Grâce au laser, les laboratoires reçoivent des flux d'énergie d'une puissance comparable à celle d'une explosion nucléaire et peuvent refroidir l'environnement à des températures extrêmement basses. L'invention du laser a eu une telle importance que ses créateurs ont reçu des prix Nobel pour leurs travaux. L'un des pères scientifiques du laser, le physicien soviétique Nikolaï Bassov, aurait fêté son 95e anniversaire le 14 décembre.
Au moment du passage des électrons au niveau supérieur ou inférieur, un quantum de lumière est respectivement absorbé ou émis: c'est un photon qui représente la plus petite portion d'énergie des vagues électromagnétiques. Sachant que si le rayonnement est forcé, c'est-à-dire engendré par un stimulus extérieur, certains paramètres de fluctuation des photons sont identiques. Cela permet d'atteindre l'étroit diapason de longueurs d'ondes caractéristique de la lumière laser.
Pour qu'un atome émette des photons, les électrons doivent passer au niveau inférieur. Et pour cela, il faut d'abord les envoyer aux niveaux supérieurs par un stimulus extérieur. Les physiciens appellent ce processus «pompage» ou «excitation». L'atome où les électrons occupent des niveaux plus élevés est dit excité.
Les atomes excités émettront de la lumière en permanence si un retour permanent des électrons est garanti. Le rayonnement forcé, une fois apparu, doit provoquer encore et encore un saut d'électrons au niveau supérieur une fois qu'ils ont émis des photons. Pour cela l'environnement émissif, par exemple un cristal, est placé dans un résonateur optique selon un système à deux miroirs. Le résonateur assure une production multiple d'ondes lumineuses, ce qui permet d'atteindre une forte puissance de rayonnement — c'est-à-dire une augmentation du nombre de photons.
Du maser au laser
En mai 1952, pendant la Conférence nationale de radiospectroscopie, Nikolaï Bassov et son directeur scientifique Mikhaïl Prokhorov ont présenté un rapport sur la possibilité d'utiliser un rayonnement forcé pour renforcer et générer des ondes millimétriques. Pratiquement en même temps, une telle hypothèse a été avancée par le physicien américain Charles Townes à l'université Columbia.
"En juillet 1954, le magazine Physics Review Letters a publié un article de Charles Townes, James Gordon et Herbert Zeiger qui a été reçu par la rédaction le 5 mai 1954. Cet article annonçait "la création et le fonctionnement d'un dispositif expérimental pouvant être utilisé en tant que spectromètre à micro-ondes à haute résolution, amplificateur à micro-ondes ou comme un générateur très stable". Il s'agissait de la première mention du générateur moléculaire: le maser", explique le professeur Evgueni Protsenko de la chaire de physique laser du MEPhI (Institut d'ingénierie physique de Moscou) de l'Université nationale de recherche nucléaire.
La première source de rayonnement électromagnétique fonctionnant aux passages de la molécule d'ammoniaque émettait une onde lumineuse de 1,25 cm. Le dispositif a été appelé maser — une contraction de "microwave amplification by stimulated emission of radiation". Le prédécesseur du laser a été conçu en parallèle et indépendamment par deux groupes de recherche: à l'Institut physique Lebedev de l'Académie des sciences de l'URSS sous la direction de Nikolaï Bassov et de Mikhaïl Prokhorov, et à l'université Columbia sous la direction de Charles Townes.
"Les deux groupes ont proposé et ont créé un maser à ammoniaque en même temps, comme l'indique le prix Nobel. Étonnamment, malgré l'immense différence des conditions de départ — la vie pacifique aux USA et les années de guerre et d'après-guerre en URSS — les deux groupes de recherche ont tout de même "égalé le score" et ont fait une découverte en même temps, récompensée à sa juste valeur", partage le professeur Iossif Zoubarev de la chaire de physique laser du MEPhI, qui a travaillé avec Nikolaï Bassov.
En fait le laser (light amplification by stimulated emission of radiation — amplification de la lumière par rayonnement forcé) est apparu seulement six ans après la création du maser. C'est le temps qu'il a fallu pour trouver les matériaux et les technologies permettant d'obtenir le diapason d'ondes de rayonnement laser — de 0,1 à 1000 micromètres.
"Le 16 mai 1960, au laboratoire Hughes (Culver City, Californie, USA), le physicien Theodore Maiman a réuni les conditions nécessaires à l'apparition du rayonnement induit. Le chercheur a utilisé une lampe à gaz à décharge entourant un cristal de rubis de 1,5 cm de long et de près de 1 cm de diamètre. Le spectre de rayonnement du rubis s'est alors légèrement réduit, ce qui témoignait d'un rayonnement lumineux forcé. Le laser était né", explique Andreï Kouznetsov, directeur par intérim de l'Institut de technologies laser et plasma du MEPhI.
Nikolaï Bassov, diplômé du MEPhI — anciennement connu comme Institut mécanique de Moscou — y a créé et dirigé en 1978 la chaire d'électronique quantique. Depuis 2016, le travail commencé par le prix Nobel est poursuivi par l'Institut de technologies laser et plasma du MEPhI réunissant plusieurs chaires.
Récemment, un groupe de théoriciens de cet institut a prédit qu'une puissante impulsion laser pourrait créer dans le plasma des champs magnétiques avec une tension jusqu'à des dizaines de millions de gauss, c'est-à-dire bien supérieure à celle obtenue par d'autres méthodes. En septembre 2017, cette hypothèse a été confirmée par un groupe international de chercheurs à l'Institut d'étude des ions lourds en Allemagne (GSI), au sein duquel travaillaient également des étudiants du MEPhI.