Travail des demandeurs d’asile: «Je ne crois pas à l’appel d’air»

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Autoriser les demandeurs d'asile à trouver un emploi au bout de six mois, avant qu'ils n’aient obtenu le statut de réfugié: c'est l'une des mesures du rapport du député Aurélien Taché, publié lundi 19 février. Ce système, peut-il fonctionner en France? Entretien avec Me Thierry Vallat, spécialiste en droit du travail.

Deux jours avant la présentation du projet de loi asile et immigration, le député LREM Aurélien Taché a remis au chef du gouvernement son rapport contenant 72 propositions pour faciliter l'intégration des réfugiés. Après s'être longtemps focalisé sur le logement, avec plus ou moins de brio, le gouvernement se penche sur l'emploi, vecteur d'intégration des réfugiés.

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«On ne donne pas du travail, on donne la possibilité d'en chercher», précise l'élu de La République en marche dans une interview accordée au Parisien. Le Premier ministre Édouard Philippe a affirmé que le gouvernement «reprendra les grands axes des propositions» contenues dans le rapport.

«C'est plus une disposition qui donnera l'image d'une intégration plus facile», estime Me Thierry Vallat, soulignant que «l'accès au travail et au français est très compliqué» pour les primo-arrivants.

«Les personnes qui vont postuler seront davantage orientées vers des professions qui sont dans des secteurs où les demandes d'emplois sont plus importantes et non pourvues comme l'hôtellerie-restauration ou le bâtiment, des secteurs avides de main-d'œuvre», poursuit l'avocat. Des secteurs que l'on sait pourtant recourir massivement au travail de personnes en situation irrégulière, entretenant ainsi précarité et atteintes au droit du travail.

«Il y a de plus en plus de contrôle, notamment dans les secteurs évoqués. Ils sont extrêmement traditionnellement visés par ce type de dérive», note Me Vallat. «Mais vu les contrôles actuels […] je pense qu'au contraire ça peut être plutôt favorable pour assainir encore plus ces secteurs d'activité et permettre aux réfugiés, pour le coup en situation régulière, de pouvoir postuler».

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Le député souhaite une insertion professionnelle «la plus précoce possible», et propose «un accompagnement global, incluant notamment l'accès au logement et à l'emploi, d'une durée moyenne d'un an». Ce plan passera par des contrats avec les branches professionnelles, des «partenariats avec les grandes entreprises». Si le coût total des mesures proposées par le député est estimé à 600 millions d'euros, disposerons-nous de suffisamment de moyens pour permettre une réelle personnalisation du parcours?

«Le rapport Taché préconise d'avoir une personnalisation plus importante du dossier de chaque réfugié. Est-ce qu'on va véritablement pouvoir avoir la réponse administrative, en personnel humain, et en matériel, pour vraiment avoir un suivi aussi important et adapté à la situation de chacun? J'en doute un peu, malheureusement», estime Me Vallat, pour qui la personnalisation du parcours «c'est la clé de voute du système».

Aurélien Taché veut permettre aux demandeurs d'asile de travailler plus vite et plus facilement, que leur demande d'asile soit acceptée ou non. Car la première chose que recherche un exilé «ce n'est pas qu'on le mette dans un centre d'hébergement ou qu'on lui donne une allocation pour qu'on s'occupe de lui, c'est qu'on le laisse travailler».

Le député veut autoriser les demandeurs d'asile à trouver un emploi au bout de six mois, contre neuf actuellement. Et pour ceux dont la demande d'asile serait rejetée, mais qui auraient travaillé: «Ils seraient renvoyés dans leurs pays après avoir travaillé de façon temporaire», explique-t-il.

Pas de quoi créer un «appel d'air», selon Thierry Vallat: «Ceux qui veulent venir en France au péril de leur vie viendront, travail ou pas travail. La situation sera de toute façon préférable à celle de leur pays en guerre».

«On a des gens qui ont déjà des qualifications, des parcours, des connaissances, qui pourraient les mettre à profit plus facilement dans notre pays. Il ne faut pas les laisser livrer à eux-mêmes et ajouter un peu plus de précarité à l'exil», conclut l'avocat

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