Depuis des siècles, le son des cloches captive les hommes qui leur attribuent parfois des pouvoirs magiques et ont tendance à les personnaliser, en leur donnant des noms, en les punissant ou en les décorant comme ils le font avec leurs congénères. Découvrez ou redécouvrez plusieurs cloches qui ont laissé une trace dans l’histoire.
Cloches-martyrs
Les cloches ont parfois été exilées et même torturées ce qui montre l’importance qu’elles avaient aux yeux des hommes.
Le 15 mai 1591, un tocsin de l’église de la Transfiguration-du-Seigneur d’Ouglitch vieux de 300 ans a donné l’alarme après l’assassinat du prince Dmitri, le plus jeune fils d'Ivan le Terrible.
Selon la légende, cette cloche s’est mise à sonner toute seule. Les historiens estiment que l’ordre de sonner la cloche a été donné par la mère du prince, Maria Nagaïa. La cloche a été punie pour avoir suscité l’agitation du peuple. On lui a ôté son battant et donné 12 coups de fouet avant de l’envoyer en prison à Tobolsk, en Sibérie.
Un autre tocsin, qui se trouvait au Kremlin de Moscou, a été exilé au monastère Saint-Nicolas de Carélie en 1681. Selon la légende, cette cloche a été punie pour avoir réveillé une nuit le tsar Fiodor Alexeïevitch.
En 1771, lors de la «Révolte de la Peste», l’un des trois tocsins du Kremlin a servi de signal de ralliement aux insurgés. L’impératrice Catherine II a décidé de le punir et lui a fait «ôter la langue», c’est-à-dire son battant. De nos jours, ce tocsin, fondu par Ivan Motorine (l'un des créateurs de la Cloche-Reine), est conservé au musée du Palais des Armures.
Cloche-astronaute
Le son des cloches se fait entendre aux limites de l’atmosphère terrestre. Il y a une cloche à bord de la Station spatiale internationale (ISS). Les membres des équipages l’utilisent pour marquer la relève des commandants de bord.
Cloches-voyageurs
M.Crane a plus tard fait don du carillon à l'Université Harvard qui l’a installé sur la tour de 38 mètres du foyer universitaire Lowell House.
La plus ancienne cloche du monastère Saint-Daniel conservée à Harvard datait du XVIIe siècle et la plus récente de 1904. Le 20 mars 2007, l'Université Harvard a consenti à rendre les cloches à l'Église orthodoxe russe en échange de 18 répliques exactes.
La plus grande cloche du monde qui n’a jamais sonné
Le fameux Tsar Kolokol (Tsar des cloches ou Cloche-reine), qui n’a jamais sonné, est le plus grand instrument de ce type au monde. Fondu en 1735 sur la décision de l’impératrice Anna Ioannovna, ce maître-bourdon en bronze pèse 201.924 kg, mesure 6,24 mètres de haut et a un diamètre de 6,60 mètres. En mai 1737, lors d'un des grands incendies qu’a connus Moscou, cette cloche s'est brisée en tombant du beffroi dans la fosse de coulée. En 1836, la cloche a été posée sur un piédestal au centre du Kremlin.
Pendant la Seconde Guerre mondiale, la cloche a abrité un poste de communication de réserve du régiment du Kremlin. Pour cacher la cloche brillante des avions nazis, les militaires soviétiques l’ont peinte en couleurs sombres. Après les travaux de restauration de 1979, on en a retiré plusieurs couches de peinture.
La cloche qui ne s’est jamais tue
L’Oxford Electric Bell, une cloche électrique qui se trouve au Laboratoire Clarendon de l’Université d'Oxford, en Angleterre, sonne sans cesse depuis 1840 (avec quelques courtes interruptions dues à un excès d'humidité).
In a laboratory at Oxford University sits the Oxford Electric Bell, which has spent 178 years constantly ringing https://t.co/NS6CaGzQob pic.twitter.com/duHGaR4YGO
— Massimo (@Rainmaker1973) 17 février 2018
Il s’agit d’un carillon électrique expérimental alimenté par deux piles sèches scellées. La composition exacte des piles sèches est inconnue. Par contre, il est certain qu’elles ont été recouvertes de soufre fondu pour prévenir la détérioration due à l’humidité atmosphérique.
La cloche qui a donné son nom à une monnaie
Pendant la guerre civile en Russie (1914-1923), l’Armée blanche commandée par le général Anton Denikine a émis sa propre monnaie en Crimée en août 1919.
Cette monnaie a été surnommée «kolokoltchiki» («clochettes ») parce que les billets de banque de 1000 roubles étaient ornés d’une image représentant le Tsar des cloches.
La cloche dont le son symbolise Moscou
Le son du carillon de la tour du Saint-Sauveur est retransmis par les radios centrales russes à minuit et, la nuit du Nouvel an, on l’entend également à la télévision. Les Moscovites et les touristes se trouvant au centre de la capitale profitent du son de ces cloches tous les quarts d’heure.
La cloche principale de 2.200 kg, qui sert à marquer les heures, a été coulée le 22 mai 1769 à l’usine de Semen Mojjoukhine à Moscou.
Au total, le carillon de la tour du Saint-Sauveur comprend 11 cloches fondues au XVIIe et XVIIIe siècles. À l'origine, le carillon de l’horloge jouait la chanson viennoise Ah, mon cher Augustin, puis, jusqu’en 1917, la Marche du régiment Préobrajenski et Gloire de Dieu, gloire de Sion. Après la Révolution russe de 1917 et jusqu’en 1938, les cloches ont joué l’Internationale, un hymne révolutionnaire.
Depuis 1999, le carillon joue deux airs: l’hymne de la Russie à midi et à minuit, à 6h00 et à 18h00 et la grande scène chorale Gloire de Mikhaïl Glinka à 03h00, 09h00, 15h00 et 21h00.
A la différence de la plupart des cloches utilisées dans les églises russes, les cloches de la tour du Saint-Sauveur n’ont pas de battants. Des marteaux actionnés par le mécanisme de l’horloge frappent les cloches.