Assignations à résidence: vers une «République des suspects»?

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L’Assemblée nationale a adopté dans la nuit de mardi 26 à mercredi 27, l’article 3 du projet de loi antiterroriste portant sur l’assignation à résidence hors d’état d’urgence, de personnes suspectées de sympathie avec des mouvances terroristes. Une mesure qui a suscité de nombreuses critiques.

Après de vives tensions, l'Assemblée nationale a finalement adopté dans la nuit de mardi 26 à mercredi 27, l'article 3 du projet de loi antiterroriste qui permettra au ministère de l'Intérieur de prendre des «mesures individuelles de surveillance». Autrement dit, des assignations à résidence hors état d'urgence pour les personnes suspectées d'avoir des sympathies avec des mouvances terroristes — sans toutefois avoir suffisamment d'éléments pour les poursuivre en justice.

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La principale «nouveauté» de cet article de loi réside dans le périmètre de l'assignation qui s'étendra au minimum à la commune, au lieu du seul domicile, afin de permettre à la personne suspectée de continuer sa vie professionnelle et personnelle. Par ailleurs, dans certains cas, le périmètre pourra être étendu au département, sous réserve que l'individu accepte le port d'un bracelet électronique. En outre, les suspects devront se rendre au poste de police une fois par jour contre trois fois par semaine comme prévu dans le cadre de l'état d'urgence. Ce sont tous ces éléments qui ont cristallisés les débats. En effet, pour une partie de la gauche nous entrons dans la «République des suspects», tandis que pour la droite, ces assignations à résidence sont des «assignations au rabais» qui ne sont pas à la hauteur de la menace. Cette nouvelle mesure est-elle efficace et peut-elle empêcher le passage à l'acte?

Pour Alain Chouet, ancien officier de renseignement français, cette interrogation est légitime au vu des évènements passés.

«Il n'y a pas grand-chose qui permette d'empêcher le passage à l'acte. On l'a vu à Saint-Etienne-du-Rouvray avec l'assassinat d'un prêtre par quelqu'un qui était assigné à résidence et sous bracelet électronique dans sa propre commune.»

Les risques de transcrire dans le droit commun des dispositions prévues dans le cadre de l'état d'urgence sont multiples, même si nécessaires, comme l'explique Alain Chouet.

«On peut toujours multiplier les mesures de précaution et de prévention, c'est bien car il faut le faire, mais il ne faut pas que cela se transforme en un système permanent de restrictions des libertés publiques (…) le problème est que l'assignation à résidence a servi à autre chose qu'à la lutte contre le terrorisme. On l'a vu récemment avec les assignations à résidence de certains militants écologistes au moment de manifestations. On remarque bien que des dérapages peuvent se produire.»

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Pourtant avec ces nombreuses mesures sécuritaires, le gouvernement essaie de trouver des solutions afin de prévenir d'éventuelles actions terroristes. Des solutions jugées néanmoins insuffisantes par les partis d'opposition. Faudrait-il alors se diriger vers un placement en centre de rétention des personnes suspectes, comme le préconise certaines personnalités politiques? Pour l'ancien officier du renseignement français, il faut traiter le problème dès ses origines et accompagner les systèmes de police, notamment en allouant plus de moyens.

«On a un système judiciaire et carcéral qui fonctionne. Centre de rétention, cela veut dire que l'on va fabriquer des Guantanamo chez nous où l'on mettra n'importe qui? Cela ne me paraît pas souhaitable. En revanche, assurer les moyens de nos systèmes de police pour que le suivi des personnes à risque soit fait de façon un peu plus extensive, on peut le souhaiter.»

Et de conclure,
«Le but serait d'avoir une politique étrangère, une politique intérieure, une politique culturelle et sociale qui visent à éradiquer, non pas le risque immédiat car il faut le traiter maintenant, mais plutôt le rayonnement du salafisme et du djihadisme à l'intérieur de nos populations les plus fragiles.»

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