Au moment de sa parution en Occident, le roman «Vivre, la confession d'un robot» d'Alexandre Zinoviev a été perçue comme «un véritable pavé dans la mare de la perestroïka.» Effectivement, ce roman à la fois sociologique et philosophique pouvait être essentiellement perçu comme une analyse implacable de la vie en Union soviétique, mettant à nu la situation bloquée où elle se trouvait alors. Mais près de trente ans se sont écoulés depuis la parution de ce texte aux Éditions L'Âge d'Homme et sa dimension universelle transparaît à travers l'image d'une ville de province figée.
Là est la force immuable et le caractère visionnaire du texte de Zinoviev: par une difformité de son corps, par une particularité de son caractère, tous un chacun peut se retrouver isolé. Mais cet isolement, tout en procurant de la souffrance, peut également amener une âme réprouvée à un niveau métaphysique supérieur, elle peut lui permettre —comme elle le permet au personnage central du roman- de formuler la question principale de l'existence humaine: peut-on, isolé, vivre une vie d'Homme digne?
«Pendant la journée, la foi se perd toujours un peu», dit le major Kapiton Maximovitch, dans «Les Possédés» de Dostoïevski. Le héros principal du roman de Zinoviev est un petit-fils du major. Il est allé plus loin, dans la nuit de son existence, il a trouvé la foi, sa foi: «Vivre!»
Et nous, aujourd'hui, au-delà d'un roman sociologique avec son une analyse de la vie en Union soviétique, on perçoit avec stupeur la mise à nu de notre situation «bloquée où elle se trouve» la situation dans laquelle nous devons tous trouver comment vivre. Vivre —comme un défi. Vivre —comme une nécessité. Vivre —comme une réponse au néant.
Les 22 et 23 avril 2018, au Théâtre «El Duende»
«Vivre»- Drame d'Alexandre Zinoviev- Adaptation Aurore Gobert
Par le Collectif Phainomen- Mise en scène: Irène Ranson Terestchenko