce international et les crises de protectionnisme qui ont précédé les deux guerres mondiales. On peut aussi se rappeler avec quel plaisir et avec quelle efficacité les Américains ont recouru au mécanisme d' "ouverture" des marchés étrangers pour assurer leur propre développement économique au XIXe siècle. Si Donald Trump le pouvait, il n'hésiterait pas à envoyer vers les côtes chinoises un nouveau commodore Perry mais aujourd'hui, les Etats-Unis ne jouissent plus de la suprématie militaire et technologique qui avait permis à l'époque à Perry d'enrichir tellement l'économie américaine.
Les leaders européens peuvent difficilement être soupçonnés de naïveté. Il ne faut pas non plus les soupçonner d'incapacité à compter l'argent et à évaluer d'une manière raisonnée les perspectives de l'Union européenne dans une situation où les Etats-Unis considèrent l'UE non pas comme un moyen de promouvoir les intérêts diplomatiques américains mais comme une tirelire à casser. Sur cette toile de fond, on peut parler tant qu'on veut des valeurs démocratiques communes et de la fidélité aux idéaux suprêmes du monde occidental, mais en tout état de cause un conflit insoluble d'intérêts réduira en cendres le "cadre idéologique" transatlantique dont la disparition est pleurée par le premier analyste européen du Wall Street Journal.
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