Demain, chers auditeurs, sera-t-il anarchiste ? Je m'explique… Emmanuel Macron, élu par défaut, s'impose maintenant, un mois plus tard, dans les esprits. Il devrait remporter haut la main les législatives, et compter sur une majorité absolue, sans même d'ailleurs compter les défections tout aussi probables chez Les Républicains.
En tout cas, notre invité du jour plaide pour un renouveau anarchiste, et plus précisément pour le renouveau d'une pensée anarchiste, peut-être la plus connue de tous bien qu'elle soit retombée dans l'oubli, celle de Pierre-Joseph Proudhon. Thibault Isabel est le Rédacteur en chef de la revue Krisis, et vient de publier chez l'essai Pierre-Joseph Proudhon, l'anarchie sans le désordre, essai d'ailleurs préfacé par Michel Onfray (Autrement, 2017).
Extraits :
« Nous nous retrouvons aujourd'hui face à un néolibéralisme omnipotent, sans alternative véritable pour s'y opposer. Il n'y a pas d'alternative vivante aujourd'hui. Nous oublions qu'avant la domination de Marx, c'est Proudhon qui était la figure de proue des intellectuels contestataires, en France, en Europe, dans le monde. En revenir à Proudhon, c'est redécouvrir une manière de s'opposer au libéralisme qui n'est ni socialisme ni communisme. »
Anarchistes et conservateurs
« Il faut savoir que le terme libertaire a été créé dans une polémique contre Proudhon. [On] reprochait à Proudhon d'être trop conservateur. L'anarchisme à l' origine était une doctrine profondément imprégnée de conservatisme. Ce dernier à l'époque défendait des idées très proches de l'anarchisme. On pourrait presque dire que c'étaient les deux pôles d'une même famille de pensée, un peu comme on dirait aujourd'hui que la social-démocratie et le communisme appartenaient à une même famille, avec certains plus radicaux que d'autres (…) Proudhon était sans doute plus révolutionnaire que ne l'était Tocqueville mais très honnêtement leur idéologie, sur le fond, était exactement la même… »
Ni Etat ni marché
« Nous sommes confrontés à un certain nombre de crises, crise de l'état par celle de la dette, et on assiste aussi à une crise du capitalisme. Dans ce contexte-là, la vie quotidienne des Français va se dégrader au fil des années si nous ne mettons pas en place des alternatives. Le système des mutuelles et des associations de Proudhon peut nous guider. (…) Proudhon considérait qu'il y avait deux manières de perdre sa liberté : on pouvait perdre sa liberté à cause d'une bureaucratie étatique centralisée et quasi dictatoriale, et au plan économique, quand on voit se développer de très grandes entreprises. Celles-ci mettent en place une bureaucratie identique à celle des grands Etats centralisés. Proudhon pensait qu'il fallait rejeter le grand Etat et le grand capital au nom du petit Etat et du petit capital. »
Les vieilles lunes
« Quand on sort des sentiers battus, on est attaqué. C'est dommage, nous avons besoin de rénover notre logiciel si nous voulons adapter la pensée politique alternative aux réalités de notre temps, et Proudhon peut nous y aider. »
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