Expulsion de diplomates russes: l’affaire Skripal «vise à diaboliser la Russie»

© AFP 2024 Daniel Leal-OlivasLes diplomates expulsés, Londre
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Une centaine de diplomates russes vont être expulsés par de nombreux pays occidentaux, qui ont suivi la demande britannique. Une «surprise, totalement disproportionnée» selon Sébastien Cochard, ancien diplomate et conseiller au Parlement européen, qui estime que «la politique extérieure de l’UE est l’objet de toutes les manipulations.»

L'affaire Skripal? Une campagne contre la Russie qui «peut rappeler la propagande permanente contre Saddam Hussein dans les années 1990.»

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Sébastien Cochard, ancien diplomate, juge sévèrement les développements de l'affaire Skripal, dont l'onde de choc continue de se propager et de gagner en ampleur. Alors même que, de l'aveu des Britanniques, l'enquête est en cours et pourrait durer plusieurs mois, les Occidentaux ont pris la décision de sanctionner Moscou. Le 26 mars dernier, tant Washington, Ottawa et Canberra que 18 membres de l'Union européenne annonçaient l'expulsion d'une centaine de diplomates russes.

«Cette expulsion de 60 diplomates est vraiment une surprise. C'est totalement disproportionné par rapport à l'affaire Skripal! C'est un nombre significatif.»

Le conseiller au Parlement européen, apparenté FN, estime de plus que la présomption d'innocence est bafouée dans cette affaire. Il explique qu'il n'y a «pas le plus petit début de preuve que quelque personne ou quelque entité que ce soit ait commandité cette attaque sur monsieur Skripal et sa fille», avant d'ajouter:

«On a saisi le prétexte pour condamner politiquement et vis-à-vis de l'opinion publique Moscou. C'est un prétexte parmi toute une longue série.»

Sébastien Cochard considère que le fait que plus d'une centaine de diplomates russes soient déclarés persona non grata par 26 pays partout dans le monde illustre bien la campagne de diabolisation de la Russie menée par l'Occident contre Moscou.

«C'est une opération qui n'est pas de court terme et qui vise à diaboliser la Russie et son gouvernement actuel. C'est une opération de changement de régime», estime le conseiller au Parlement européen.

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La France n'a pas tardé à répondre à l'appel de Londres. Le 26 mars dernier, le gouvernement français annonçait l'expulsion de quatre diplomates russes. Pour Sébastien Cochard, il ne s'agit pas tant de démanteler les réseaux de renseignements russes —motif utilisé par Theresa May pour justifier de l'expulsion de 23 diplomates de Londres- que d'afficher le soutien de Paris à son allié britannique.

«Il s'agit visiblement de faire preuve de solidarité avec le Royaume-Uni —solidarité entre guillemets, puisqu'on ne peut pas dire que le Royaume-Uni ait été attaqué. On ne sait pas si c'est un gouvernement étranger qui a commandité cette attaque.»

M. Cochard dénonce aussi le manque de cohérence de la politique d'Emmanuel Macron vis-à-vis de la Russie, qu'il qualifie de «balancier assez déconcertant». Il va jusqu'à comparer le Président de la République à Donald Trump, l'accusant de «souffler le chaud et le froid sur la relation avec la Russie».

«Je pense qu'Emmanuel Macron, un peu comme Donald Trump, a tendance à pratiquer de manière organisée des décisions imprévisibles et chaotiques. […] On a en permanence cette espèce de politique de chaud et de froid de Washington vis-à-vis de la Russie. Le Président Macron a une sorte de ligne équivalente: il insulte Sputnik et RT alors qu'il reçoit M. Poutine, il accuse les Russes d'avoir manipulé les MacronLeaks et […] va se rendre au Forum de Saint-Pétersbourg.»

Pour l'ancien diplomate, la France n'a «aucun intérêt à suivre cette politique antirusse», mais s'aligne sur les positions européennes alors même qu'aucune preuve accablant la Russie n'a été rendue publique jusqu'alors.

«La France se met dans la charrette de cette soi-disant politique extérieure de l'Union européenne qui n'existe pas vraiment et qui est l'objet de toutes les manipulations.»

Pour autant, et malgré l'affaire Skripal, M. Cochard considère que l'unité des Européens vis-à-vis de Moscou n'est qu'une unité de façade. Il illustre son argument en expliquant que les différents membres de l'Union européenne «vont en ordre dispersé» et souligne que sur les 28 pays qui composent l'UE, à peine plus de la moitié a d'ores et déjà annoncé des sanctions.

«Cette décision [d'expulser des diplomates russes, ndlr] montre qu'il y a une sorte de déperdition du front uni de l'Union européenne constitué artificiellement en 2014 contre la Russie.»

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Rappelant que la politique extérieure de l'Union européenne est décidée à l'unanimité, le conseiller au Parlement européen explique que l'opposition d'un seul État au «principe même des expulsions» aurait permis à la France de «s'extraire entièrement» des sanctions contre Moscou.
Car si certains pays, à l'image de l'Autriche, de la Slovaquie ou encore de la Grèce, n'ont pas annoncé d'expulsion de diplomates, ils ne se sont en revanche pas opposés au principe de sanctionner la Russie.

Le 27 mars, l'Otan se joignait aux chancelleries occidentales en annonçant le retrait des accréditations de sept membres de la délégation russe auprès de l'alliance atlantique, ainsi que le rejet de trois demandes d'accréditation en cours. Rien d'étonnant à ce sujet pour le conseiller au Parlement européen qui déclare que:

«L'OTAN est une organisation tragique qui n'existe que par la manipulation artificielle du péril russe.»

Interrogé sur ce qui fait la singularité tant de l'affaire Skripal que de ses ramifications, Sébastien Cochard estime que cette affaire est «le prétexte du moment» et qu'elle s'inscrit dans un temps long. Il développe son propos en expliquant:

«L'idée c'est de maintenir la pression de l'actualité sur la Russie, sur des sujets antirusses, maintenir alertes les populations occidentales sur le péril russe agité en permanence.» 

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