Fleury-Mérogis : une prison sous pression

© AFP 2024 Geoffroy Van Der HasseltFleury-Mérogis
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Lundi soir, la prison de Fleury-Mérogis était bloquée par ses gardiens qui réclament plus de moyens pour faire face à des conditions de travail toujours plus difficiles : de la surpopulation carcérale aux agressions quotidiennes, en passant par un grand nombre de postes vacants.

Ambiance plus que tendue hier soir à Fleury-Mérogis (Essonne), où les forces de l'ordre ont dispersé à coup de gaz lacrymogène les membres du personnel pénitencier. Entre 350 et 400 surveillants de prison, excédés suite à l'agression, jeudi dernier, de six d'entre eux dans la coursive du quartier des mineurs. Une agression survenue suite à une rixe entre deux adolescents qui a rapidement dégénéré en bagarre générale. Gravement blessés, les six gardiens ont dû être hospitalisés.

Un acte particulièrement grave, commis par « des gamins précocement sans foi ni loi » pour reprendre les mots du communiqué de SNP-FO pénitentiaire, et dont le titre annonce la couleur « Semaine noire pour les Bleus… Une de plus!!! » On peut d'ailleurs voir dans ce document que figurent deux autres mobilisations, à Villepinte et devant la Direction de l'administration pénitentiaire, respectivement les jeudis 13 et 20 avril.

La prison de Fleury-Mérogis bloquée - Sputnik Afrique
La prison de Fleury-Mérogis bloquée: les gardiens incendient leurs barricades (VIDEO)
FO pénitentiaire, qui avec l'UFAP-Unsa Justice (majoritaire) et la CGT pénitentiaire, ont décidé de faire front commun. Après un premier rassemblement vendredi devant l'enceinte de la prison, les trois syndicats de l'établissement ont décidé ce lundi de frapper fort en organisant le blocage complet du centre pénitencier. Une action à la hauteur de leur exaspération. « Ici, on subit quotidiennement des agressions, des violences physiques » s'insurge Olivier Legentil, du syndicat Ufap-Unsa Justice qui décrit un personnel à « bout de nerfs ».

Hormis le slogan « Au feu, la pénit' brûle », les pancartes des manifestants, succinctes, résument parfaitement l'étendue du défi qui s'impose aujourd'hui au personnel pénitencier: « Surpopulation, sous-effectifs, danger ». Il faut dire que Fleury Mérogis — réputée pour être la plus grande prison d'Europe, également geôle de Salah Abdeslam, l'auteur des attentats de Paris le 13 novembre 2015 — est remplie à 180 % de sa capacité. Une surpopulation aggravée par des postes de fonctionnaires vacants. Ainsi, il manquerait 150 surveillants, selon les représentants syndicaux.

Ce sont ainsi 100 détenus que chaque gardien doit surveiller (la prison accueille 4 200 détenus). Une équation insoluble sur laquelle revenait au micro de RTL Christine, gardienne à Fleury: « ce que vous vivez à l'extérieur, avec la peur de l'attentat, nous c'est la même, mais confiné. »

Une situation de sous-effectifs du personnel pénitencier d'autant plus problématique que le milieu carcéral doit faire face et s'adapter à de nombreux défis, par exemple la radicalisation. Olivier Legentil nous détaille les attentes de ses collègues de travail:

​« On demande une fouille de l'établissement, on demande le comblement des postes vacants, on demande le report de l'ouverture des QER [Quartiers d'évaluation de la radicalisation], car on doit ouvrir un service fin avril, mais sans personnel supplémentaire prévu par l'administration. Donc le problème est qu'on doit prendre des surveillants sur d'autres services […] lorsque vous avez des postes qui ne sont pas couverts, cela induit sur la sécurité de l'établissement et des personnels. »

À cela s'ajoutent des sanctions insuffisantes. Le Figaro révélait que sur les mineurs impliqués dans l'agression des gardiens, quatre de plus de 16 ans ont été transférés au quartier disciplinaire et deux autres, cette fois-ci de moins de 16 ans, sont confinés en cellule. « Des sanctions insuffisantes, compte tenu de la gravité des faits et des profils, selon les personnels. » insistait le quotidien.

​« On demande à ce que cet article de loi, l'article 57, soit abrogé. C'était la loi Taubira » déclarait hier soir, un manifestant devant notre caméra. Autre point d'achoppement entre la place Vendôme et le personnel pénitencier, cet article 57 de la loi pénitentiaire de 2009 (modifié depuis), stipule que les fouilles « doivent être justifiées » par « des raisons sérieuses de soupçonner l'introduction » d'objets ou de substances prohibés et que dans tous les cas, celles-ci doivent demeurer « strictement nécessaires et proportionnées ».

Des doléances qui ont très certainement été présentées par les représentants de l'intersyndicale lors de leur rencontre avec la direction de l'administration pénitentiaire cette après-midi, alors que dans la matinée, le mouvement de protestation continuait, cette fois dans la ville de Fleury-Mérogis, avec une « marche des oubliés de la République ».

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