Remplacement des F-16: polémiques en Rafale sur la Belgique

© AP Photo / Geert Vanden WijngaertUn avion de combat belge F-16
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La vague de polémiques enfle: des officiers belges sont soupçonnés d’avoir caché une étude prouvant que la durée de vie des F-16 pouvait être prolongée, dans l’optique d’acheter des chasseurs flambant neufs. Une autre fuite indique que l’appel d’offres pour renouveler les chasseurs belges était taillé sur mesure pour le F-35 américain.

Mais que veut la Belgique? Alors que la polémique enfle au plat pays, que quatre officiers ont été suspendus de leurs fonctions, un document vient conforter la France son impression que l'appel d'offres belge avait été rédigé de manière à «privilégier le F-35 américain».

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La semaine dernière, deux documents de Lockheed Martin sur le prolongement de la durée de vie des F-16 belges ont fuité dans la presse. Mercredi 28 mars, c'est un document du cabinet du ministre qui s'est retrouvé dans les pages de «De Standaard», provoquant une nouvelle vague d'indignation au sein d'un gouvernement très divisé.

Ce document recommande l'achat d'«un avion de combat de cinquième génération», à laquelle seul correspondait le F-35 de Lockheed Martin, faisant également mention de «la capacité de dissuasion nucléaire».

«Il est certain que toute la procédure pour remplacer le F-16 était une arnaque», a déclaré le député SP.A, Dirk Van der Maelen, qui a lu le document, initiant une nouvelle charge des socialistes contre le ministre de la Défense: «Le choix du F-35 était déjà fixé en 2015. Le ministre Vandeput a toujours nié que la capacité nucléaire était un critère important dans le choix, mais cela ne correspond pas à la réalité.»

Quel avenir pour les F-16 vieillissants, mais dont on sait maintenant, à grand renfort de dollars, qu'ils peuvent vivre plus longtemps? La question agite la société belge, puisqu'un sondage a même été effectué en Flandre, montrant que «plus de 50% des sondés jugent qu'il n'est pas important d'investir dans de nouveaux avions de combat et 60% estiment que l'argent pourrait être investi dans autre chose». Il faut dire que la somme en jeu a de quoi susciter le débat:

«15 milliards d'euros sur 40 ans, c'est un programme historique pour la Belgique», commente Benjamin Hautecouverture, Maître de Recherche à la Fondation pour la recherche stratégique (FRS).

Mais cette affaire, initialement militaire, a pris une tournure beaucoup plus politique, motivée par des clivages plus latents:

«Cette division gauche droite, cette division Flamands-Wallons, se réinterprète également dans le contexte européen: un choix pro-américain, à l'opposition d'un choix pro-français, pro-européen. C'est perçu comme ça dans de nombreux médias francophones»,

commente Alexandre Vautravers, expert en sécurité et responsable du nouveau programme de master en sécurité globale au Global Studies Institute de l'Université de Genève. Dans le cadre du renouvellement de ces F-16, face au F-35 de Lockheed Martin et aux Typhoon d'Eurofighter, la France a proposé à la Belgique un «partenariat approfondi et structurant», fondé sur le Rafale.

«Un partenariat stratégique global, dans lequel déjà beaucoup d'accords de coopération ont été signés entre Dassault et des industriels belges. Les Belges peuvent parfaitement, finalement, choisir l'offre française. Ce n'est pas incompatible», explique Benjamin Hautecouverture.»

Le Maître de Recherche souligne ainsi qu'une «trentaine» d'accords ont déjà été signés entre Dassault et des industriels belges.

Dans le contexte d'une relance de la défense européenne, «ce serait un bon signe pour la construction d'une Europe de la défense intégrée que l'offre française soit sérieusement regardée et considérée», poursuit-il. Mais la Belgique ne veut pas négocier, car la proposition est arrivée hors délai. «C'est un choix politique de la part des Belges. Ce n'est pas un problème juridique», estime M. Hautecouverture.

Les socialistes exigent de suspendre l'appel d'offres et de reconsidérer le remplacement des F-16. «M. Macron a fait une proposition intelligente et la Belgique ferait une erreur en ne s'engageant pas dans une Défense européenne», a souligné de son côté le ministre de la Fédération Wallonie-Bruxelles et ex-ministre de la Défense, André Flahaut.

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Mais alors, pourquoi ce «mépris affiché pour l'offre française», cette «préférence décomplexée pour le F-35 américain», comme on peut le lire dans la presse belge? Pour Alexandre Vautravers, «la vraie question, ce n'est pas celle de la défense européenne, qui est un pur fantasme politique», mais plutôt «dans les engagements de maintien de la paix, dans les engagements de stabilisation, dans les engagements extérieurs de la Belgique, avec qui les militaires belges coopèrent-ils?»

« Regardez la liste des engagements: beaucoup en Afghanistan, aux côtés des Américains, avec les F-16 un peu partout dans le monde, aux côtés des Canadiens, de pays scandinaves, mais peu aux côtés des Français, explique-t-il. Donc, une coopération, une alliance stratégique binaire avec la France a beaucoup moins d'intérêt sur le plan politique, sur le plan technique, sur le plan militaire, qu'une alliance avec l'Otan.»

La mise en commun des efforts européens de défense serait-elle découragée par la diplomatie commerciale américaine?

«Cela pose la question de la possibilité d'une Europe de la défense, d'une Europe stratégiquement autonome, face à l'allié paradoxal américain, qui demande à l'UE de gagner son autonomie et en même temps qui l'en empêche, ou tente de l'en empêcher, sur le plan industriel et commercial», appuie M. Hautecouverture.

Un vent de panique souffle aussi sur l'armée de l'air, préoccupée par les F-35.

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En attendant, la pression paie: «J'observe une pression très importante de l'industrie aéronautique américaine en Europe, avec le déploiement progressif d'un avion de combat de dernière génération, le F-35», a affirmé le chef d'état-major de l'armée de l'Air française, le général André Lanata, lors d'une audition le 19 juillet à l'Assemblée nationale. «Le F-35 va constituer rapidement un standard de référence dans les armées de l'air mondiales, pas uniquement aux États-Unis, mais aussi chez nos principaux partenaires. Que l'on soit surclassé par les États-Unis n'est pas surprenant, que l'on commence à l'être par des partenaires équivalents est une autre affaire», poursuit-il.

«De la part des politiques, c’est quand même de la mauvaise foi», estime M. Vautravers. «Ce rapport et ce "scandale", c’est une action purement politique: d’un point de vue strictement militaire, ça n’a aucun sens.»


Un scandale dont l’issue est incertaine pour le moment, car le gouvernement ne prendra pas de décision tant que le résultat des enquêtes ne sera pas connu, à savoir si l’armée a bel et bien caché des informations à sa hiérarchie et si le ministre de la Défense pouvait ne pas savoir.

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