« Je trouve ces pratiques discutables, car cette utilisation à outrance de la manipulation par l'image fausse le jugement des spectateurs, mais également des journalistes qui relatent un enthousiasme et une adhésion qui s'avère être factice. »
Le développeur de 38 ans ne cache pas son penchant pour le candidat opposé, Jean-Luc Mélenchon, mais réfute l'idée selon laquelle il aurait voulu faire un croche-pied au candidat « En marche! »
« Les électeurs doivent faire un choix qui va impacter l'avenir du pays sur les cinq prochaines années ainsi que notre position sur l'Europe et dans la scène internationale. Ce n'est pas un choix qui doit se faire à la légère et encore moins en se basant simplement sur un spectacle. »
« C'est comme pour un film: on va filmer ceux qui s'agitent le plus, ceux qui ne s'agitent pas restent dans l'ombre. Si au montage on coupe ceux qui ne s'agitent pas, on dit "c'est de la manipulation". C'est du montage! Il y a une intention de donner une image positive de ces meetings, ce n'est pas une manipulation, c'est une intention. Les partis politiques, Macron comme les autres, ont des intentions, et tout ce qu'ils peuvent faire pour donner une image positive d'eux-mêmes (utiliser des gens pour chauffer la salle, utiliser des moyens électroniques, utiliser du marketing), ils l'utilisent. »
Derrière la sémantique de ses discours, se cache aussi une stratégie digitale bien rodée. Le côté start-up dans son mode opératoire est clairement assumé. Il s'adresse à l'électeur comme au consommateur de politique, preuve en est avec le fameux « diagnostic » de la France. Macron a désormais un atout maître en main, puisqu'il dispose une vaste banque de données, amassées lors de la première étape de sa quête du pouvoir. Des milliers de marcheurs ont collecté environ 100 000 témoignages de français. Une « start-up en stratégie électorale », a recueilli le verbatim des interrogés, et c'est une PME spécialisée dans « le traitement automatisé du langage », et qui n'avait jamais travaillé pour des politiques avant, qui en a extrait l'essence sémantique qui fournit à Emmanuel Macron les éléments de langages adaptés à son auditoire, en fonction des préoccupations de certaines catégories socioprofessionnelles identifiées par exemple.
« C'est le seul homme politique en France qui a compris que les outils du marketing, les outils qui servent aux entreprises, avec beaucoup de succès, à vendre tous les jours des yaourts ou autre chose, peuvent être mis au service d'une cause politique. Ça ne veut pas dire que la cause politique est nulle et ça ne veut pas dire que c'est honteux de faire ça, simplement il est un peu en avance, comme ce qui se fait aux États-Unis. Aux États-Unis, il y a des activités de communication autour des candidats qui sont incroyablement sophistiquées en termes de marketing, qui utilisent tous les modèles de la communication de produit, et qui prennent les électeurs pour des consommateurs de politique. Macron est le premier à faire ça en France. »
Une technique aussi pour que le candidat ne s'évente pas et garde toute saveur, « Gardez les "Macron Président" au bon moment », comme dirait la Team Ambiance. Manipulation ou bonne intention? Innovateur ou imposteur?
« Si on pense sur le fond que ses meetings sont intéressants, eh bien tous les moyens sont bons pour mettre de la bonne ambiance. Si on pense que ses meetings sont toxiques, on va dire que c'est discutable », conclut Antoine Lefebure.
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