«On est actuellement dans une très grande confusion sur ce que signifierait expérimenter le revenu de base», estime l'économiste Henri Sterdinyak.
«Qu'est-ce qu'on va faire de plus? Comment on finance la prestation? Le RSA existe déjà. Le montant est relativement faible, mais les départements ont déjà beaucoup de mal à le payer. Donc on peut toujours dire qu'on va le doubler et le donner à tout le monde, le problème ensuite c'est comment on récupère cet argent? s'interroge Henri Sterdyniak. On ne voit pas très bien ce que pourrait donner cette expérimentation.»
L'ambitieux et novateur projet ne serait-il alors qu'un «relifting» d'allocations existantes? Une certaine confusion semble régner chez nos confrères quand ils l'évoquent, mettant sur le même plan revenu de base et revenu universel.
«Si le projet est simplement de rendre plus facile l'accès au RSA, c'est-à-dire avoir un revenu minimum garanti plus facile à obtenir, oui c'est possible, mais il faut bien préciser le projet qu'on veut effectivement analyser: ce n'est pas un revenu universel, ce n'est pas donner 700 ou 800 euros par mois à tout le monde, même aux gens qui n'en ont pas besoin», analyse Henri Sterdinyak.
Henri Nayrou, président du conseil départemental d'Ariège, confirme d'ailleurs que le projet des huit départements n'a. rien à voir avec le «très décrié revenu universel». Ce dernier se veut inconditionnel et versé dès la naissance. Le revenu de base lui, ne concernerait pas toute la population française:
«C'est très extrêmement difficile de l'expérimenter dans quelques départements, parce qu'il faut que ce soit équilibré. Ce qu'on donne aux plus pauvres, il faut d'une manière ou d'une autre le prendre aux plus riches. C'est un projet qui est flou, car s'il est question de donner par exemple 1000 euros à tout le monde, il y a un coût fabuleux, et la question se pose de comment on va récupérer ce coup fabuleux sur les plus riches.»
Mais pour l'instant, on ne connaît ni le montant de ce revenu de base ni la population ciblée. Et pour cause, les départements doivent d'abord étudier «les bas revenus en France pour connaître plus finement les réalités sociales. Élaborer un modèle robuste, crédible scientifiquement, audacieux socialement et soutenable financièrement grâce à des microsimulations».
En effet, lancer in vivo une telle expérience suppose de faire évoluer le cadre législatif. Si Emmanuel Macron a promis aux maires une modification de la Constitution pour permettre les expérimentations locales, elle n'est pas encore inscrite au calendrier parlementaire.