Selon le journal suédois Expressen, la pierre d'achoppement entre l'ambassade et la chaîne est le film Seyfo 1915 — The Assyrian Genocide. Le terme Seyfo ou Sayfo se réfère au meurtre massif de la population "assyrienne" de l'Empire ottoman, pour la plupart des Arméniens, lors de la Première Guerre mondiale (1914-1918).
L'ambassade turque à Stockholm estime que ce documentaire "va à l'encontre de l'objectivité". "Le fait de considérer tel ou tel événement historique comme génocide ne relève que de la juridiction internationale", souligne-t-elle dans un communiqué.
De son côté, la directrice de production de la chaîne, Viveka Hansson, dénonce une pression de la part d'Ankara et s'engage à "protester contre toute atteinte à la liberté de l'expression".
"L'ambassade turque (à Stockholm, ndlr) cherche à faire pression sur la chaîne en l'exhortant à retirer le film de sa liste de diffusion. Ils (l'ambassade, ndlr) nous appellent à +reconsidérer notre décision+ de diffuser le film Seyfo 1915 — The Assyrian Genocide", relève Mme Hansson.
Les massacres et déportations d'Arméniens commis entre 1915 et 1917 dans l'Empire ottoman ont fait 1,5 million de morts selon les Arméniens. La Turquie refuse toujours de reconnaître ces massacres en tant que génocide et évoque pour sa part une guerre civile en Anatolie, doublée d'une famine, dans laquelle 300 à 500.000 Arméniens et autant de Turcs ont trouvé la mort.
Lors de la Première Guerre mondiale, l'Empire ottoman est aux côtés de l'Allemagne et de l'Autriche-Hongrie.
Lorsque l'Empire essuie de lourdes pertes dans les combats affectant les provinces arméniennes, les autorités en rejettent la responsabilité sur les Arméniens.
Thank you Turkish embassy in Sweden for highlighting the #Seyfo docu @TV4 Would've missed it if it weren't for you! pic.twitter.com/p0thotIkNL
— Sergio Escobar (@1_DonSergio) 25 avril 2016
Le 24 avril 1915, des milliers d'Arméniens suspects de sentiments nationaux hostiles au gouvernement central sont arrêtés. Le 26 mai, une loi spéciale autorise les déportations "pour des raisons de sécurité intérieure", suivie le 13 septembre d'une loi ordonnant la confiscation de leurs biens.
La population arménienne d'Anatolie et de Cilicie (région intégrée à la Turquie en 1921), appelée "l'ennemi intérieur", est exilée de force vers les déserts de Mésopotamie. Un grand nombre d'Arméniens sont tués en chemin ou dans des camps.
Beaucoup sont brûlés vifs, noyés, empoisonnés ou victimes du typhus, selon des rapports des diplomates étrangers et des agents de renseignement de l'époque.
A ce jour, une vingtaine de pays reconnaissent le génocide arménien. Le Parlement européen l'a reconnu en 1987, rappelle l'АFР.