- Quelles étaient les conclusions de la commission?
— La conclusion principale était l'absence de toute preuve d'empoisonnement intentionnel. Il n'y a ni suspects ni accusés dans cette affaire. Toute l'histoire de l'empoisonnement était une simple campagne politique.
- Selon une version, Iouchtchenko avait été empoisonné par de la dioxine…
— Tous les experts interrogés affirment que la dioxine se dissout dans l'organisme pendant 7 à 10 ans. Les conséquences sont incurables. Or Iouchtchenko a réussi à guérir comme par miracle.
- Il n'y avait pas de dioxine dans son sang?
— Nous l'ignorons. Il a refusé de coopérer avec nous et n'a pas présenté d'échantillons de sang à la commission. En outre, il n'a pas non plus coopéré avec le parquet et le ministère de l'Intérieur. Ces institutions étaient dirigées par des hommes qu'il avait lui-même nommés, et même à eux il ne faisait pas confiance.
- Iouchtchenko a donné son sang à une clinique autrichienne…
— J'ai contacté ces médecins. Ils ont reçu du sang mais ils ignorent à qui il appartenait. De la dioxine aurait pu y être ajoutée par la suite. Il faut savoir que la dioxine est une arme de destruction massive. C'est l'«agent Orange» qui a été utilisé par les Américains au Vietnam. Si Iouchtchenko avait réellement été empoisonné avec de la dioxine, il y aurait eu de nombreuses victimes — et pas seulement lui. Ce n'est pas du tout logique.
- Alors d'où vient la théorie sur la dioxine?
— Ils ont observé les symptômes approximatifs: comme chez les Vietnamiens. Une version a été inventée dans la foulée.
- Alors qu'est-il arrivé à Iouchtchenko?
— Nous avons enquêté sur un empoisonnement présumé. Aucune preuve d'empoisonnement n'a été retrouvée. Personne n'a empoisonné Iouchtchenko! Que s'est-il passé en réalité… Iouchtchenko a subi certaines procédures médicales pour améliorer son apparence. Les experts interrogés affirment qu'après de telles procédures, il fallait respecter un certain régime alimentaire. Par exemple, il est interdit de boire de l'alcool. Iouchtchenko buvait, je le sais avec certitude, il y a des photos. Il faut également savoir qu'il souffrait de pancréatite. Tous ces facteurs se sont cumulés.
- Qui savait qu'aucun empoisonnement n'avait eu lieu?
— Au QG de Iouchtchenko, tout le monde savait. Toute sa direction le savait parfaitement. Quand Iouchtchenko a déclaré avoir été empoisonné, les soupçons sont immédiatement tombés sur le SBU (Service de sécurité ukrainien). Et quand j'ai pris la direction de la commission parlementaire, on m'a fait écouter les enregistrements du QG. J'ignore pour quelle raison ils espionnaient les collaborateurs du QG. Peut-être dans le cadre d'une affaire pénale. J'ai écouté pendant trois jours ces enregistrements: ils savaient tous parfaitement qu'il n'y avait pas eu d'empoisonnement. Et le président actuel, Petro Porochenko, le savait aussi. Iouchtchenko a été soigné aux frais de Porochenko.
- Qui a inventé cette version?
— David Jvania du parti Notre Ukraine a directement déclaré à notre commission que la direction de ce parti avait falsifié l'empoisonnement. De la dioxine a été ajoutée dans l'échantillon de sang de Iouchtchenko. Et cet échantillon a été envoyé à la clinique autrichienne. C'est la raison pour laquelle il refusait de donner un échantillon sanguin à notre commission: s'il avait effectivement été empoisonné, il aurait été le premier intéressé à le faire. Alors pourquoi a-t-il refusé dans ce cas?
Le texte des médecins autrichiens a été écrit par le vice-président du parlement Alexandre Zintchenko. C'est lui-même qui l'a écrit et l'a envoyé à la clinique, et les médecins l'ont simplement lu.
- La commission a-t-elle subi des pressions?
— Des hommes de Iouchtchenko m'ont demandé de geler le travail. C'était un accord: ils promettaient de ne plus médiatiser le thème de l'empoisonnement, et nous n'enquêtions pas sur cette histoire. Mais en 2009 Iouchtchenko a enfreint l'accord et la commission a repris son travail.
Il n'y a pas eu d'empoisonnement, c'est clair. Aucune preuve d'empoisonnement n'a été apportée, c'est une histoire politique à part entière. Une grave accusation a été lancée sans preuves. Cela ressemble beaucoup à l'affaire de l'empoisonnement de Skripal — le mécanisme est le même.