« Cette mort est inacceptable (…) Alors que toute la classe politique française dénonce les accords du Touquet et l'externalisation de la politique britannique en France, la France fait la même chose ici à sa frontière italienne », Françoise Sivignon, présidente de Médecins du Monde, a dénoncé la situation lors d'un point de presse convoqué avant le décès de l'adolescente érythréenne, percutée par un poids lourd sur l'autoroute entre Vintimille et Menton alors qu'elle tentait de franchir la frontière franco-italienne.
Plusieurs organisations de terrain accusent les autorités françaises de créer un nouveau Calais dans la ville italienne où les migrants se retrouvent bloqués. Deux mois se sont écoulés depuis le passage en force de 200 migrants à Menton le 5 août. Deux mois se sont écoulés depuis que le maire de Menton Jean-Claude Guibal a demandé au ministère de l'Intérieur à renforcer le dispositif policier et militaire à la frontière avec l'Italie en le complétant par un contrôle anti-terroriste.
La situation ne s'améliore pas et la pression ne retombe pas. Une des raisons est la composition du camp: les deux tiers des migrants en transit à Vintimille sont originaires du Soudan et 10 % d'entre viennent d'Éthiopie et d'Érythrée, dont le régime totalitaire rend les ressortissants éligibles à l'asile en France.
Mais pour Laurent Chalard, géographe au European Centre for International Affairs, la vraie raison est ailleurs:
« On a affaire au problème du contrôle des frontières extérieures de l'Union européenne à travers le fameux espace Schengen. Comme l'Union européenne est dans l'incapacité de contrôler ses frontières, on a des afflux permanents de migrants qui remontent au fur et à mesure vers les pays européens dans lesquels ils souhaitent aller, en général les pays d'Europe de l'Ouest les plus riches.
Donc, on a de plus en plus de migrants qui se retrouvent bloqués à des frontières entre deux pays européens. C'est lié à la politique de fermeture entre les États, puisque l'Union européenne est incapable de surveiller ses frontières extérieures. On revient bien au problème premier: c'est l'incapacité à contrôler ses frontières extérieures. »
Au cours des douze derniers mois, plus de cent mille migrants sont entrés en Italie. Cette forte pression migratoire amène les migrants à ne pas se contenter d'essayer de passer la frontière par l'autoroute, la voie ferrée ou la route de bord de mer, mais à remonter dans l'arrière-pays et à tenter de passer la frontière par des petits chemins de montagnes.
Pour Laurent Chalard, il y a pourtant un exemple a suivre:
« Aujourd'hui, le principal problème, c'est qu'il n'y a pas de contrôle du pays de départ contrairement au cas du Maroc. Au milieu des années 2000 on avait une forte émigration clandestine qui allait du Maroc vers l'Espagne, mais suite à la militarisation de la frontière et aussi à des accords passés entre l'Espagne et le Maroc, le Maroc s'est arrangé pour que personne ne passe. Aujourd'hui, tant que la Libye sera dans une situation politique instable, on aura à nouveau un flux de migrants qui vont continuer pendant un certain nombre d'années. »
Une situation de blocage se profile de deux côtés: la crainte que parmi les centaines de migrants qui arrivent sur le territoire français se cachent de possibles terroristes et la pression humaine des milliers de migrants qui, après avoir fait un long voyage, se retrouvent bloqués entre les deux frontières, mais qui n'abandonnent pas leur désir de parvenir à une destination rêvée.
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