L’«aventure humaine incroyable» du premier guitariste français en URSS, puis en Russie

© Photo Yann BenoistYann Benoist, guitariste de Space
Yann Benoist, guitariste de Space - Sputnik Afrique
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Dans son voyage en URSS en 1983 il y avait tout : un goût de l’aventure, des rencontres incroyables, des anecdotes et une belle musique. Souhaitant retourner en Russie pour rendre hommage aux artistes qu’il a accompagnés sur scène, Yann Benoist, le «premier guitariste français» à jouer en Union soviétique avec Space, livre ses souvenirs à Sputnik.

Grand passionné de musique, Yann Benoist n'arrive pas à mesurer sa chance lorsqu'il est choisi pour accompagner le groupe légendaire français de musique «cosmique» Space, fondé par un compositeur et musicien français très connu à l'époque, Didier Marouani. Ayant fait avec lui, de nombreuses tournées, y compris en URSS puis en Russie où Space était très apprécié du public, Yann avoue avoir été impressionné par un pays qu'il ne connaissait que par les actualités des médias.

«Cette série de concerts avec Space me semble même aujourd'hui incroyable. L'URSS, "les communistes", Lénine, Staline, le pays des Tsars, quel programme… C'était la première fois qu'une tournée de cette importance est organisée par les autorités de l'Union des Républiques Socialistes Soviétiques. C'était essentiellement instrumental, dans l'esprit des Pink Floyd, Tangerine Dream et Kraftwerk avec seulement quelques chansons interprétées en anglais par Jani Loseth, le guitariste chanteur du groupe norvégien Titanic», confie Yann Benoist à Sputnik ajoutant d'être particulièrement heureux d'être «embarqué dans ce voyage à l'Est».

Alors que d'autres tournées vont plus tard s'enchaîner, c'est cette première fois en 1983 qui restera à jamais gravée dans sa mémoire.

«En 1983, chez nous, en France, nous n'avions pas de salle immense. À Moscou, sur la scène du Stade olympique, nous avions à disposition d'énormes moyens de sonorisation, lumières, show laser: la tournée a été un véritable phénomène musical et social, les places se vendaient au marché noir! Les autorités ont pour la première fois programmé une tournée au gigantisme impressionnant. La musique et les concerts ont frappé l'imagination des spectateurs qui découvraient pour la première fois l'utilisation des lasers en concert. Ils en reparlent encore aujourd'hui», affirme Yann Benoist.

Mais parmi les choses qui l'ont le plus impressionné à l'époque, ce sont les forces de l'ordre déployées dans la salle de concert et aux alentours pour assurer la sécurité de quelque 40.000 personnes pour chacun des neuf concerts programmés à Moscou dans la salle Olimpiyski.

«Nous avons joué dans le Stade olympique de Moscou pour neuf concerts (40.000 personnes à chaque fois), puis à Saint-Pétersbourg (Leningrad, à l'époque) six concerts, et idem à Kiev. Trois villes, des concerts incroyables! Partout, le public écoutait attentivement entouré de policiers et miliciens (le KGB), avec interdiction de se tenir debout — un truc impensable auquel nous n'étions pas habitués. Une exception: lors de l'avant dernière journée à Moscou et avant de quitter la scène, nous avons décidé de jouer un medley de standards du rock'n'roll. Là, ce fut l'affolement général, une bonne partie du public s'est levée et les premiers rangs sont arrivés près de la scène. Le service d'ordre était débordé. Le lendemain, pour les deux derniers concerts en matinée et en soirée, le service d'ordre a été au moins doublé», se souvient-t-il avec une note d'humour.

Pour le guitariste, cette première tournée était une «aventure humaine incroyable».

«Je peux dire que je suis le premier guitariste qui ait joué sur la place Rouge en 1992», rigole-t-il au micro de Sputnik.

Au fil des temps, les chemins de Yann Benoist et Didier Marouani se sont séparés. Ensuite, le guitariste a travaillé pour de nombreux chanteurs connus hors de France et a eu l'occasion de retourner plusieurs fois en Russie. Néanmoins, après sa tournée en URSS avec Space, la chose qui lui tient le plus à cœur, c'est son travail avec Gilbert Bécaud, baptisé par ses fans «Monsieur 100.000 volts» pour son énergie et son charisme.

«Ce type était différent des artistes que je connaissais. D'un seul coup, je l'ai situé ailleurs: un musicien, un pianiste, on parle la même langue. Lorsqu'il rentrait sur scène, il était virevoltant. Avec Gilbert Bécaud, le show prenait une autre dimension: Bécaud t'emmenait dans son univers, il n'était pas vraiment complice avec le public, contrairement à d'autres qui en jouent. Sa complicité était avec les musiciens. Mais à l'arrivée la salle était debout», se souvient-t-il encore aujourd'hui.

Son travail particulièrement riche avec «Monsieur 100.000 volts» et ses tournées inoubliables en URSS puis en Russie, ont donné envie à Yann Benoist de retourner à Moscou pour retrouver le public russe et rendre hommage aux artistes qu'il a accompagnés sur scène, notamment Didier Morouani, Renaud, Alain Souchon, Renaud, Mireille Mathieu et Patricia Kaas. Cependant, c'est vers Gilbert Bécaud que ses pensées s'envoleront lors de ce moment magique des retrouvailles avec le public. D'ailleurs, dans son spectacle, il reprendra les plus gros succès de son répertoire.

«Son répertoire n'est pas facile. Je ne pouvais pas revisiter tous les morceaux, mais j'en ai décortiqué plusieurs. Ceux d'une certaine époque étaient difficiles à bouger, et puis… Bécaud était aussi un acteur, il vendait bien ses chansons! Dans "L'indien", il parle, en revanche je me suis rendu compte qu'il y avait plein des riffs, donc je les ai repris. "La rivière", je ne l'ai pas beaucoup changée. "Nathalie" en reggae, ça l'aurait éclaté! "Et maintenant" c'est aussi différent, j'ai souhaité mettre en avant la mélodie triste d'origine. Finalement, toutes les musiques de Bécaud sont riches, tu peux bouger certains accords et conserver l'émotion. Pour moi, aujourd'hui, Bécaud est encore là et bien là! », a-t-il enfin conclu.

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