Les Américains, coincés à Mossoul, reportent l'assaut

© REUTERS / Alaa Al-MarjaniCloud of smoke rises from a car bomb belonging to Islamic State militants after a controlled explosion by the Iraqi Federal police, during clashes with Islamic State militants, eastern Mosul, Iraq, January 13, 2017.
Cloud of smoke rises from a car bomb belonging to Islamic State militants after a controlled explosion by the Iraqi Federal police, during clashes with Islamic State militants, eastern Mosul, Iraq, January 13, 2017. - Sputnik Afrique
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De violents affrontements ont éclaté dans l'est de la ville de Mossoul, bastion des terroristes de Daech en Irak dont la prise devait constituer la réponse des Américains au succès de la Russie à Alep en Syrie.

Des unités d'élite irakiennes participent à l'assaut au prix de lourdes pertes, appuyées par l'aviation et l'artillerie de certains pays occidentaux. Les bombardements ont déjà conduit à une catastrophe humanitaire, contraignant des dizaines de milliers de citoyens à quitter leur maison sans pouvoir trouver de nouveau logement. Bien que la coalition compte trois fois plus d'hommes que les djihadistes les combats de rue, notamment dans l'ouest de la ville, pourraient se prolonger jusqu'à l'été.

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Il y a trois mois, quand l'opération pour libérer Mossoul des terroristes de Daech (organisation interdite en Russie) ne faisait que commencer, le secrétaire américain à la Défense Ashton Carter déclarait que l'assaut "pourrait être terminé avant 2017". Aujourd'hui, la victoire sur les groupes terroristes est encore loin. Des affrontements particulièrement intenses sont à prévoir pour la possession des importants postes fortifiés comme l'université de Mossoul et l'hôpital Kindi.

L'opération contre l'État islamique est actuellement menée par une coalition aux ordres du Groupe opérationnel unifié sous le commandement du général Steven Townsend, chef du 18e corps aéroporté de l'armée américaine.

Aujourd'hui, les principaux efforts de la coalition près de Mossoul se concentrent sur la libération de l'est de la ville, le blocage des communications de Daech en provenance du sud et du nord-ouest, ainsi que la perturbation de la gestion des groupes terroristes par d'importantes frappes aériennes.

La coalition compte au total près de 30 000 hommes, qui font face à quelques milliers de terroristes de Daech dont plusieurs centaines d'étrangers.

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On pourrait répartir les groupes terroristes entre ceux qui agissent à l'est et à l'ouest de Mossoul, ainsi que près de la ville de Tall Afar à 55 kilomètres au nord-ouest de Mossoul. Contrairement aux déclarations du commandement américain et irakien, les communications entre les différents groupes terroristes actifs dans plusieurs régions n'ont pas été rompues.

L'offensive sur l'est de Mossoul est menée sur trois axes par les forces unifiées du ministère de la Défense, du ministère de l'Intérieur et du service antiterroriste de l'Irak sous le commandement opérationnel unifié du général irakien Talib Chaghati. Le groupe est appuyé par les forces spéciales et l'artillerie des USA et du Royaume-Uni, ainsi que par la 101e division aéroportée.

Dans le centre de la ville travaille une division spéciale irakienne qu'on appelle la "division d'or".

Ses troupes d'assaut — avec une participation de militaires américains passée sous silence — a réussi à traverser le quartier Dabit vers le Tigre en direction du pont n°4 qui a été détruit par l'aviation américaine le 22 novembre 2016. Sa progression y est pour l'instant stoppée.

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Au sud-est, l'offensive est menée par la 9e division blindée irakienne particulièrement touchée dans les combats de rue, renforcée par une brigade d'infanterie. Ses troupes, avec le soutien de l'aviation et de l'artillerie américaine, ont réussi à repousser Daech des quartiers Falastin, Dumez et Sumer.

Au nord-est avancent les unités de choc d'une division d'infanterie irakienne soutenues par des lance-roquettes multiples (LRM) américains et français.

Les troupes offensives positionnées sur cet axe ont réussi à atteindre les quartiers Sukr, al-Baliadiya, al-Musanna avant d'être bloquées pendant un certain temps près d'al-Hadbaa devant des quartiers renforcés de Kindi et de l'université de Mossoul. Le 13 janvier, on apprenait que les militaires irakiens occupaient déjà plusieurs bâtiments universitaires.

Le deuxième échelon de l'offensive est assuré par plusieurs divisions de la police fédérale irakienne qui nettoient les quartiers occupés de manière chirurgicale.

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Détail important: l'offensive avance uniquement parce que les terroristes de Daech résistent de manière sélective dans certains quartiers.

Les militaires occidentaux sont déployés près de la base aérienne de Qayyarah et de la ville de Karamlis. L'artillerie attaque les positions des terroristes à Tel Keppe et à Baviza dans les régions nord-est de Mossoul, mais les forces irakiennes n'ont pas encore progressé dans cette zone.

Au nord-ouest se concentrent les rebelles chiites d'Hachd al-Chaabi, qui ont reculé de Tel Keppe après que l'aviation américaine a attaqué par erreur leurs positions. De plus, deux brigades d'infanterie de la 15e division d'infanterie irakienne, dont le reste se trouve au sud de la ville, mènent des opérations sur cet axe (au niveau de la portion de route entre Mossoul et la ville kurde de Sinjar) sans grand succès.

A l'arrière de la coalition avançant sur l'est de Mossoul se trouvent des territoires contrôlés par les peshmergas, les forces armées du Kurdistan irakien qui ne participent pas directement à l'assaut de la ville. Près de la capitale des Kurdes, Erbil, se trouvent plusieurs milliers de soldats occidentaux, majoritairement américains, auxquels il n'est pas prévu pour l'instant de faire appel pour l'opération à Mossoul. Leur mission consiste à couvrir le Kurdistan irakien contre d'éventuelles attaques de Daech, déjà constatées près de Kirkuk.

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Le nord-est de Mossoul reste sous le contrôle des terroristes — ce qui ne se reflète pas dans les comptes-rendus américains. Les unités kurdes positionnées au nord de Mossoul, selon les déclarations officielles, ne doivent pas participer à l'assaut de la ville.

Les Kurdes ne sont probablement pas à la hauteur d'une telle mission actuellement car ils manquent d'armements lourds et de matériel.

Le contingent turc qui pourrait apporter un soutien à l'offensive au nord-est, quant à lui, est appelé par les autorités irakiennes à quitter le pays.

L'armée irakienne pourrait également être à bout de forces. Il y a un mois, Daech a fait subir des pertes très importantes aux unités blindées irakiennes et aux unités d'élite irakiennes de la division d'or.

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Ces forces d'assaut pourraient également manquer d'énergie et de moyens pour les quartiers et contrôlés par Daech — sans parler de l'ouest de Mossoul plus petit mais bien plus fortifié et renforcé. Sachant que l'armée irakienne ne dispose pratiquement pas d'autres unités préparées pour le combat urbain.

Les opérations militaires entraînent de graves pertes civiles. D'après la coordinatrice de l'Onu en Irak Lise Grande, durant la première semaine de janvier les hôpitaux situés en territoire gouvernemental ont reçu 683 habitants de Mossoul blessés pendant les combats de rue dans l'est de la ville, auxquels il faut ajouter 817 blessés hospitalisés depuis le début de la phase active de l'assaut fin décembre. On ignore pour l'instant le nombre de morts exact.

Les activités militaires ont déjà poussé l'Irak au bord de la catastrophe humanitaire. Selon l'Onu, au moins 138 000 personnes ont quitté les quartiers libérés de Mossoul et ses environs, sachant que les camps mis en place pour les recevoir ne peuvent pas accueillir plus de 100 000 réfugiés. Au final, beaucoup restent sans toit, sans nourriture et sans eau potable.

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Si Daech relâchait la population civile des quartiers contrôlés, on compterait alors des centaines de milliers de réfugiés.

Les leaders terroristes, militairement compétents, semblent avoir une bonne idée des capacités militaires et opérationnelles réelles de la coalition entourant Mossoul. Ils ont conclu qu'une partie des forces et des moyens employés à défendre Mossoul pouvaient être projetés dans d'autres régions de la Syrie. Ils ont assez facilement rendu le sud-est de la ville pour intensifier leurs efforts sur l'opposition contre l'armée syrienne près de Palmyre et Deir ez-Zor, ainsi que sur la défense d'al-Bab dans la province syrienne d'Alep.

Manifestement, la nouvelle phase d'assaut sur Mossoul ne devrait pas tant contribuer à la défaite de Daech en Irak qu'au rétablissement de la réputation des généraux américains sur fond de succès de la Russie à Alep.

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