Mais il y a aussi une autre catégorie d'imams: les «prêcheurs de la haine» qui prônent ouvertement dans les mosquées, sur les réseaux sociaux, dans les rues et dans les médias un islam radical et appellent à la haine envers les «infidèles» et l'Occident en tant que tel, pariant sur un large impact public et sans se préoccuper de liens personnels. Par exemple, la semaine dernière, les autorités suisses se sont intéressées au cas d'un imam libyen qui avait reçu 620.000 dollars d'allocations sociales de la part du pays. L'imam Abou Ramadan prêchait pourtant depuis longtemps l'élimination des «ennemis» de l'islam et considérait que les musulmans n'étaient pas soumis aux lois locales.
Interdire ou remplacer?
On a pourtant continué de permettre aux prêcheurs de haine de professer des idées radicales, même si leur expulsion ou des mesures de privation de citoyenneté ont été évoquées. La raison est simple: les autorités craignaient d'être accusées de racisme et d'intolérance. Et cette crainte continue de paralyser l'Europe. Selon certains anciens djihadistes, les principales plateformes de radicalisation, aujourd'hui, sont les prisons où sont placés les imams criminels, ainsi que les écoles. Dans les deux cas, les dirigeants n'agissent pas par crainte de se voir accuser d'oppresser les musulmans.
L'an dernier, le gouvernement danois a décidé de créer une liste noire des imams étrangers connus pour faire la propagande de la haine afin de les interdire de séjour. En mai dernier, le Danemark a officiellement décrété une interdiction contre cinq imams prêcheurs de haine étrangers, et un autre imam du Liban pourrait se retrouver sur cette liste après son prêche à Copenhague.
Aujourd'hui, certains politiciens en Allemagne, en Italie, en France et au Royaume-Uni veulent interdire aux imams de prêcher en arabe pour les forcer à parler dans la langue du pays d'accueil afin de comprendre ce qu'ils disent. Londres refuse d'accorder un visa aux imams venant de l'extérieur de l'UE ne pouvant pas prouver qu'ils maîtrisent l'anglais. Mais ceux qui sont déjà sur le sol britannique ne risquent rien. L'interdiction de l'arabe n'améliorera certainement pas la situation et isolera davantage les musulmans de la société, car une telle démarche serait interprétée comme une oppression et une menace. De plus, les imams prêcheurs de haine s'expriment depuis longtemps dans la langue du pays où ils vivent afin d'attirer de plus en plus de jeunes locaux dans leur orbite. Par exemple, en France, un islamiste sur quatre est un converti pour qui l'arabe n'est pas une langue natale ou parlée.
La haine subventionnée
L'imam prêcheur de haine Anjem Choudary, connu pour son soutien aux actions de Daech et ses déclarations odieuses, par exemple sur la nécessité de transformer le palais de Buckingham en mosquée, a été emprisonné au Royaume-Uni en septembre 2016.
Dans l'ensemble, alors que les attentats se multiplient, on observe en Europe une tendance au durcissement de la législation sur l'incitation à la haine et des tentatives sont entreprises pour placer l'activité des imams sous contrôle. Tout cela rencontre une forte opposition aussi bien des musulmans que des Européens qui considèrent ces mesures comme un abandon des valeurs européennes et une atteinte à la liberté d'expression. Les experts avertissent que la répression de l'activité publique des imams prêcheurs de haine en Europe risque de faire apparaître un plus grand nombre d'imams «discrets», comme El Satty, qui recrutent en cachette et préparent de nouveaux attentats, alors que l'endoctrinement des jeunes se fera par internet.