Outre M.Erdogan, l'ex-premier ministre du pays Ahmet Davutoğlu et l'ex-ministre de l'Intérieur Efkan Ala ainsi que toute une série d'autres personnalités politiques sont visés par la plainte. Sur 200 pages, ses auteurs accusent ces hommes politiques turcs de crimes perpétrés dans les provinces kurdes du sud-est du pays, notamment à Cizre, ville de la province de Sirnak, précise la chaîne ARD.
L'un des chefs d'accusation est la disparition de 178 personnes qui ont été brulées vives alors qu'elles se cachaient de l'artillerie et des chars turcs dans des sous-sols. La plupart des victimes étaient des civils.
Déposée par les avocates Britta Eder et Petra Dervishaj, la plainte a été soutenue par une série de députés du Bundestag de Die Linke ainsi que par plusieurs scientifiques allemands et européens et par des organisations de défense des droits de l'homme.
"Nous ne comprenons pas pourquoi le gouvernement fédéral reste muet au sujet de ces crimes. Nous considérons que les assassinats de masse de civils en Turquie sont des crimes de guerre et contre l'humanité. Pour cela Erdogan et ses complices doivent être traduits en justice", a déclaré dans un entretien à Sputnik la députée Ulla Jelpke.
Selon elle, vu les liens étroits au niveau gouvernemental entre les deux pays, il est impossible de passer ces crimes sous silence.
"J'attends que le parquet fédéral engage une enquête pénale, d'autant plus que nous disposons de suffisamment de preuves: des témoignages, enregistrements vidéos et d'autres indices. Mais je ne me fais pas d'illusions", a avoué la femme politique, rappelant qu'une initiative similaire avait eu lieu en 2011. A l’époque, l'affaire avait été classée, Recep Tayyip Erdogan (alors premier ministre) bénéficiant d'une immunité politique.
"Mais contrairement à 2011, nous avons porté plainte contre l'ancien premier ministre Ahmet Davutoğlu et d'autres anciens membres du gouvernement qui ne bénéficient plus de l'immunité. Par ailleurs, nous avons porté plainte contre les militaires turcs", a-t-elle précisé.
Mme Jelpke a indiqué que depuis 25 ans elle se rend régulièrement en Turquie, en Syrie et en Irak et qu'au début des années 1990 elle avait été témoin des massacres perpétrés à l'encontre des Kurdes de Turquie. Or, il n'y a jamais eu de poursuite pour ces crimes commis en 1993.
Depuis décembre dernier, les autorités turques mènent des opérations antiterroristes dans plusieurs localités du sud-est peuplées de Kurdes et touchées par des heurts entre forces de sécurité et membres du PKK. Selon l'état-major de l'armée turque, plus de 1.000 combattants kurdes ont été tués depuis la mi-décembre.
Le Parti démocratique des peuples (HDP) affirme cependant que l'opération a fait plusieurs centaines de morts parmi la population civile.