Les défis restent « considérables » au Sahel, selon les mots d'Emmanuel Macron. Il avait promis durant sa campagne une accélération des « actions d'appui à la montée en puissance des forces du G5 Sahel ». Voilà qui pose les enjeux d'un déplacement d'Emmanuel Macron et de la ministre des armées Sylvie Goulard au Mali.
« Je crains que cette présence ne soit pas dissuasive. Elle s'inscrit dans la durée. Une opération onusienne ne peut pas en quatre années aboutir à ce que font d'autres opérations. Je pense au Congo (RDC), à travers la Monusco devenue la Monuc. Une opération qui dure depuis 25 ans », constate Emmanuel Dupuy, président de l'IPSE, inquiet de la multiplication et de la mutation des groupes armés terroristes depuis l'arrivée des forces étrangères, il y a quatre ans:
« Ils n'ont pas le même référent, mais ont tous le même objectif: remettre en cause la légitimité de l'État central malien », analyse Emmanuel Dupuy. Une situation inquiétante pour les civils, victimes également de « la recrudescence du banditisme et de la criminalité violente. »
Pour autant, les islamistes restent l'ennemi public N° 1 au Mali, du simple fait de leur succès. Aujourd'hui, il y a « une sorte d'hybridation, une logique de métastase, où les cellules terroristes sont en train gangréner l'ensemble du Mali. Il ne s'agit pas seulement de groupes armés touareg du Nord, on voit une radicalisation au sein de communauté, notamment Peul et Bambara. »
« Il faudra mieux cibler les actions de coopération que par le passé », estime Jean-Louis Arajol, ancien officier de liaison au Mali de 2007 à 2013. Le nord du pays était tombé en 2012 entre les mains de groupes djihadistes liés à Al-Qaïda à la faveur d'une rébellion touareg, d'abord alliée à ces groupes, et par la suite évincée. L'intervention militaire française au Mali, qui a fait reculer les islamistes et a coûté la vie à 19 soldats français, a été un des temps forts du quinquennat de François Hollande. Si l'armée française est bien présente, l'armée malienne n'est pas encore prête à assurer la relève: « Aujourd'hui, vous avez en tout et pour tout six compagnies militaires maliennes compétentes pour faire face à l'ennemi, mais c'est trop peu par rapport à la densité du pays », poursuit M. Arajol, aujourd'hui consultant en matière de sécurité et de défense.
« Il y a une radicalisation qui s'est ressentie au Mali. […] Mais on a toujours eu la chance au Mali d'avoir un Haut Conseil Islamique Malien (HCIM), qui a toujours été modéré et a su contenir cette radicalisation rampante. […] Il faut espérer que les religieux qui tiennent le HCIM puissent continuer à le faire », conclut Jean-Louis Arajol.