«Est-ce que le dialogue de Trianon est une bonne chose? Oui. Il permet de relancer les contacts. Oui. Il a fait revenir autour de la table des entreprises qui n'étaient pas là ces dernières années», explique donc Pierre Bordeaux, maître de conférences à l'Université Paris-Est Créteil, Paris XII.
En revanche, pour M.Bordeaux, le défi principal auquel le dialogue du Trianon est actuellement amené à faire face c'est sa restructuration et la redéfinition de ses objectifs.
«Il faut structurer le dialogue de Trianon, construire des milieux de travail pluridisciplinaires autour de compétences avérées et pas des statuts. Avec un peu de moyens (…) et avec un programme. On doit faire telle chose à tel moment, cette chose-là doit rassembler à un tel élément, ces éléments-là doivent pouvoir se compléter à tel endroit et lever éventuellement les difficultés. Ça, c'est à mon avis, doit être le prochain horizon du dialogue de Trianon», a-t-il relaté.
Observer la dynamique de l'évolution du dialogue du Trianon serait possible lors du Forum économique à Saint-Pétersbourg qui aura lieu en mai 2018 et auquel Emmanuel Macron est attendu. D'après M.Bordeaux, la visite du dirigeant français en Russie pourrait ainsi redonner un nouveau souffle au dialogue franco-russe.
«Je ne fais pas de politique. Très modestement, je pense que M.Macron a une vision du monde un peu différente des autres politiques qui étaient auparavant. Donc, on peut s'attendre déjà à un certain renouvellement intellectuel. Deuxièmement, cela ressemble beaucoup à De Gaulle quand même. On se dit: on repart avec les Russes pour dire aux Américains: écoutez, on n'est pas obligés de parler qu'avec vous. Mais au bout du compte on fait du business avec les Américains parce que c'est une puissance économique. (…) Pour l'instant, la France veut parler à tout le monde. C'est vrai au Moyen-Orient, c'est vrai en Israël, c'est vrai en discutant avec la Russie», a-t-il affirmé.
De plus, la chose qui serait primordiale, à cet égard, ce serait également de comprendre quel doit être le but de ce projet et par quels moyens il faudrait y accéder.
«La venue du Président Macron à Saint-Pétersbourg, elle doit se comprendre au-delà de la relation franco-russe (…) dès maintenant il faudrait comprendre qu'est-ce qu'on va mettre sur la table, qu'est-ce qu'on va signer», a-t-il conclu.
Selon lui, les projets comme le dialogue du Trianon, ne doit pas «commencer dans les bureaux» mais partir d'initiatives bien précises, qui devraient être, à leur tour, soutenues par les institutions à de différents niveaux.
«Ce n'est pas la verticale du pouvoir, mais l'horizontale de l'échange qui doit primer», souligne-t-il dans une interview à Sputnik.
Pour lui, il ne faut pas, non plus, négliger le rôle du financement. De ce côté-là, il estime que l'année 2018 pourrait, déterminer l'évolution des choses à court terme.
«Les projets de budgets des Etats sont déjà faits. Donc, à mon avis, il faut rien attendre pour 2018, ce que l'on peut faire en 2018, c'est de préparer les programmes et mettre de l'argent dans les budgets de 2019. Sinon je ne pense pas qu'on puisse avancer beaucoup», explique-t-il.
Dans le même temps, tout comme M.Bordeaux, M. Cohen est convaincu que la visite de Macron à Saint-Pétersbourg pourrait faire avancer les choses.
«M.Macron, c'est quelqu'un qui a une parole de vérité, qui n'est pas un formaliste dans les échanges. Donc, je pense que s'il y a des propositions concrètes et instrumentées à faire, cela va certainement être utile», ajoute-t-il.
Soulignant l'importance de ce dialogue, M. Cohen appuie toutefois sur la nécessité d'avoir des personnes de bonne volonté des deux côtés.
«Ce sont des grains utiles, maintenant il faut arroser les grains pour qu'ils poussent (…) Ce projet ne peut marcher que s'il y a du désir chez les gens, s'il y a des gens qui ont envie de le faire. Sinon ce n'est pas la peine et pour stimuler l'envie il faut de l'argent. C'est donc la rencontre de l'argent et du désir», a-t-il conclu.
Le dialogue du Trianon, initiative d'Emmanuel Macron et Vladimir Poutine, vise à créer une instance permettant à ce que les relations entre les deux pays ne soient pas uniquement des relations politiques, des relations économiques, mais que la société civile, dans sa diversité, puisse échanger de manière régulière, forte et permanente.