La ZAD de Notre-Dame-des-Landes: ghetto ou projet d’avenir?

© AFP 2024 Fred TanneauLa ZAD de Notre-Dame-des-Landes
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Que va-t-il advenir du territoire de Notre-Dame-des-Landes? Il devait accueillir un aéroport d’envergure, ce sont actuellement des centaines de personnes qui y logent. Si le projet d’aéroport reste encore en suspens, on se rapproche d’une évacuation de la zone. Réaction d’un habitant de la ZAD, qui nous explique ce qu’elle est aujourd’hui.

Le dossier Notre-Dame-des-Landes n'est toujours pas clos, plus de 50 ans après son ouverture. Il cristallise le conflit entre retour à la nature et décroissance d'une part et grand projet d'aménagement et système marchant de l'autre.

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De plus, et alors qu'il avait déjà été une sacrée épine dans le pied du gouvernement Hollande en 2012, ce dossier ressurgit à un moment où la défense de l'écologie et de l'environnement est au centre de la communication présidentielle. Emmanuel Macron ne souhaite-t-il pas devenir LE leader de la lutte contre le climat alors que One Summit Planet vient de s'achever à Paris?

«On va dire qu'arrêter cet aéroport à Notre Dame des Landes déjà c'est une base, ça s'est un engagement concret,»

plaide Camille, un habitant de Notre-Dame-des-Landes? Camille, un pseudonyme collectif utilisé par tous ceux qui répondent aux journalistes. Et il n'est pas sûr que le gouvernement lui donne tort.

Les trois médiateurs chargés d'étudier le cas Notre-Dame des Landes ont remis à l'exécutif un rapport qui devrait accélérer son dénouement. S'il ne tire pas de conclusion définitive quant à savoir si un nouvel aéroport doit être construit pour desservir l'ensemble du Grand Ouest, ce rapport préconise l'évacuation de la ZAD de Notre-Dame-des-Landes. ZAD pour zone d'aménagement différé quand on représente l'État ou Zone À Défendre pour les opposants au projet d'aéroport régional.

Mais qu'est devenue cette zone qui a fait la une des médias en 2012, sur fond de violents affrontements entre forces de l'ordre et défenseurs de l'environnement, accompagnés parfois par des militants de l'ultra gauche et des blackblocks? Aperçu de la ZAD en décembre 2017 avec Camille, qui réagit à la possible évacuation qui pourrait avoir lieu, selon le souhait du gouvernement, avant la fin du mois de janvier 2018.

«Un projet qui a commencé à s'ancrer depuis des années, avec des terres qui sont cultivées collectivement, des habitats qui se sont construits, une meulerie, des menuiseries, des boulangeries, des studios d'enregistrement, un journal, une radio, etc. On pourrait imaginer la ZAD comme un grand village dispersé, avec 70 lieux de vies, des centaines de personnes qui y habitent, c'est un territoire qui est très vivant.»

Et il ajoute:

«À la ferme de Bellevue, devant moi, il y a une fromagerie, une salle de réunion du collectif copains, un hangar, qu'on appelle le hangar de l'avenir et qui a été construit par 80 artisans charpentiers et qui servira demain de menuiserie pour la ZAD. Il y a encore une table d'hôtes où des gens viennent manger sur réservation tous les samedis et dimanches, il y a aussi une auberge, etc. Les gens imaginent de loin que c'est devenu une espèce de ghetto, entouré de barricades. Non! C'est un territoire ouvert!»

Ainsi, il semblerait que la ZAD, qui s'étendrait sur plus de 1.200 ha, abriterait aujourd'hui quelques 300 personnes, composées «de jeunes, de vieux, des femmes, des hommes, des enfants». Ils militent tous pour conserver «leurs terres», si le projet d'aéroport de Notre-Dame-des-Landes était abandonné, pour vivre autrement:

«En cas d'abandon de projet d'aéroport, notre envie, […] c'est que cela reste un territoire d'expérimentation sociale, écologique, qui soit orienté sur les communs, sur le sens des vivants, sur des notions de solidarité, de partage.»

Le territoire de la ZAD serait devenu, après une simple occupation pour empêcher le début de la construction du nouvel aéroport, une zone d'expérimentation grandeur nature, mais illégale. Et cette situation est justifiée par Camille:

«[On] cherche à réinventer les rapports sociaux, les rapports aux vivants, dans un monde qui va droit dans le mur. Dans un monde qui est en pleine crise climatique, sociale, et qui a besoin de solutions, qui a besoin d'espaces d'expérimentation qui puisse être emblématique.»

La vie actuelle de la ZAD serait donc une solution de demain pour lutter efficacement contre le changement climatique et les problèmes sociaux. Les zadistes voient d'ailleurs leur projet comme un emblème d'une nouvelle façon de vivre qui ferait échec au Système consumériste. La défense de l'environnement contre la création d'un projet de construction d'une plate-forme aéroportuaire s'est donc transformé:

«On a combattu en premier lieu [pour] préserver ce bocage face un projet destructeur, face à un projet climaticide, face à un projet qui allait saccager des terres agricoles, des zones humides, des forêts, etc. Ensuite, une fois que ce projet sera abandonné, cela fait des années qu'on construit un projet pour l'avenir de ce territoire.»

Si l'exécutif a toujours reconnu avoir des doutes sur ce projet d'aéroport, et qu'il pouvait abandonner cette idée, en revanche, le gouvernement a rappelé que la ZAD devra être évacuée. Encore un dossier qui pourra permettre à Emmanuel Macron d'appliquer son «en même temps»: abandon du projet d'aéroport à Notre-Dame-des-Landes et évacuation de la ZAD.

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Cependant, si le gouvernement souhaite rétablir l'État de droit, les forces de l'ordre ne devront pas seulement faire évacuer les 300 résidants de la zone, mais aussi affronter des milliers de personnes, parfois violentes qui pourraient débarquer en quelques heures afin d'aider ces habitants à conserver ce territoire emblématique. Refusant d'évoquer ces possibles affrontements, Camille se veut très positif sur l'action future du gouvernement:

«Si le gouvernement décide d'évacuer la zone, nous, après, on a un autre projet. Donc après c'est en débat, comme cela a toujours été. Hier, le gouvernement voulait faire un aéroport et s'est rendu compte au fil des années que c'était absurde, qu'il ne fallait pas aller dans ce sens-là. Il annonce demain qu'il évacuera la zone. Nous on aura ce projet à mettre face à celui du gouvernement.»

Avant de conclure:

«On peut espérer à un moment qu'un gouvernement sorte d'une unique voie répressive. Quand des gens essayent de transformer positivement un territoire, il faut faire entendre au gouvernement qu'il y a d'autres solutions que la répression. […] Cela fait des années qu'on vit sous la menace de l'arrivée possible, un jour, des forces de l'ordre. Ils ne sont pas revenus depuis 2012.»

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