Airbus prend donc le contrôle du programme moyen-courrier de l'avionneur canadien et s'engage à mettre à son service sa puissance commerciale. Cet accord devrait lui ouvrir certains marchés, notamment en Chine. Et là, on pourrait bien crier victoire à juste raison.
Marc German, spécialiste en intelligence compétitive et en diplomatie d'entreprise, nous rappelle que toute victoire — qui n'est que partielle — de cette envergure est le fruit de nombreux tâtonnements tactiques et jeux stratégiques entre les partenaires potentiels:
«Il faut qu'il y ait une corrélation entre l'investissement que cela représente et le marché auquel on veut s'adresser et, surtout, savoir si on n'est pas en train d'introduire sur le marché un futur compétiteur. Le but est d'étendre un peu la gamme de ce qu'on propose et non de faire monter à bord quelqu'un pour combler un chaînon manquant».
Le combat que l'américain Boeing et l'européen Airbus, qui s'accusent mutuellement d'avoir bénéficié d'aides étatiques, se livrent devant l'Organisation mondiale du commerce n'est que l'arbre qui cache la forêt des conflits politiques et commerciaux entre Washington et Bruxelles.
«Dans la guerre économique qui opposent depuis des décennies les Etats-Unis, qui veulent un monde unipolaire, et le reste du monde, il y a des résistances».
De toute façon, Airbus a d'ores et déjà annoncé qu'il allait agrandir son usine de Mobile, en Alabama, pour produire les CSeries destinés au marché américain. Il s'en sort par une pirouette: l'appareil ne serait ainsi plus considéré comme canadien, mais bien comme américain…
Quoi qu'il en soit, il est quasi certain que cette alliance avec Bombardier permettra à Airbus de mieux concurrencer Boeing sur le segment des monocouloirs, tout en tenant à bonne distance l'avionneur chinois Comac.