Jean-Guy Talamoni. Oui, il faut rétablir la vérité puisque certain nombre d'informations a circulé sur certains organes de presse parisiens aux termes desquelles une famille maghrébine aurait était attaquée par les habitants de la commune de Sisco.
C'est exactement le contraire qui s'est passé.
Nous avons un grand nombre de renseignements sur ce point parfaitement concordants qui nous indiquent que ces agresseurs sont bien ces personnes extérieures à la commune. Les victimes sont de jeunes adolescents. Il y a eu de la part de la population de la commune une réaction qui est tout à fait saine, tout à faire légitime: on ne peut pas admettre que les adultes d'une quarantaine d'années s'en prennent à des adolescents en faisant en plus référence explicitement à des revendications communautaristes et religieuses. La population de la commune de Sisco ne s'est pas laissé faire. Nous avons de ce point de vue-là apporté notre soutien entier à la population de Sisco »
Jean-Guy Talamoni « Il y a évidemment la tension que ces faits ont généré non seulement dans la commune, mais en tout la Corse. Ça nous a paru important d'appeler au calme, aussi de demander aux Corses de ne pas pratiquer la politique du « bouc émissaire », surtout de ne pas confondre ces personnes qui se sont rendues coupables d'agissements graves, avec la grande majorité de la communauté d'origine maghrébine en Corse, généralement parfaitement intégrée et qui respecte les valeurs du peuple corse. Il s'agit de faire la différence entre les personnes qui ont eu un comportement de voyou et ceux qui sont à nos côtés au quotidien et qui travaillent pour subvenir aux besoins de leurs familles Nous avons donc appelé les Corses à garder leur sang-froid, à être extrêmement vigilants et nous les avons appelés au calme »
Sputnik. Sur la Côte d'Azur deux communes ont défendu l'accès à la plage pour les femmes habillées en burkini. Est-ce qu'en Corse ce problème existe?
Jean-Guy Talamoni. Le Conseil municipal de la commune de Sisco a pris hier après-midi un arrêté interdisant le burkini sur la plage de Sisco. C'est de la responsabilité de cette municipalité. Il nous a paru tout à fait logique que les élus de la Corse aient cette réflexion parce que le problème de l'intégrisme religieux islamiste concerne toute l'Europe. La Corse n'est pas indemne et on l'a vu encore ces derniers temps.
Ça a été très clair à l'Assemble de Corse: la résolution a été votée à la quasi-unanimité, gauche, droite et nationaliste confondus. Cette résolution est très ferme sur les dérives qui ont lieu d'ores et déjà, on sait qu'il y a des cas de la radicalisation en Corse. Nous avons demandé à l'administration française qui est juridiquement en charge de ces questions aujourd'hui (puisque nous ne disposons pas pour notre part les moyens de police et de justice) qu'elle fasse fermer les lieux de prières qui soutiennent des propos incompatibles avec nos valeurs et que les pseudo-religieux qui se rendent coupables de ces propos soient expulsés purement et simplement. C'est une revendication non pas seulement des autorités corses élus, c'est-à-dire des nationalistes aujourd'hui, mais de l'ensemble de l'Assemblée de Corse — dans le vote, il y a eu trois abstentions sur 51.
Il n'y a pas de place pour ces dérives en Corse, il n'y a pas de place pour le salafisme, il n'y a pas de place pour le wahhabisme et nous avons dit très clairement que nous ne tolérerions pas à cet égard la moindre dérive.
Jean-Guy Talamoni. Aujourd'hui, c'est l'administration d'Etat qui est en charge de la sécurité. A la collectivité territoriale de Corse, dans notre responsabilité, il n'y a pas de compétence en matière policière. Nous le regrettons. Je le regrette, parce que je suis indépendantiste.
Cela ne veut pas dire que nous nous désintéressons de ce problème. Au contraire, aujourd'hui nous avons des relations régulières avec l'administration d'Etat et nous exigeons qu'elle nous donne toutes les informations sur ce qu'il fait pour assurer la sécurité des Corses. Même si nous n'avons pas de compétence juridique, nous avons une compétence politique, nous avons une compétence morale, nous sommes en charge des intérêts immatériels de l'ensemble des Corses.
A l'heure où je vous parle, il n'est pas dans mon intention de mettre en cause qui ça soit dans la façon s'occuper de la sécurité. Ce sont les choses complexes, il ne s'agit pas de faire la politique politicienne sur la question de la sécurité.
Sputnik. La Corse est isolée. Est-ce que en cas de nécessite vous avez suffisamment de moyens insulaires pour protéger votre population?
Jean-Guy Talamoni. L'administration française nous assure que sur le plan policier tout est fait aujourd'hui, que les lieux publics sont suffisamment sécurisés. Nous en prenons acte.
Sputnik. Le maire de Cannes a édité un communique pour expliquer les règles de « bonne conduite » sur les lieux de baignade publique. La burkini n'est pas autorisé, puisqu'elle n'est pas « respectueuse des bonnes mœurs et de la laïcité » Est-ce que les quelques centimètres carrés de bikinis que portent certaines filles sont plus respectueux de bonnes mœurs que le burkini qui couvre totalement?
Jean-Guy Talamoni. (rire) Je n'ai pas d'opinion particulière sur la rédaction de cet arrêté municipal. Je pense qu'il y a un contexte particulier. A Sisco c'est la décision du conseil municipal. Il est sain et normal que les élus réfléchissent à la manière dans la situation si tendue d'assurer la sécurité de leurs concitoyens, de leurs administres. Si cela passe par l'interdiction des burkinis sur les plages de Corse, il est de la responsabilité des élus municipaux de prendre ces décisions.