Traînant à peine ses pieds, un garçon marche pendant de nombreuses heures dans les rues, sous une chaleur écrasante, s'arrêtant de temps en temps pour interroger les passants.
«Excusez-moi, je ne veux pas paraître importun, mais peut-être auriez-vous du travail pour moi? J'ai besoin de travailler pour acheter à manger pour ma mère et mes sœurs», ose-t-il enfin demander aux journalistes de Sputnik qui se sont rendus à Deir ez-Zor pour constater de leurs propres yeux la situation actuelle dans cette ville qui a été longtemps sous l'emprise de Daech.
La seule chose qui reste actuellement dans la maison, c'est quelques matelas où dorment la maman et ses enfants. Une des sœurs de Mohammad est gravement malade et les autres essaient de la soulager un peu en lui laissant plus de place. Le garçon a neuf frères et sœurs, dont trois sont nés lorsque la ville était déjà sous l'emprise de Daech. Ils n'ont jamais goûté un fruit ni un légume. Le frère de Mohammad fait partie de la garde républicaine, et pendant toutes ces années il a fait son service pour défendre la ville. Blessé il y a un an, il a rapidement rejoint l'armée, une fois rétabli, afin de gagner un peu d'argent et permettre à sa famille de survivre.
«Parfois, pendant trois, quatre jours, nous n'avions pas de pain dans la ville. Alors, nous buvions l'eau de l'Euphrate et ramassions des feuilles de raisin. Et lorsqu'il n'y avait plus rien, nous mangions de l'herbe qui poussait près de la rivière», se rappelle le garçon.
Pendant les quelques heures que Mohammad a passées avec les correspondants de Sputnik, pas une seule fois il n'a parlé de son père.
«Papa, et quoi, papa? Il ne nous aide jamais. Il vit tout seul et fait des économies pour partir et se marier avec une autre femme. Même si ce n'est pas dans les traditions de l'islam, il le fait tout de même. Il a battu maman et nous aussi, puis il a décidé de refaire sa vie. Nous sommes nombreux, donc il est difficile de nous nourrir tous», répond avec réticence le garçon.
D'après Mohammad, la vie à Deir ez-Zor n'a jamais été facile pour sa famille, et les mœurs des habitants lui semblent trop dures.
«Les gens ici sont très méchants et jaloux par rapport à la religion. Les djihadistes de Daech des mosquées à côté de nous appelaient avant à les soutenir en disant que, de cette façon, nous pourrions expier notre peine devant Allah pour notre infidélité», explique-t-il.
Mohammad rêve de devenir officier dans l'armée lorsqu'il va grandir.
«Ainsi, je pourrai tuer les terroristes qui ont pourri la vie à ma famille et à toute le monde dans le pays. Je pourrai toucher mon salaire pour que ma mère et mes sœurs ne connaissent plus jamais la faim. C'est l'honneur et la dignité», conclut le garçon, les yeux brillants, en frottant ses mains dont l'air et le sable ont fendu la peau.
Grâce au soutien de l'aviation et de l'artillerie, l'armée est parvenue à reprendre plusieurs hauteurs, mettre hors d'usage des équipements des terroristes de Daech et détruire certaines de leurs positions fortifiées.