Ce néologisme cherche à rendre compte d'une évolution importante dans le monde du travail: des plates-formes, utilisant des applications pour smartphones, mettent en contact ce qui est décrit comme des « particuliers » avec d'autres « particuliers » pour échanger des services ou acheter un service. C'est ce que l'on appelle aussi l'économie « collaborative ». Cette économie recouvre des initiatives qui sont pour certaines très positives. Mais, elles recouvrent aussi des méthodes qui s'apparentent bien plus à l'extorsion d'une rente.
Le cas UBER
Depuis maintenant plusieurs mois les chauffeurs travaillant pour UBER se plaignent, et à juste raison, de la dégradation dramatique de leurs conditions de travail. Avec des semaines d'environ 70h il ne leur reste plus que 1000 euros à la fin du mois. Bien sûr, certains surnagent, ou survivent. Mais ils ne sont qu'une petite minorité.
Ce qui est intéressant c'est que la société UBER accumule, elle aussi, les pertes. Mais pas ses dirigeants. Comment et pourquoi une société qui accumule des pertes peut-elles s'étendre de par le monde?
La vérité d'UBER
Quant à la société elle-même, si elle ne dégage pas de profits (mais en promet de mirobolants pour le futur), elle paye des salaires très élevés à ses dirigeants. Et ceci explique aussi cette course à l'expansion dans laquelle elle s'est engagée.
UBER et la bataille de Londres
Dans ce contexte, une nouvelle importante, et qui n'a pas été suffisamment relayée par la presse, nous est venue de Londres. C'est dans cette ville, capitale du Royaume-Uni, vous savez, ce pays que l'on décrit comme un temple du néolibéralisme et comme un enfer à la suite de sa décision de sortir de l'UE, qu'a été prise une décision qui fera date: la société UBER est sommée de requalifier les chauffeurs qui travaillent pour elle en « salariés ». Cette décision (en fait la première étape d'un processus judiciaire qui s'étendra durant tout le printemps prochain) fait suite d'ailleurs à des décisions analogues prises dans les grandes villes californiennes, au cœur même de ce que l'on appelle la « nouvelle économie ».
C'est une décision importante, car elle met fin à l'hypocrisie qui règne autour d'UBER, qui prétend n'être qu'une simple plate-forme mettant en contact des travailleurs indépendants et leurs clients. UBER, en effet, prétend ne pas être transporteur. Mais, alors, pourquoi UBER fixe-t-elle les prix qui peuvent être demandés par les chauffeurs? On voit bien, ici, où le bat blesse. UBER prétend imposer des règles mais se refuse à assumer toute responsabilité. C'est pourquoi cette décision de la justice londonienne, et au-delà les plaintes qui devraient déboucher en justice en France à la fin du mois de mars 2018, invitent à se pencher sur ce que l'on appelle le « modèle économique » d'UBER.
UBER: le grand retour en arrière?
Ce statut, dans de nombreux cas, et en particulier dans celui des chauffeurs d'UBER, ne fait que réactualiser un modèle économique des débuts du XIXème siècle: le travail à façons. Le donneur d'ordre passait distribuer les matières premières à ses travailleurs et repassait en fin de journée prendre le produit de leur travail, les payant donc à la pièce, sans contrat ni obligation. Le progrès serait-il de revenir aux heures les plus noires de la Révolution industrielle? Ici, dans le cas d'UBER, on peut considérer que les inventeurs ou les détenteurs des droits d'une application sont de plus dans la situation du propriétaire foncier qui exploite, par la rente foncière, le paysan qui ne peut se constituer pleinement en « petit propriétaire ».
C'est pourquoi la décision du tribunal de Londres est-elle aussi importante. Il faut ici attendre ce que donnera au final cette procédure, et les résultats des procédures analogues qui ont été engagées en France.
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