Le juge des référés du Conseil d'État refuse de suspendre la décision du Gouvernement de renouveler les contrôles aux frontières intérieures. Mais pourquoi la plus haute juridiction administrative a-t-elle été obligée de se pencher sur la décision prise par la France en octobre dernier?
D'un point de vue juridique, la France reste pourtant dans son droit, puisque les accords de Schengen stipulent que les 26 États-membres de l'espace de libre circulation européen ont la possibilité de rétablir temporairement des contrôles à leurs frontières nationales en cas de menaces à l'ordre public ou la sécurité. Contrairement à ce qui est parfois écrit ou dit, cette décision ne constitue ni une «fermeture des frontières», ni même une «suspension des accords de Schengen». Le passage est toujours autorisé pour les personnes prouvant leur identité et cette mesure d'exception est bien permise par la convention de Schengen sous certaines conditions. Il s'agit plutôt d'une suspension de la libre circulation effectuée dans le cadre des accords de Schengen.
Mais voilà, les personnes à qui cela pourrait poser problème sont celles en situation irrégulière. Du coup, la critique de l'outrage aux libertés personnelles sert à masquer une opposition beaucoup plus ciblée, celle à la Loi sur l'immigration. Une nouvelle loi qui fait bondir l'opposition et les associatifs pro-migrants, pour des raisons opposées.
Alors qu'une concertation doit démarrer en janvier, une circulaire validée par le ministère de l'Intérieur, permettant de contrôler les populations accueillies dans les centres d'hébergement, notamment pour identifier les migrants, a provoqué leur indignation. «Aucun gouvernement depuis la Seconde Guerre mondiale n'avait osé aller jusque-là», s'est indigné Patrick Weil, historien et politologue, spécialiste de l'immigration. Mais aucun gouvernement depuis la Seconde Guerre mondiale n'a subi de tel afflux des migrants —oserait-on rétorquer.
D'autant plus que ces migrants sont dans la plupart de cas sont savamment encadrés par les passeurs, une raison pour laquelle certains pays européens songent même à construire de nouveaux «murs de Berlin» à l'intérieur de l'espace «amical» de Schengen.
En attendant, le dispositif de protection contre les actes terroristes, une raison de maintien du contrôle aux frontières, actuellement en place n'est pas commode au quotidien, ce qui provoque certaines plaisanteries aigres-douces des internautes:
#Strasbourg: je viens de franchir avec succès le check point ☑️Ce qu’ils n’ont pas su faire à nos #frontières, ils nous l’imposent au marché de Noël. pic.twitter.com/TarMUxubAB
— Françoise GROLET (@fgrolet) 4 декабря 2017 г.
«Depuis quand est-ce aux associations de décider de qui vient sur notre territoire, et de qui peut s'y maintenir? nous questionne, via son compte Twitter, le Président de l'association ANDELE, Sébastien Jallamion. À en juger par les récentes levées de boucliers, c'est pourtant ce qu'il se passe. De plus, appliquer la Loi dans ce domaine serait déjà une révolution.»
Et les commentaires vont bon train, certains accusant les associations à l'origine de la plainte de toucher également des aides publiques, venant de l'État, des collectivités territoriales et parfois de l'Union européenne. Opinion personnelle? Ou état d'esprit plus général? Pour l'instant, c'est le Conseil d'État qui a tranché, en donnant tort aux associations…