Progression sur trois fronts
La plus grande ville de l'est de la Syrie, Deir ez-Zor comptait 230.000 habitants avant le début de la guerre. Appelée par les locaux la Perle du désert, cette agglomération occupe une position stratégique sur la rive droite du fleuve Euphrate et constitue un nœud industriel et commercial important. Après la découverte de pétrole dans le désert syrien, elle est devenue le centre d'extraction pétrolière du pays. Mais ce qui importe le plus est que Deir ez-Zor est un carrefour de transport.
Avant le début de la guerre, dans l'agglomération d'al-Jarfa, dans la banlieue de Deir ez-Zor, fonctionnait un aérodrome. Encerclée par Daech pendant plus de trois ans, une garnison des troupes gouvernementales syriennes l'ont tenu pendant de longs mois contre les offensives répétées des terroristes. Des munitions, des denrées alimentaires et des médicaments leurs étaient livrés par les airs. Ce 5 octobre, un détachement des forces spéciales a réussi à percer le blocus. En outre, les troupes gouvernementales contrôlent les quartiers occidentaux de la ville, le reste étant occupé par Daech. C'est ici que se réfugiaient les terroristes fuyant Raqqa (Syrie) et Mossoul (Irak).
Une cible complexe
Ces derniers détachements ont pour but d'écraser les bandes terroristes tentant de se rendre à Deir ez-Zor depuis Raqqa. C'est l'aviation russe engagée en Syrie ainsi que les missiles tirés depuis les navires de guerre déployés en Méditerranée qui dégagent la voie aux troupes syriennes. Ainsi, mardi, la frégate Amiral Essen a tiré des missiles Kalibr sur des cibles terroristes. Or, il serait imprudent de sous-estimer l'ennemi. Les trois groupes d'attaque essuient régulièrement les assauts de flanc de la part de Daech qui contre-attaque à l'aide de kamikazes à bord de voitures-suicides.
«Deir ez-Zor sera une cible complexe pour les troupes syriennes», estime dans son commentaire pour Sputnik l'analyste Anatoli Tsyganok, directeur du Centre de prévision militaire. «Apparemment, les bandes les plus effectives et les mieux équipées s'y sont ressemblées. Il ne faut pas douter que les terroristes ont transformé en forteresses les quartiers qu'ils occupent. Mais en même temps, l'armée syrienne n'est plus celle d'il y a deux ans. Au cours de cette période, on a formé une vingtaine de brigades, leur apprenant les principes de la guerre moderne. Ce sont ces unités, qui ont déjà connu Alep et qui ont l'expérience de mener des combats de rue, qui seront engagées dans la prise de la ville», estime-t-il.
«Je doute que la guerre prenne fin tout de suite après la prise de Deir ez-Zor», estime M.Tsyganok. «Il reste tout de même dans le pays des Syriens sympathisant de Daech. Il existe en outre d'autres groupes terroristes. Les poussées de violence se poursuivront encore une année ou deux. Or, comme le montre l'expérience de la mise en place de zones de désescalade, il est tout à fait possible d'arrêter les tirs».
Cap sur le gouvernorat d'Idlib?
Une fois Deir ez-Zor libérée, le gouvernement syrien s'occuperait apparemment de l'élargissement de ces zones de désescalade. Fateh Hassoun, membre de la délégation des groupes armés syriens aux négociations sur le règlement, avait déjà exprimé son soutien à l'initiative d'en mettre en place une nouvelle à Idlib. Il a tout de même laissé entendre que l'idée serait difficile à être appliquer à cause de la présence dans la région des djihadistes du Front al-Nosra.
Comme l'avait souligné fin août le général Igor Korobov, chef des services de renseignement de l'armée russe, à l'heure actuelle quelque 9.000 terroristes de Daech cherchent à s'emparer de ce gouvernorat du nord-ouest du pays. Il est donc probable, qu'après Deir ez-Zor, l'armée syrienne et les forces aérospatiales russes se fixeront pour objectif le nettoyage d'Idlib et de ses alentours.
«Il ne faut pas se relaxer et laisser sans attention les secteurs où se concentrent les terroristes», a annoncé dans un commentaire à Sputnik le politologue militaire Andreï Kochkine.
Et de citer à titre d'exemple la seconde perte de Palmyre: lors de l'opération visant à libérer la ville d'Alep, Palmyre a été à nouveau perdue, les principales forces étant concentrées dans le nord du pays.