Le Festival du livre de la Place rouge, qui se tient annuellement au cœur de la capitale russe, rassemble chaque année plusieurs milliers de personnes. On y trouve aussi des stars de la littérature et de l'édition. Cette année, Moscou a accueilli, entre autres, l'écrivain française, Anna Gavalda, qui, ayant des racines saint-pétersbourgeoises, entretient un lien particulier avec son public russe.
Dans une interview accordée à Sputnik, l'écrivain a commenté l'actualité franco-russe, a confié ce qui la fascinait en Russie et chez ses habitants. Elle a d'ailleurs expliqué vers quel «contre-pouvoir important» devrait s'orienter aujourd'hui les dirigeants du monde.
Paris et Moscou, quid de l'amélioration des relations?
«Macron et Poutine n'ont pas le choix [que d'améliorer les relations franco-russes, ndlr]. Si on leur accorde la confiance, tout sera plus facile pour eux», estime Anna Gavalda commentant les accords conclus entre la Russie et la France lors la récente visite du Président français au Forum économique international de Saint-Pétersbourg.
«Ce qui est dommage, c'est ce qu'il faudrait que toutes ces forces se mettent ensemble plus pour des choses écologiques que politiques. Aujourd'hui, les guerres, c'est "old fashion".»
Le boycott de Macron du stand russe au Salon du livre à Paris: «il fallait y aller»
Malgré le respect qu'elle a pour Emmanuel Macron, Anna Gavalda n'a pas apprécié son geste au Salon du livre à Paris, quand le Président français a décidé d'ignorer le stand russe, en soutien avec ses «amis britanniques». L'événement se tenait au moment où l'Affaire Skripal a éclaté.
«Je pense qu'il fallait aller sur ce stand. Justement, c'était le moment ou jamais d'aller dire: la culture, c'est important.»
«Il est difficile de juger, mais si j'avais été Emmanuel Macron, j'aurais trouvé une solution pour dire quelque chose, pour dire: "Bon, la politique, c'est une chose, mais le Salon du Livre, c'est quelque chose d'encore plus grand que la politique".»
Anna Gavalda estime que ceux qui s'occupent de la littérature, à savoir les écrivains, les éditeurs, mais aussi les lecteurs, «subissent la politique, mais aimeraient tellement représenter autre chose»:
«Les gens qui font la culture, c'est quand-même un contre-pouvoir très important. Aujourd'hui, la culture, c'est révolutionnaire. On est si peu nombreux, les gens de la culture. C'est un pouvoir magnifique.»
Sur la Russie: «Vous êtes une planète!»
L'histoire «incroyable» de la Russie et sa grandeur à plusieurs titres, voici les piliers de l'amour d'Anna Gavalda envers ce pays:
«Ce qui est beau ici, c'est qu'il y a une civilisation partout où tu marches. Tu vois toute cette civilisation, toute cette période des tsars, toute cette période soviétique. Ce pays a traversé des choses tellement incroyables. Quand tu parles de la Russie, ça ne veut rien dire, c'est tellement grand, la Russie. C'est un monde, c'est une planète, vous êtes une planète», résume-t-elle.
Et de conclure:
«C'est pour ça qu'il est difficile pour les autres gens de vous circonscrire, vous êtes trop grands. Une grande histoire et une grande géographie. Si j'étais Russe, je serais fascinée par la grandeur de mon pays.»
«J'ai une forme d'âme slave»
«Je crois beaucoup que j'ai une forme d'âme slave avec ses hauts et ses bas et cette espèce d'immense amour pour l'humanité et en même temps immense lucidité et [aussi amour pour les écrivains russes et] la littérature», estime l'écrivain qui a des racines russes, son arrière-grand-mère étant de Saint-Pétersbourg.
Elle regrette de ne pas pouvoir lire les œuvres de Marina Tsvetaeva en langue russe, poète qui fait partie de la pléiade de ses auteurs russes préférés, au même titre que Tchékhov ou encore Dostoïevski.
«J'aime beaucoup les Russes parce qu'il y a toujours un moment où ils récitent de la poésie et que je connais aucun autre peuple au monde qui fait ça», souligne l'écrivain. «Je trouve que c'est tellement merveilleux quand il reste en nous, êtres humains de 2018, des résidus d'une civilisation passée. Parce que la culture c'est la seule chose qui fait de nous des êtres un peu immortels.»
Anna Gavalda est d'avis que «les arts en général» constituent «la langue la plus universelle et la plus intéressante des peuples» et que la chance de pouvoir participer à des événements tels que le Festival du livre de la Place Rouge, qui contribuent aux échanges interculturels, la place dans une «situation privilégiée».