ONG internationales, opinion publique, députés: les livraisons d'armes françaises à Riyad, soupçonné de crimes de guerre au Yémen, sont fustigées de tous côtés. Et la visite du prince héritier saoudien Mohammed ben Salmane en France prévue la semaine prochaine ne fait que mettre de l'huile sur le feu.
Le conflit yéménite oppose des forces progouvernementales, appuyées notamment par les Saoudiens et les Émiratis, aux rebelles Houthis, soutenus par l'Iran et qui contrôlent la capitale Sanaa.
Cette guerre a fait près de 10.000 morts depuis 2015, dont de nombreux civils, et provoqué ce que l'ONU qualifie de «pire crise humanitaire du monde».
«Riyad est à la tête d'une coalition qui a tué et blessé des milliers de civils» et «nombre de ces attaques seraient des crimes de guerre», dénonce Bénédicte Jeannerod, directrice France de Human Rights Watch (HRW). «En continuant de vendre des armes à l'Arabie saoudite, la France risque de se rendre complice de graves violations du droit international et envoie un message d'impunité au dirigeant saoudien».
Le député Sébastien Nadot, membre de la majorité présidentielle (LREM), réclame lui la création d'une commission d'enquête parlementaire sur les ventes d'armes françaises aux acteurs du conflit au Yémen.
«Il s'agit de savoir si la France a tenu ses engagements internationaux en la matière», explique à l'AFP le député, qui déplore un contrôle parlementaire «inexistant» sur les ventes d'armes. «Aujourd'hui ce contrôle est purement administratif. Le parlement a quelques informations mais aucun élément détaillé», regrette-t-il.
Ces cris d'alerte trouvent un écho dans l'opinion publique française.
Certains pays européens, dont l'Allemagne, la Norvège ou la Belgique ont récemment pris la décision de restreindre leurs relations militaires avec la coalition arabe, mais la France, le Royaume-Uni et les États-Unis se sont abstenus de leur emboîter le pas.
En 2016, Paris aurait vendu pour 2 milliards de dollars d'armes à Riyad et Abou Dabi. Selon les estimations de l'Institut SIPRI, dans la période comprise entre 2013 et 2017, la France a été le deuxième fournisseur d'armes aux EAU et le troisième à l'Arabie saoudite.
Une coalition militaire arabe sous commandement saoudien intervient depuis mars 2015 au Yémen en soutien au gouvernement du Président Abd Rabbo Mansour Hadi contre les Houthis, alliés à des unités de l'armée restées fidèles à l'ex-Président Ali Abdallah Saleh. Les rebelles contrôlent la capitale Sanaa depuis 2014 et restent maîtres de vastes régions du pays.