"Le gouvernement polonais compte mettre sous son contrôle notre utérus, nos ovoïdes et notre grossesse. N'est-ce pas gentil de sa part de s'en soucier autant?", fustigent les Polonaises sur Facebook.
Les femmes n'hésitent pas à spammer le compte Tweeter de Mme Szydlo en publiant des tweets avec le hashtag #TrudnyOkres (règles en polonais), dont le contenu est pour le moins indiscret:
"Qu'elle (la première ministre, ndlr) connaisse tous les détails piquants de notre vie intime. Elle se rappellera peut-être qu'elle est aussi une femme", critiquent-elles avec virulence.
En Pologne, l'Église catholique et le parti conservateur veulent en finir avec l'avortement https://t.co/OnYxRompI4 pic.twitter.com/GFHAlh4cBW
— Camille Grange (@Camillkaze) 5 avril 2016
Les protestations ont largement dépassé le cadre des réseaux sociaux. Ainsi, plusieurs milliers de personnes ont manifesté dimanche dernier à Varsovie devant le siège du parlement polonais pour protester contre une proposition de loi visant l'interdiction totale de l'avortement, soutenue par l'Eglise catholique et les conservateurs du parti Droit et Justice (PiS) au pouvoir.
Réunis à l'appel du parti de gauche Razem (Ensemble), de très nombreux manifestants avaient apporté avec eux des cintres en fil de fer, un instrument "utilisé autrefois par les femmes désespérées et privées du droit d'interrompre leur grossesse", selon les organisateurs.
Des pancartes alentour qualifiaient de "talibans" les partisans du projet et la Pologne d'"enfer des femmes".
D'autres appelaient à "Make love not PiS" (PiS, le sigle du parti Droit et Justice se prononce en polonais de la même manière que "peace" en anglais, ndlr).
Cette loi limite déjà strictement l'interruption volontaire de la grossesse (IVG) en Pologne, et ne l'autorise que dans trois cas: risque pour la vie et la santé de la mère, examen prénatal indiquant une grave pathologie irréversible chez l'embryon, et grossesse résultant d'un viol ou d'un inceste. Cette loi était considérée à l'époque comme "un compromis" entre l'Eglise et l'Etat.
Le nouveau texte proposé par plusieurs organisations anti-avortement autorise l'IVG uniquement si elle est nécessaire pour préserver la vie de la mère. Il porte la peine maximale pour la personne qui pratique l'avortement à cinq ans de prison, contre deux ans actuellement.
Selon les estimations des organisations féministes, entre 100.000 et 150.000 femmes procéderaient clandestinement à une IVG chaque année, soit dans des cabinets en Pologne, soit dans des cliniques allemandes, slovaques ou autrichiennes. Le nombre des avortements autorisés en Pologne, pays de 38 millions d'habitants, oscille entre 700 et 1.800 par an.