Des décennies se sont écoulées, mais la Seconde Guerre mondiale fait toujours trembler à sa seule idée. D'abord, les gens, désorientés, ne comprenaient pas ce qui se passait… "Des parachutistes! Des parachutistes!", se réjouissaient-ils… Ils ne savaient pas que c'étaient des mines.
Le sol tremblant sous les bombes qui tombent. Les villes en feu. Et puis, soudain, ils ont compris: la guerre a commencé.
Voici le premier jour de la guerre raconté à la première personne.
Extrait des souvenirs du caporal Hans Teuschler: "A 22 heures nous avons été rassemblés pour lire l'ordre du führer. Enfin on nous a dit pourquoi nous étions ici. Pas du tout pour une projection en Perse pour battre les Anglais avec l'autorisation des Russes. Et pas pour endormir la vigilance des Britanniques, mais pour projeter ensuite rapidement les troupes vers la Manche et débarquer en Angleterre. Non. C'est une guerre contre l'Union soviétique qui nous attend, nous, les soldats du grand Reich. Mais il n'existe aucune force capable de retenir l'avancée de nos armées. Ce sera une véritable guerre pour le Russes, pour nous — une simple victoire. Nous prierons pour elle".
22 juin, 00h30
La directive numéro un a été envoyée dans les districts pour ordonner d'occuper furtivement des positions d'attaque sur la frontière, ne pas réagir aux provocations et mettre les troupes en état opérationnel.
Extrait des souvenirs d'Alevtina Kotik, née en 1925 (Lituanie): "Je me suis réveillée en me cognant la tête contre le lit — le sol tremblait des bombes qui tombaient. J'ai couru chez mes parents. Mon père a dit: "La guerre a commencé. Il faut partir d'ici!". Nous ne savions pas avec qui la guerre avait commencé, nous n'y pensions pas, tout simplement nous avions très peur. Mon père était militaire, c'est pourquoi il a réussi à appeler une voiture pour nous transporter jusqu'à la gare. Nous n'avons pris que des vêtements. Tous les meubles et les ustensiles étaient restés. Nous avons d'abord voyagé à bord d'un train commercial. Je me souviens que ma mère me protégeait moi et mon frère de son corps, puis nous avons pris un train de passagers. Nous avons appris qu'on était en guerre avec l'Allemagne aux alentours de midi de la part des passants. Près de la ville de Šiauliai nous avons vu de nombreux blessés, des brancards et des médecins".
04h12
Des bombardiers allemands ont fait leur apparition près de Sébastopol. Le raid a été repoussé, et la tentative d'attaquer les navires a été mise en échec, mais des immeubles résidentiels et des entrepôts de la ville ont été endommagés.
Extrait des souvenirs d'Anatoli Marsanov, habitant de Sébastopol: "J'avais seulement cinq ans à l'époque… Tout ce dont je me souviens: dans la nuit du 22 juin des parachutes sont apparus dans le ciel. Les lumières se sont allumées, toute la ville s'est éclairée, tout le monde courait joyeusement en criant: "Des parachutistes! Des parachutistes!"… Ils ne savent pas que ce sont des mines. Et ces dernières ont explosé, une dans la baie, une autre plus bas dans notre rue en faisant beaucoup de morts!"
04h15
La défense de la forteresse de Brest a commencé. Dès la première attaque à 04h55 les Allemands ont occupé pratiquement la moitié de la forteresse.
Extrait des souvenirs du défenseur de la forteresse de Brest Piotr Kotelnikov, né en 1929: "Un choc puissant nous a réveillés le matin. Le toit a été percé. J'ai été sonné. J'ai vu des morts et des blessés, et j'ai compris: ce ne sont pas des exercices, mais la guerre. La plupart des soldats de notre caserne ont été tués dans les premières secondes. J'ai suivi les adultes pour prendre les armes, mais je n'ai pas reçu de fusil. J'ai alors suivi un soldat pour éteindre l'incendie dans l'entrepôt. Ensuite, je suis descendu avec les combattants dans les souterrains de la caserne du 333e régiment d'infanterie voisin… Nous aidions les blessés, transportions les munitions, la nourriture et l'eau. Dans la nuit on passait par l'aile ouest pour aller chercher de l'eau jusqu'à la rivière et revenir".
05h00
A 05h00, heure de Moscou, le ministre du Reich aux Affaires étrangères Joachim von Ribbentrop a convoqué les diplomates soviétiques dans son bureau. A leur arrivée il leur a annoncé le début de la guerre. La dernière chose qu'il a dit aux diplomates était: "Transmettez à Moscou que j'étais opposé à l'attaque". Après cela les téléphones de l'ambassade ont été coupés et le bâtiment a été encerclé par la SS.
09h00
A 07h00, heure de Berlin, le ministre du Reich à l'Éducation du peuple et à la Propagande Joseph Goebbels a prononcé à la radio le message d'Adolf Hitler au peuple allemand annonçant le début de la guerre contre l'Union soviétique: "… J'ai décidé aujourd'hui une nouvelle fois remettre le sort et l'avenir du Reich allemand et de notre peuple entre les mains de nos soldats. Que Dieu nous aide dans ce combat!"
09h30
Le président du præsidium du Soviet suprême de l'URSS Mikhaïl Kalinine a signé plusieurs décrets, y compris sur l'instauration de l'état d'urgence, sur la création de la Stavka (état-major des forces armées soviétiques), sur les tribunaux militaires et sur la mobilisation générale s'appliquant à tous ceux qui étaient nés entre 1905 et 1918.
Extrait des souvenirs du présentateur Iouri Levitan: "Quand dans la matinée nous, les présentateurs, avons été convoqués à la radio, les appels retentissaient déjà. Un appel de Minsk: "Des avions ennemis sont au-dessus de la ville", un appel de Kaunas: "La ville est en feu, pourquoi vous ne le dites pas à la radio?", "Des avions ennemis au-dessus de Kiev". Une femme en pleurs inquiète — "c'est vraiment la guerre?". Et je me souviens avoir allumé le micro. Dans tous les cas j'étais inquiet seulement à l'intérieur. Mais là quand j'ai prononcé " Ici Moscou", je sens que je ne peux plus parler — j'ai une boule coincée dans la gorge. On frappe déjà depuis le studio — "Pourquoi vous ne dites rien? Continuez!". J'ai serré les poings et j'ai continué: "Citoyens et citoyennes de l'Union soviétique…"
12h30
Au même moment les troupes allemandes sont entrées à Grodno. Quelques minutes plus tard, les bombardements de Minsk, de Kiev, de Sébastopol et d'autres villes ont repris.
Extrait des souvenirs de Dina Belykh, née en 1936 (Kouvcha, région de Sverdlovsk): "Tous les hommes ont été immédiatement mobilisés, y compris mon père. Il a embrassé ma mère, les deux pleuraient et s'embrassaient… Je me souviens avoir serré ses bottes en criant: "Papa, ne pars pas! Tu vas te faire tuer!" Quand il est monté dans le train, ma mère m'a prise dans ses bras, nous pleurions toutes les deux, elle me chuchotait à travers les larmes: "Fais signe à papa…" Mais je pleurais tellement que je ne pouvais pas bouger mon bras. Nous ne l'avons plus jamais revu."
15h00
Les pilotes des bombardiers allemands ont rapporté qu'il n'y avait plus rien à bombarder, tous les aérodromes, casernes et groupes de blindés ayant été détruits.
Extrait des souvenirs du maréchal d'aviation, héros de l'Union soviétique Gueorgui Zimine: "Le 22 juin 1941, d'importantes unités de bombardiers fascistes ont attaqué 66 de nos aérodromes où étaient basés les principales forces aériennes des districts frontaliers. Avant tout ils ont bombardé les aérodromes où étaient déployés les régiments aériens, de nouveaux avions de guerre… Lors des frappes contre les aérodromes et des combats aériens, l'ennemi a réussi à détruire jusqu'à 1 200 appareils, dont 800 sur les aérodromes."
19h00
Le commandant en chef du groupe d'armées Centre Fedor von Bock donne l'ordre de stopper les exécutions de prisonniers de guerre soviétiques. Après cela ils étaient détenus dans des camps improvisés entourés par un fil barbelé dans les champs. C'est ainsi que sont apparus les premiers camps de prisonniers.
Extrait des notes de Georg Keppler, chef du régiment Der Führer de la division SS Das Reich: "Notre régiment s'est retrouvé en possession de riches trophées et d'un grand nombre de prisonniers, dont beaucoup de civils, même des femmes et des jeunes femmes, les Russes les ont forcés à se défendre les armes à la main, et ils ont courageusement combattu avec les soldats de l'Armée rouge".
23h00
Le premier ministre britannique Winston Churchill déclare à la radio que l'Angleterre "apportera à la Russie et au peuple russe tout l'aide possible".
Discours de Winston Churchill à la BBC: "Au cours des 25 dernières années il n'y a pas eu de plus grand opposant au communisme que moi. Je ne retirerai aucun des propos prononcés. Mais tout cela s'estompe face à la situation actuelle. Le passé avec ses crimes, folies et tragédies disparaît… Je vois des soldats russes au seuil de leur propre territoire pour protéger les champs cultivés par leurs pères depuis la nuit des temps… Je vois l'abjecte machine de guerre nazie s'avancer sur tout cela."