L'application de l'article 155 de la Constitution approuvée par le Sénat espagnol a ouvert au gouvernement de Mariano Rajoy la voie de la destitution de Carles Puigdemont, président de la Généralité de Catalogne, et du gouvernement de l'autonomie dans son ensemble. Le parlement régional a été également destitué et de nouvelles élections ont été annoncées.
Mme Hernandez estime qu'il y a quatre questions permettant de mieux comprendre l'évolution possible de la situation en Catalogne.
1. Pourquoi a-t-on tardé à appliquer l'article 155?
L'application de l'article 155 de la Constitution espagnole autorisant le gouvernement central à s'ingérer dans les affaires des régions autonomes était à l'ordre du jour depuis la tenue du référendum organisé par la Généralité le 1er octobre. Cependant, le Sénat ne l'a approuvée que le 27 octobre.
Selon Mme Hernandez, les tergiversations tiennent à plusieurs raisons, notamment aux divergences entre les partis espagnols. Malgré la majorité absolue au Sénat, l'application de l'article 155 demandait le soutien d'autres forces, «en l'occurrence, du parti Ciudadanos et du Parti socialiste ouvrier espagnol (PSOE), ce dernier ayant mis trop de temps à aboutir à un consensus.
«La situation en lien avec la Catalogne a provoqué de vives discordes entre les partis espagnols traditionnels, ainsi que parmi les partis catalans, même au sein des partisans de l'indépendance», signale Mme Hernandez.
«Cela n'a pas ouvert la voie des négociations. L'absence d'un dialogue a conduit le Parti populaire au pouvoir à faire bloc avec les Ciudadanos et le PSOE. Ensemble, ils ont reçu la majorité au Congrès des députés et au Sénat et ont fait adopter une décision sur l'article 155», signale l'universitaire.
2. Qu'adviendra-t-il de Carlers Puigdemont?
Peu après l'approbation de l'article 155, Mariano Rajoy a annoncé la destitution du président de la Généralité, Carles Puigdemont. Ce dernier n'a cependant pas reconnu cette décision et se considère comme légitimement élu à ce poste en 2016. En outre, il a appelé les Catalans à s'opposer à la décision de Madrid.
Le procureur général l'a accusé de rébellion et de sédition, ainsi que de malversation de fonds lors du financement du plébiscite du 1er octobre. Soit dit en passant, le prédécesseur de Puigdemont, Artur Mas, avait été accusé des mêmes crimes après le référendum non contraignant du 9 novembre 2014.
Puigdemont, pourrait-il se retrouver derrière les barreaux? Beatriz Hernandez estime que personne ne sera arrêté, mais il s'agit de «porter une accusation et de prononcer un verdict». La peine pourrait aller jusqu'à 15 ans de prison.
«Pour qu'il s'agisse d'une telle peine, il aurait fallu qu'il ait une révolte avec la prise de médias, des chemins de fer, des aéroports, ce qui ne s'est pas produit. Dans ce cas, la peine maximale aurait été, en effet, de 15 ans aussi bien pour les chefs du gouvernement catalans que pour certains députés ayant voté au parlement», explique la Chilienne.
3. Qu'est-ce qui se passera lors des élections du 21 décembre en Catalogne?
«La Catalogne est divisée et polarisée. Ainsi, 43% de l'électorat a participé au référendum. Seuls 38% ont voté pour la sécession (90% des participants au vote se sont prononcés "pour"). Nous parlons d'une minorité», rappelle Beatriz Hernandez.
De son avis, une «majorité silencieuse» se prononce pour l'unité avec l'Espagne comme cela ressort des récentes manifestations anti-indépendance en Catalogne.
Cependant, il est peu probable que la crise catalane se dénoue le 21 décembre, notamment à cause de la polarisation de la société.
«Le gouvernement attend que le 21 décembre les voix en faveur de l'indépendance diminuent et que le nombre de Catalans souhaitant rester au sein de l'Espagne augmente», estime l'universitaire ajoutant que ceci est un bon signal indiquant que le climat pré-électoral est en faveur de l'unité.
4. Quel avenir attend les communautés autonomes espagnoles?
Le climat électoral serré ne résoudra pas les contradictions existant entre Madrid et Barcelone. Selon Beatriz Hernandez, «une réforme du système d'autonomies espagnoles serait une solution à long terme», cette réforme devant concerner toutes les régions du pays.
«Vous ne pouvez pas continuer à avoir des tensions avec la Catalogne qui se maintiendront parce que les indépendantistes se sentent frustrés. Leur mouvement est très fort et pour l'apaiser il faut d'autres mesures qui doivent être politiques et à long terme», conclut Mme Hernandez.