La Russie n'a pas encore annoncé les principes et les critères qui guideront la conception de ses avions de 6e génération, selon la chaîne Zvezda. Il pourrait sembler prématuré d'entamer une discussion sur la 6e génération de chasseurs alors que la 5e génération n'est pas encore entrée en service. Mais cela fait sens quand on sait que les USA et la Chine ont déjà lancé le développement de tels projets. En Russie, certains spécialistes indiquent qu'il est trop tôt pour parler de la création d'un chasseur de 6e génération car on en est actuellement au stade des idées et de la mise en forme, d'autres affirment que les travaux avancent activement, que l'appareil effectuera son premier vol en 2023-2025 et sera entièrement prêt pour 2030. On a pu entendre également que le chasseur de 6e génération s'appellerait MiG-41 et qu'il ferait son apparition après 2035.
L'intelligence artificielle s'invite dans le nouvel escadron
Selon le peu d'informations officielles rapportées par les représentants de l'industrie de l'armement, les travaux sur le nouveau chasseur russe de 6e génération ont effectivement commencé. Il est prévu de le construire en deux versions: avion habité et drone.
En ce qui concerne la tactique d'exploitation, selon les spécialistes, les deux versions de l'appareil agiront le plus efficacement en groupe, au sein d'un escadron qui sera composé d'avions habités et de drones. Les premiers, prévus pour un ou deux pilotes, rempliront le rôle de poste de commandement pour trois ou quatre drones (aujourd'hui le MiG-31BM est utilisée de cette manière, mais en version habitée).
Le moment du passage du contrôle d'un escadron d'avions à un autre sera crucial. Par exemple, quand un pilote remplira ses missions avec son groupe d'appareils et que son escadron aura été sérieusement touché, un autre agissant à des milliers de kilomètres de lui pourra prendre le contrôle des deux groupes ou partager ses avions. Étant donné que les appareils développent une vitesse hypersonique et peuvent sortir dans l'espace circumterrestre, cela pourra être accompli rapidement.
En matière de performances techniques, les ingénieurs comptent utiliser le meilleur système jamais utilisé dans les appareils russes pour assurer une manœuvrabilité et une vitesse exceptionnelles. La vitesse maximale prévue atteindra Mach 5, et la vitesse de croisière, sans postcombustion, dépassera Mach 2.
Les analogues soviétiques ont rencontré les mêmes problèmes: le M-50 (code Otan: Bounder), bombardier supersonique soviétique du bureau d'étude Miassichtchev dont l'unique exemplaire a décollé en 1959, a évolué en projet M-52 mais n'a jamais accompli le cycle intégral des essais de vol. Le 9 juillet 1961, il a participé au défilé aérien de Touchino, et à la fin des années 1970 il a été recyclé.
Le T-4 (projet 100) a connu le même scénario: le bombardier de reconnaissance et d'attaque du bureau d'étude Soukhoï, surnommé le «Valkyrie russe» et dont le premier prototype a décollé le 22 août 1972, avait été conçu pour détruire des groupes aéronavals et mener des missions de reconnaissance stratégique. Mais après dix vols réussis, le projet a été fermé et tous les fonds ont été alloués à la conception du Tu-160.
D'autres facteurs — notamment le lobbying — ont également joué leur rôle dans l'abandon de ces projets, mais le prétexte officiel était toujours d'ordre technique.
Ces dernières années, on constate en Russie un progrès dans la création de tels matériaux, mais le pays est tout de même en retard sur l'Occident. Or, pour pallier le problème de la grande vitesse, il faut d'abord régler celui de la création de matériaux ultrarésistants capables de supporter de hautes températures. Et ils ne sont pas nécessaires uniquement pour une puissante isolation thermique de la cabine ou de la cellule de l'avion, qui est soumis à grande vitesse à une puissante friction avec l'air, mais également pour les moteurs, qui ont besoin d'une protection contre l'air surchauffé arrivant par les prises d'air.
D'après les spécialistes, toutes ces questions doivent être réglées en croisant différentes sciences et technologies — et constituent aujourd'hui le principal problème.
Un avion furtif ultramaniable
La conception d'un avion de nouvelle génération pose également la question de la furtivité car l'appareil doit être protégé non seulement contre les systèmes antiaériens et les radars actuels, mais également leurs futures évolutions.
En matière de furtivité, la Russie et les USA ont longtemps adopté des positions foncièrement différentes. Les Américains pensaient que, dans la conception des avions, leur ultramaniabilité pouvait être sacrifiée au profit de la furtivité. Mais les ingénieurs russes n'étaient pas de cet avis.
En effet, un tel avion ne peut pas embarquer une grande quantité d'armements parce qu'ils sont nécessairement cachés dans le fuselage (les points d'emport démasquent l'appareil). Il est également limité en termes de vitesse et d'autonomie de vol et, enfin, il doit utiliser son radar avec beaucoup de prudence, voire ne pas en disposer du tout puisque le rayonnement du radar trahit même l'avion le plus furtif.
Mais ce qui distingue surtout l'approche russe est que, selon les spécialistes, l'ultramaniabilité acquiert de plus en plus d'importance dans l'aviation militaire contemporaine. Plusieurs facteurs y contribuent: le développement de la localisation radar, la création de nouveaux radars à haute fréquence, ainsi que la perte par les USA de leur monopole dans le domaine des avions de nouvelle génération.
Certes, les technologies furtives n'attendent pas et s'améliorent rapidement. Mais il ne faut pas non plus oublier que la localisation radar et les systèmes de guerre électronique évoluent tout aussi rapidement. De nos jours, un combat aérien est un affrontement invisible de rayons électromagnétiques à une distance de plusieurs centaines de kilomètres, dans lequel les avions peuvent apparaître au tout dernier moment sur le champ de bataille. Cet effet de surprise, comme auparavant, constitue déjà la moitié du succès. D'après les spécialistes russes, il est possible d'y parvenir par des moyens plus fiables, simples et bon marché que les technologies furtives. Sachant que, comme disent les professionnels, personne n'a l'intention de renoncer à ces technologies: il ne faut simplement pas les rendre prioritaires au détriment de caractéristiques opérationnelles plus importantes.
L'armement de l'avion du futur
Vladimir Mikheev, conseiller du premier directeur général adjoint de la compagnie Technologies radioélectroniques (KRET), a récemment déclaré que les chasseurs de 6e génération seraient armés de canons électromagnétiques à hyperfréquence capables de neutraliser les appareils électroniques de l'ennemi. Mais il reconnaît aussi qu'il s'agit d'un «avenir lointain».
Les médias occidentaux évoquent également déjà la protection laser du futur chasseur russe — il s'agit de lasers pour détruire les missiles guidés de l'ennemi. Par exemple, le quotidien britannique Daily Mail écrit que ces dispositifs puissants «brûleront les yeux» des missiles ennemis en détruisant leurs têtes guidées.
De plus, le nouvel avion sera évidemment équipé d'un système de lutte contre la guerre électronique. Chaque bloc neutralisera les systèmes ennemis tout en transmettant des données et pourra accomplir plusieurs actions simultanément. Par exemple, le même instrument sera à la fois un radar, un système de guerre électronique, un dispositif de transmission de données et un moyen de communication, tout en remplissant des fonctions de navigation et de reconnaissance. Il s'agira d'un puissant ordinateur muni, à l'entrée et à la sortie, de dispositifs de réception et d'émission. De plus, un tel bloc pourra fonctionner en tenant compte des actions collectives de tout le groupe.
Le nouveau chasseur américain
A en croire les sources ouvertes, les USA auraient pris de l'avance sur la Russie dans le développement du chasseur de 6e génération. On sait notamment déjà que cet appareil est conçu par Boeing, que le projet s'appelle F/A-XX, devrait aboutir en 2030 et remplacer les chasseurs embarqués F/A-18E/F Super Hornet.
L'aspect de l'avion est également connu depuis 2009, quand sa maquette avait été présentée pour la première fois. Il a été retravaillé et modifié mais les points fondamentaux sont restés inchangés: il s'agira d'une aile volante dépourvue d'ailerons verticaux — car la queue crée une résistance aérodynamique supplémentaire. Les virages sont effectués à l'aide de leviers de gabarit réduit installés sur l'aile. En vol linéaire, les leviers sont rentrés et sortent uniquement pour les manœuvres.
Le dragon russe pour la Chine
La version chinoise de l'avion de 6e génération en est un chasseur polyvalent baptisé Dragon de feu. Selon les médias chinois, la percée technique dans la conception de cet appareil n'a été possible que grâce aux chercheurs et aux ingénieurs russes qui travaillent pour la Chine. Ils écrivent que plusieurs dizaines de concepteurs russes participent au projet du Dragon de feu, et ont significativement avancé.
On affirme que le Dragon de feu est l'avion le plus avancé de sa classe et qu'il pourrait faire concurrence à ses analogues russes et américains par ses différentes caractéristiques techniques. Tout comme dans l'avion russe de 6e génération, le Dragon de feu parie sur la manœuvrabilité, ce qui n'est pas étonnant puisque l'école militaire et d'ingénierie russe a été littéralement prise pour base. La manœuvrabilité de l'appareil lui permettrait même de réaliser la figure de voltige «Cobra de Pougatchev».
D'autres technologies de pointe utilisées sur l'avion portent sur les équipements pour parer les attaques de chasseurs, les systèmes de contrôle et un radar améliorant la précision du tir sur des cibles au sol.
Il est prévu d'équiper l'avion d'un laser capable, pendant un combat de missiles, d'intercepter et de suivre un objectif. Le mécanisme de contrôle de l'armement est dans l'ensemble très au point. Hormis les lasers, il comprend des dispositifs optiques, un système radar de visée et un tout nouveau système de navigation.
En outre, écrit l'agence de presse Shanghai News, «le radar Doppler à impulsion détecte et suit les cibles terrestres et aériennes, y compris les grands objets aériens. Il est capable de bloquer plusieurs cibles dangereuses les plus proches. A l'arrière, le dispositif est équipé d'un équipement radioélectronique spécial. Au pointage, le système radar permet d'identifier l'appartenance nationale de la cible. L'antenne peut voir un chasseur devant à 150-180 km, et derrière jusqu'à 90 km, elle permet également de détecter des chars dans un rayon de 60-90 km et une cible navale à 150-180 km. Le radar de l'avion peut suivre 20 cibles aériennes simultanément et attaquer en même temps les 8 cibles les plus proches.»
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En s'appuyant sur toutes les informations disponibles sur le développement des avions de 6e génération dans différents pays, on peut tirer une conclusion préalable: l'avion russe et l'avion chinois possèdent plusieurs solutions identiques et pourraient se rassembler. Alors que les avions russe et américain de nouvelle génération se distingueront fortement aussi bien en apparence que dans leur utilisation.
Les opinions exprimées dans ce contenu n'engagent que la responsabilité de l'auteur de l'article repris d'un média russe et traduit dans son intégralité en français.