Valérie Bozzi, élue corse LR: «l’autonomie n’est pas une politique»

© AFP 2023 PASCAL POCHARD-CASABIANCACorse
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Ils ne sont que six au sein de l’Assemblée de Corse – six élus LR sur la liste de Valérie Bozzi, réunis sous le slogan «Voir plus grand pour elle». L’élue régionale a détaillé à Sputnik ce qu’elle compte faire «pour elle», pour la Corse, «sa» Corse.

«Aujourd'hui, il y a 400 millions d'euros d'avantages fiscaux par an, des dotations qui viennent de France. Il y a très peu de développement économique en Corse. C'est une de raisons qui nous fait réaffirmer le double ancrage dans la République.»

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Valérie Bozzi, maire depuis 2008 de Grosseto-Prugna-Porticcio, une commune écartelée entre les terres historiques de Corse Sud et une pimpante station balnéaire, se veut pragmatique. Avec ses cinq colistiers, inscrits sur la liste «Voir plus grand pour elle», l'élue régionale LR ne pouvait rester, explique-t-elle à Sputnik, les bras croisés devant la dérive de l'Assemblée de Corse vers le nationalisme.

Elle a dû faire des sacrifices dans sa vie politique et sa vie privée pour défendre son idée de la Corse. Elle ne cache pourtant pas que les bons résultats des nationalistes ont été une surprise pour tout le monde.

«On ne les a pas vus aussi haut, se désole Valérie Bozzi. Deuxième point inattendu, le fort taux d'abstention: Les deux cumulés, ça a profité aux nationalistes.»

Néanmoins, Madame le Maire considère que son parti politique a manqué de pédagogie pour que la population prenne suffisamment conscience de l'enjeu de ces élections régionales.

«Pendant la campagne, on n'a pas parlé de programmes. On n'a parlé que de stratégie, la stratégie d'union et d'autonomie. Mais l'autonomie n'est pas une politique. Une autonomie, pour faire quelle politique?», s'interroge l'élue.

Les nationalistes sont à la tête de la région Corse depuis 2015 et ils ont poussé la demande de la création de cette collectivité unique. Pour Valérie Bozzi, cette démarche judicieuse de simplification de ce qu'on a pris l'habitude de nommer «un mille-feuille administratif» aurait dû être faite d'une manière plus programmée, par une loi spécifique.

«On aurait pu faire des élections dans trois ans, à la fin du mandat des nationalistes, dit Madama Bozzi. Ils ne l'ont pas voulu, sachant que pendant deux ans, on a fait beaucoup de communication, c'était comme une campagne électorale. Tandis que nous sommes partis en campagne en septembre…»

Tout en admettant qu'on ne puisse pas reprocher aux nationalistes de «surfer» sur la vague de succès et tout en trouvant que la démarche soit «très intelligente», Valeri Bozzi suppose que «si le délai était rallongé, on se serait rendu compte que ce qu'ils ont fait, ils l'ont loupé.»

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L'élue a quelques raisons valables de critiquer la démarche nationaliste: elle pointe surtout du doigt le flou qui entoure les projets de politique sociale que les nationalistes devraient mettre en place. En effet, la politique sociale qui relevait auparavant des départements sera désormais la responsabilité de la Collectivité unique. Et elle est force de proposition en la matière:

«Nous proposons un développement économique, notamment, par la révision de PADDUC (Plan d'Aménagement et de Développement Durable de la Corse), un document stratégique qui bloque aujourd'hui le développement de l'île.»

Une des propositions les plus concrètes du groupe de Valérie Bozzi est la mise en place d'une zone franche sur le territoire de l'île pour permettre aux petites entreprises de bénéficier d'avantages fiscaux:

«L'insularité est un handicap et certaines lois doivent y être adaptées, précise l'élue. Pour nous, développer l'économie, c'est passer par l'aide aux entreprises.»

Autre dossier qui envenime la vie sereine sur l'île de Beauté est la crise des déchets: «Il n'y a aucune évolution sur le centre de tri, précise Valérie Bozzi, on ne sait toujours pas quoi faire de nos déchets.» face à ses mesures qu'elle veut pragmatiques, Madame Bozzi critique violemment les deux propositions les plus fortes de nationalistes, qu'elle qualifie de «théories»: la langue corse et le statut de résident sur l'île:

«Ce sont les mesures qu'ils savent anticonstitutionnelles, martèle Valérie Bozzi, et je n'ai pas l'impression qu'on parle aujourd'hui plus corse qu'avant leur arrivée. S'obstiner là-dessus, c'est perdre du temps qu'on pourrait utiliser ailleurs.»

Candidates for the Pe a Corsica nationalist party Jean Guy Talamoni (4L) and Gilles Simeoni (4R) celebrate with supporters after the annoucement of the results in the territorial elections in Bastia on the French Mediterranean Island of Corsica on December 10, 2017. - Sputnik Afrique
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De même, le statut de résident, anticonstitutionnel à ses yeux, est pour l'élue «un vœu qui ne peut pas être appliqué juridiquement». Elle préfère en revenir à son cheval de bataille, la révision du PADDUC. «Le PADDUC a mis une grande partie de terres en utilisation agricole, certains endroits ne sont même pas exploitables. Ça a entraîné la raréfaction de terrains constructibles et ça a entraîné la flambée de prix. Il y a un juste milieu à trouver là-dessus (…) via la mise en place de plans locaux d'urbanisme (PLU) au niveau des communes, de création des documents d'urbanisme qui prévoient le dispatching équitable d'espaces entre les utilisations diverses.»

L'une des motivations de Valérie Bozzi est que la Collectivité unique aura un impact sur toute la vie au niveau régional, et même servir d'exemple:

«Si ça marche en Corse, ça peut être élargi à d'autres régions au niveau national.»

Malgré le choc de sa cuisante défaite le 10 décembre dernier, le groupe de Valérie Bozzi ne baisse pas la garde.

«Il y aura trois listes d'opposition qui formeront trois groupes, signale l'élue, j'espère d'être force de proposition de l'opposition et reste vigilante sur ce qu'ils vont faire de la collectivité unique. La droite et le centre corses doivent se reconstruire, il faut refaire le travail de terrain, reformer la base militante. Nous l'avons un peu abandonné, on devait le faire depuis des années.»

La vie politique en Corse a bien ses particularités, les Corses votent pour le maire, pour le conseiller départemental, l'élu de proximité, visible immédiatement. Pour l'instant, la Collectivité unique ne s'est pas incarnée aux yeux des Corses, et c'est là-dessus que compte Valérie Bozzi afin de reprendre le travail de terrain et faire connaître ses convictions et ses propositions.

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