Washington a l’air de comprendre que sa prétendue victoire en Syrie n’est pas assez persuasive pour démontrer au monde entier que les États-Unis sont une grande puissance. Le Président américain Donald Trump a déclaré vendredi en Floride que les victoires dans les deux Guerres mondiales appartenaient aux États-Unis.
«Nous sommes la nation qui a creusé le canal de Panama, gagné deux Guerres mondiales, envoyé l’homme sur la Lune et mis le communisme sur les genoux», a indiqué M.Trump cité par la chaîne de télévision Fox Business, avant d’adresser des appels encourageants à ses partisans.
Déclarant que les États-Unis ont remporté les deux Guerres mondiales, le dirigeant de ce pays a minimisé le rôle joué par d’autres pays dans ces deux conflits. Un petit brin d’histoire pour remettre les choses au clair.
Première Guerre mondiale
Ils ne sont entrés en guerre contre l’Allemagne qu’au printemps 1917, suite au naufrage du paquebot britannique Lusitania reliant les États-Unis à l’Angleterre et torpillé par un sous-marin allemand au large de l’Irlande.
Affirmant que les États-Unis ont gagné la guerre 1914-1918, M.Trump a probablement oublié le rôle des autres pays et notamment de la France, dont le territoire a été dévasté par quatre ans de combats ou de la Russie dont le corps expéditionnaire a combattu en France et à Salonique, sur le front d'Orient. La résistance des Français a permis de stopper l’offensive allemande et de lancer une contre-offensive lors de la seconde bataille de la Marne en 1918.
Les soldats américains envoyés en nombre en Europe ont certes contribué à la victoire. Mais la fin de la guerre est surtout devenue possible après la sortie de l’Empire russe qui allait s’effondrer en 1917 suite à deux révolutions – d’abord bourgeoise et puis bolchévique.
Les États-Unis et le communisme
La révolution d’octobre 1917, qui a porté au pouvoir les bolchéviks dirigés par Vladimir Lénine et Léon Trotski, et qui a influé sur le déroulement de la Première guerre mondiale, aurait été orchestrée d’outre-mer. Antony Cyril Sutton, économiste et historien britannique, a établi des liens entre capitalistes américains et les communistes russes. Il affirme notamment dans son ouvrage Wall Street et la Révolution bolchévique que le révolutionnaire Léon Trotski, dont l’objectif était de renverser le gouvernement russe, a voyagé avec un passeport officiel américain pour rejoindre Vladimir Lénine en Russie en 1917 et que les banques de Wall Street auraient participé à l’acheminement illégal d’or bolchevique vers les États-Unis.
Les États-Unis, pensaient-ils ainsi mettre «le communisme sur les genoux» selon l’expression de Donald Trump? Ils voulaient plutôt aider les pays déjà engagés dans la guerre pour éviter d’intervenir directement dans le conflit.
Seconde Guerre mondiale
Les Etats-Unis n’ont abandonné leur neutralité qu’après l'attaque de l’aviation japonaise contre leur base de Pearl Harbor le 7 décembre 1941. A cette époque, l’Allemagne nazie avait déjà envahi la plus grande partie de l’Europe et une partie de l’URSS, alors que le Japon avait introduit ses troupes en Chine et en Malaisie.
Les principales opérations militaires des États-Unis se sont déroulées dans le Pacifique où ils ont largué deux bombes atomiques sur les villes japonaises de Hiroshima et Nagasaki.
Quant au théâtre européen, c’est l’URSS qui y a assumé le rôle d’adversaire principal du Troisième Reich.
Le futur Président américain Harry Truman a dit en 1941: «Si l'Allemagne gagne, nous devons aider la Russie. Et si la Russie gagne, nous devons aider l'Allemagne, afin qu'il en meure le maximum de chaque côté». L’industriel et homme politique Henry Ford partageait cette position: «Ni les Alliés, ni l'Axe ne devraient gagner la guerre. Les États-Unis devraient fournir aux deux camps les moyens de continuer à se battre jusqu'à ce que tous deux s'effondrent».
L’URSS, les États-Unis et le Royaume-Uni se sont entendus sur l’ouverture d’un second front dès 1942, mais il a fallu attendre 1943 pour voir le débarquement des Alliés en Sicile et 1944 pour le grand débarquement américano-britannique en Normandie. A l’époque, la plus grande partie de l’Europe était déjà libérée par les troupes soviétiques qui progressaient vers Berlin. D'ailleurs, les militaires américains ont participé au débarquement en Afrique du Nord en novembre 1942. Mais pourquoi les États-Unis ne sont-ils pas entrés en guerre en décembre 1941, au moment où ils l’ont fait dans le Pacifique? On a l’impression que les Américains ne pouvaient, à aucun prix, laisser l'Union soviétique libérer l'Europe seule.
Selon Alexeï Pouchkov, journaliste et membre du Conseil de la Fédération (Chambre haute du parlement russe), Washington n’a pas joué le premier rôle pendant les deux guerres.
«En évaluant le rôle historique des États-Unis, M.Trump devrait se souvenir qu’ils ont joué un rôle auxiliaire dans la Première Guerre mondiale. Pendant la Seconde Guerre mondiale, ils n’auraient pas vaincu Hitler sans l’URSS», a-t-il écrit sur Twitter.
При оценке историч.роли США Трампу надо бы помнить: в 1-ю мировую их роль была вспомогательной, во 2-й они не победили бы Гитлера без СССР.
— Алексей Пушков (@Alexey_Pushkov) 9 декабря 2017 г.
Le slogan «Make America great again», utilisé par Ronald Reagan et Bill Clinton, est redevenu populaire pendant la campagne présidentielle de Donald Trump. Mais les tentatives de réviser l’histoire du siècle dernier, sont-elles le bon moyen?
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