Les Russes ne sont pas tous russes ethniquement: un individu né en Russie peut être fier d'être Cosaque, Bachkir ou Juif, mais à l'étranger, par tradition, indépendamment de leur origine, tous sont considérés comme "russes". Et ce n'est pas un hasard: en règle générale, ils présentent des similarités en matière de mentalité et partagent certains stéréotypes de comportement, affirme Nikolaï Kozlov, docteur en psychologie.
Les Russes ont de quoi être fiers: ils ont un pays immense et puissant, des personnalités talentueuses et une littérature profonde, tout en connaissant leurs points faibles.
Mais d'un point de vue scientifique, quels sont les traits spécifiques de la mentalité russe?
La communauté, la primauté du commun sur l'individuel ou "nous avons tout en commun" et "de quoi les gens parlent".
L'unité conduit à l'absence de notion d'intimité et à la possibilité qu'une mamie voisine s'ingère dans votre quotidien et dise tout ce qu'elle pense à propos de votre tenue, de vos manières et de l'éducation de vos enfants.
Dans le même registre, on retrouve les notions de "société" et de "collectif" absentes en Occident. "L'avis du collectif", "ne pas se séparer du collectif", "que diront les gens?" – c'est la communauté sous sa forme pure. D'un autre côté, on vous dira si vous avez une étiquette qui dépasse de votre chemise, un lacet défait, un pantalon éclaboussé ou un sac plastique troué. Sans oublier l'appel de phares sur la route pour avertir de l'approche d'un radar de la police.
L'aspiration à vivre dans la vérité.
Le terme "vérité", qu'on rencontre souvent dans les anciennes sources russes, signifie les normes de droit sur lesquels s'appuie un procès. Les sources de codification sont les normes du droit classique, la pratique judiciaire princière, ainsi que les normes empruntées aux sources prestigieuses, notamment les Saintes Écritures.
En dehors de la culture russe, on parle plus souvent du respect de la loi, des règles de décence ou des commandements religieux. Dans la mentalité orientale on ne parle pas de vérité: en Chine il est important de vivre selon les écrits laissés par Confucius.
Entre la raison et l'émotion, les Russes choisissent l'émotion: la sincérité et la spiritualité.
Dans la mentalité russe, l'"utilité" est pratiquement synonyme d'un comportement mercantile, égoïste, et qui n'est pas valorisé — comme quelque chose d'"américain". Il est difficile d'imaginer pour un Russe moyen comment il est possible d'agir sciemment et consciemment non seulement pour soi, mais également pour d'autres, c'est pourquoi les actions désintéressées s'assimilent à un acte "du cœur", s'appuyant sur les émotions et non sur la raison.
Il est propre aux Russes de ne pas apprécier la discipline et la rigueur, de vivre selon l'humeur, de passer d'un état d'esprit pacifique et miséricordieux à une révolte impitoyable visant une destruction totale – et inversement. La mentalité russe vit plutôt selon un modèle féminin: l'émotion, la douceur, la miséricorde en réagissant par les larmes et la rage aux conséquences d'une telle stratégie de vie.
Un certain négativisme: la plupart des Russes voient plus souvent leurs défauts que leurs mérites.
A l'étranger, quand un individu accroche par hasard un autre, la réaction type est pratiquement toujours la même: "Pardon", des excuses et un sourire. C'est une question d'éducation. Hélas, ces réactions types en Russie sont plus négatives: on entendra plutôt "regarde où tu mets les pieds" ou des termes encore plus agressifs. Les Russes savent bien ce qu'est la mélancolie: il n'est pas convenu de sourire dans la rue, de sourire aux passants, de regarder dans les yeux, il est mal vu de faire connaissance et d'entamer simplement une conversation.
Le sourire, dans la communication russe, n'est pas un attribut obligatoire de la politesse.
En Occident, plus un individu sourit plus il témoigne de politesse. Dans la communication russe traditionnelle, la priorité revient à la sincérité. Le sourire, chez les Russes, affiche la disposition personnelle envers un autre individu, qui ne s'étend évidemment pas à tout le monde. C'est pourquoi les individus qui sourient de manière forcée suscitent de l'aversion.
On peut demander de l'aide – il est fort probable qu'on vous aidera. Il est normal de demander dans la rue une cigarette ou un peu d'argent. Un homme qui est toujours de bonne humeur éveille des soupçons – soit il est malade, soit il n'est pas sincère. Celui qui sourit généralement aux autres, si ce n'est pas un étranger, est forcément un fayot, n'est pas sincère..
Aimer débattre.
Les débats occupent une place traditionnellement importante dans la communication russe. Le Russe aime débattre sur des sujets divers, particuliers et généraux. Aimer débattre sur des questions globales et philosophiques est un trait caractéristique du comportement communicatif russe.
L'homme russe voit souvent le débat non pas comme un moyen de trouver la vérité, mais comme. Comme l'a noté un écrivain britannique: "Un Russe débat toujours pour gagner". Et inversement, la description "sans conflit" est plutôt désapprobatrice, comme "molasse" et "sans principe".
L'homme russe vit en croyant au bien qui descendra un jour du ciel sur la terre russe martyre: "Le bien vaincra forcément le mal — mais après, un jour". Sachant que sa position personnelle est irresponsable: "Quelqu'un nous apportera la vérité mais ce ne sera pas moi. Je ne peux rien faire moi-même et je ne ferai rien". Depuis des siècles, le principal ennemi de l'homme russe est l’État – qui aime bien, mais châtie bien.
"Ne te fais pas voir".
Selon la mentalité russe, l'attitude désinvolte envers la politique et la démocratie en tant qu'ordre politique, où la source et le contrôleur de l'activité du pouvoir est le peuple, se caractérise par la conviction qu'en réalité les gens ne décident de rien et que la démocratie est un mensonge et une hypocrisie. Dans le même temps, on constate une tolérance et une habitude au mensonge et à l'hypocrisie du pouvoir à cause de la conviction qu'il ne peut en être autrement.
La pitié à la place de l'humanisme.
Si l'humanisme met sur un piédestal l'homme libre, développé et fort, la pitié se préoccupe des malheureux et des malades. Selon les statistiques, l'aide aux adultes est en 5e position en termes de popularité après l'aide aux enfants, aux personnes âgées, aux animaux et l'aide aux problèmes écologiques. Les gens ont davantage pitié des chiens que des hommes, et parmi les hommes il est plus important de soutenir des enfants handicapés que des adultes qui pourraient encore vivre et travailler.