Au cœur d'une métropole où règne le chacun pour soi, j'ai rencontré l'un de ceux qui n'a pas peur de donner et de prendre en charge les problèmes des autres:
"J'arrive sur le campement après 18 h, après mon travail. En général on aide les migrants sur place pour des conseils juridiques, pour une aide pratique, que ce soit aller chercher de la nourriture, trouver les dons et les amener, faire des distributions, accompagner certaines associations qui arrivent pour les orienter. Je viens quasiment tous les jours. Ça me semble important qu'il y ait un accueil pour les étrangers, je n'aimerais pas être dans leur situation. J'imagine que si j'étais réfugié dans un autre pays et qu'on me laissait dormir dehors à la rue sur un matelas, je trouverais ça très difficile et donc je trouve ça normal qu'en France on puisse accueillir les gens dignement, qu'ils aient non seulement le minimum — à manger, à boire, des habits —, mais aussi et surtout qu'il y a le respect du droit d'asile, que ça aille beaucoup plus vite et que du coup en attendant il y a des personnes qui soient plus solidaires à leurs côtés. En fait, c'est une double démarche, à la fois humaine — être à leurs côtés — et c'est également faire en sorte de l'État prenne ses responsabilités et apporte des solutions le plus vite possible. C'est pour ça que je suis ici."
Il existe un réseau d'associations en faveur des droits des migrants dont Romain fait partie. Pour soulager la vie quotidienne déjà difficile des nouveaux arrivants, il explique son action au quotidien:
Ceux qui vivent près de la station Stalingrad viennent aider comme ils peuvent, raconte Romain:
"Il y a des commerçants du quartier qui apportent des fruits et légumes tous les soirs. Il y a également une boulangerie qui apporte 15 à 20 kilos de pain, des invendus, tous les soirs aux migrants. Ça leur permet de compléter les repas et c'est des choses qui sont extrêmement utiles, c'est tout à fait faisable, d'autres commerçants peuvent le faire et c'est tout à fait souhaitable de développer ça. En lien avec d'autres associations, on donne des cours de français pour les demandeurs d'asile. On les oriente là où ils peuvent avoir des cours de français. Également, il y a des conseils juridiques, un accompagnement juridique avec des avocats. On s'assure de leur trouver des ordinateurs portables, des ordinateurs fixes afin qu'ils puissent être en contact avec leurs familles, qu'ils puissent avoir l'accès à Internet. Et également, on accompagne certains migrants qui sont en reprise d'études. Il y a des programmes d'études et d'apprentissage du français qui ont lieu dans des grandes écoles comme l'ENS, (École normale supérieure), l'EHESS (École des hautes études en sciences sociales). Certains des migrants que l'on connaît ont été orientés vers ces programmes et aujourd'hui ils apprennent le français ou bien sont en reprise d'études pour des licences, des masters. C'est quelque chose qui leur permet de s'insérer dans la société française."
Traverser ensemble des journées et des nuits difficiles — cela rapproche sans doute et l'amitié n'est pas rare quand il y a tant de soucis à partager:
Romain est un bénévole parmi des centaines des jeunes Parisiens qui savent donner aux autres. Cette crise migratoire est tellement regardée au travers d'un prisme géopolitique qu'on oublie parfois qu'elle aussi a un visage humain.
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