Un Boeing 737-800 reliant Dubaï à la ville russe de Rostov-sur-le-Don (sud) s'est écrasé dans la nuit de vendredi à samedi à 250 mètres environ de la piste d'atterrissage sans laisser de survivants. Avant que le drame qui a emporté la vie de 62 personnes ne se produise, l'appareil a raté sa première tentative d'atterrissage en raison des conditions météorologiques défavorables et a tourné pendant deux heures au-dessus de l'aéroport. Les experts examinent toutes les versions du crash tragique, dont l'erreur de pilotage et la défaillance technique.
Certaines compagnies aériennes préfèrent économiser, y compris sur le carburant, et pour cela elles sont hostiles aux situations nécessitant un atterrissage sur un autre aéroport, témoigne Vitali Nikadimov (à la demande des pilotes les noms ont été modifiés), employé d'une compagnie low cost et ex-pilote de l'aviation militaire.
"Dans certaines compagnies aériennes russes, il existe une règle tacite selon laquelle le commandant de bord ayant interrompu l'atterrissage risque d'être privé de bonus. C'est lié aux questions de prestige et au souci de dépenses supplémentaires sur le combustible ou sur les indemnisations en cas de retard", explique-t-il, soulignant toutefois qu'il ne s'agit que de certaines compagnies aériennes.
Et d'ajouter que pour l'atterrissage sur un autre aérodrome, le pilote peut encourir des sanctions encore plus rigoureuses: "Il faudra organiser le transfert des passagers vers l'aéroport de destination ou, en cas de retard, les placer dans des hôtels (…), ce qui n'est pas bon marché".
Toutefois, c'est le commandant de bord et lui seul qui prend la décision d'atterrir, précise-t-il.
"Je ne sais pas ce qui s'est passé avec le vol FlyDubai. Ce n'est pas sans raison que l'avion a tourné pendant près de deux heures au-dessus de Rostov, brûlant du carburant. Cela signifie qu'il était important d'atterrir sur cet aéroport. Je suis sûr qu'il s'agit d'un accident tragique, car dans ce genre de compagnie les pilotes sont très chevronnés", a-t-il noté.
De son côté, le pilote Alexandre Pogrebenko, depuis peu commandant de bord, considère que les propos sur l'économie de combustible sont plus qu'exagérés. "Dans la compagnie où je travaille c'est exclu", assure-t-il dans un entretien au journal Gazeta.ru, ajoutant qu'il peut exister toute une série de facteurs que les personnes étrangères au secteur ne prennent pas en compte.
"Le pilote aurait pu surestimer ses capacités, car faire atterrir un appareil par un vent de côté très important n'est point facile", dit M.Pogrebenko. Et d'ajouter qu'un imprévu aurait pu se produire à bord de l'avion.
"Prenons la vidéo diffusée sur la toile. Nous y voyons que l'avion est rentré dans le sol sous un angle de 45 à 60 degrés. L'avion était en train de tomber, mais le commandant de bord n'a pas prévenu l'aiguilleur de la situation anormale! (…) Pourquoi personne n'examine la version du détournement de l'appareil en vue d'une attaque terroriste?", s'interroge-t-il.
Pilote chevronné, Alexeï Esterkhanov, 54 ans, est d'accord avec ce dernier sur le point que l'économie du combustible et les sanctions contre les pilotes restent dans le passé.
"Certes, ceci a existé, mais c'est du passé. La sécurité du vol est la priorité des compagnies aériennes. Toutes les dépenses relatives aux retards et aux atterrissages sur d'autres aéroports sont le souci des gérants", dit-il.
Selon M. Esterkhanov, le crash de l'appareil FlyDubai soulève une série de questions, toutefois, selon lui, il est prématuré d'en discuter. "Il y a plusieurs versions, mais (…) il faut attendre que les boîtes noires soient décryptées", conclut-il.