La décision de la Belgique ressemble fort à celle que la France elle-même a prise vis-à-vis de l'Italie pour empêcher qu'il y ait des personnes venant d'Italie sur le territoire national, estime Violaine Carrère du Groupe d'information et de soutien des immigrés (GISTI) dans un entretien à Sputnik.
Pour l'instant, la Belgique n'est toutefois pas confrontée à un afflux massif de réfugiés, mais elle a le droit de prendre des précautions. Ceux qui devront quitter la Jungle se disperseront sans doute dans différents endroits, la Belgique pouvant devenir la destination de leur choix.
Mais qu'est-ce qu'on observe maintenant en Europe? Malgré des programmes de répartition équitable des demandeurs d'asile entre les Etats européens, ces derniers s'obstinent toujours à en accueillir le moins possible. Alors qu'ici il y a des pays qui de fait reçoivent de centaines de milliers voire de millions de réfugiés, comme la Turquie, le Liban et la Jordanie, là il y a les pays européens qui sont plus riches, plus en capacité économiquement d'accueillir ces personnes et qui n'ont qu'une obsession d'être celui qui en accueillera le moins.
Mais à quoi ça sert de mettre des contrôles à la frontière?
"Ça ne sert absolument à rien", pense Mme Millot. "Quelqu'un qui est un tout petit peu dégourdi passe en dehors de la route, par la plage, par les champs. (…) Et s'il n'est pas dégourdi, qu'est-ce qu'il fait? Il fera appel à des passeurs. Et ces pauvres gens depuis chez eux ils sont mal traités par des passeurs et on rajoute une étape de passeurs en plus. Est-ce que ça a du sens? En fait à mon avis ça dramatise le problème et c'est tout".
En effet, si la Belgique veut vraiment se protéger, il faut qu'elle construise un mur, fait-elle remarquer. Les Belges redoutent une arrivée massive de migrants pas parce que ces gens sont dangereux mais car ce sont des gens dont il faut s'occuper, leur donner à manger et à boire et ainsi de suite.
Maintenant qu'est-ce qu'il faut faire? Il faut essayer de trouver une solution au niveau des pays d'Europe.
"Si on leur offrait une solution, un peu partout en Europe, répartis sur les pays d'Europe, répartis à l'intérieur de la Belgique, répartis à l'intérieur de la France, il n'y aurait pas ces points de fixation avec des milliers de personnes", résume Mme Millot.
Cependant, vu le nombre de migrants toujours croissant, vu que Daech menaçait d'envoyer des milliers de migrants, on ne peut pas dire que la mesure belge soit exagérée.
"La Belgique a pris une décision qui s'impose, une décision nécessaire, une décision légitime qui est de protéger son territoire nationale face à l'afflux de migrants", affirme à Sputnik Cédric Michel, président du Syndicat de défense des policiers municipaux (SDPM).
Si l'on évoque des problèmes d'insécurité générés par les migrants comme ceux à Calais, en France en générale et un peu partout en Europe, à Cologne, en Suède, en Italie, on peut parler d'une sorte d'attentat, de terrorisme émanant juste de l'immigration massive, maintient-il.
Ainsi, les contrôles aux frontières risquent de devenir prochainement une des mesures nécessaires pour se protéger de tels risques, pour arrêter les éventuels terroristes.
La question, selon lui, est là: est-ce que l'on veut protéger sa nation face à l'insécurité terroriste, face à l'afflux de migrants qu'on ne peut pas raisonnablement accueillir? Cette question revient de plus en plus souvent dans les pays d'Europe.
Conformément aux accords Schengen, les pays qui les ont signés (au total 26 Etats) peuvent en effet rétablir des contrôles à leurs frontières mais uniquement pour des raisons sécuritaires. C'est une mesure exceptionnelle à laquelle on ne devrait recourir que dans le cas où toutes les autres possibilités sont épuisées. Sa durée maximale est de six mois. Le ministre belge a d'ailleurs affirmé que le rétablissement des contrôles "durera autant que nécessaire". Les contrôles ont débuté lundi soir pour atteindre leur plein effet mercredi: "quelque 250 à 290 policiers" ont été déployés sur le terrain. 32 personnes ont déjà été arrêtées.
La Belgique rejoint donc les six autres pays: la France, l'Allemagne, l'Autriche, le Danemark, la Norvège et la Suède, qui ont dû déjà suspendre Schengen face à l'afflux massif de réfugiés.
En décembre, le président de la Commission européenne Jean-Claude Juncker déclarait que la libre circulation des personnes au sein de la zone Schengen ne serait pas remise en cause et que "Schengen demeurerait".